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vendredi, 15 mars 2019

Le rôle du travail dans la transformation de l'humain en homoncule

Quels ont été les éléments du passage d’une société à filiation matrilinéaire, à la sexualité libre ignorant la vertu du sperme, à celle du patriarcat, à la sexualité contrainte basée sur l’homoncule ?

Quand on parle des temps anciens ou des sociétés présentes sans technologie, on trouve partout l’expression « chasseur-cueilleur » alors que la base sociale de la nourriture était la cueillette... qui est principalement exécutée par les *femmes* ? Ceci n’empêche pas la participation des femmes à la chasse et celle des hommes à la cueillette : il s’agit de rétablir la proportion des importances d’apport de la nourriture pour l’un et l’autre sexe. Ainsi, les apport de la femme au pot commun est-il au moins deux fois plus important que celle de l’homme avec sa chasse ! La cueillette consiste, certes, en cueillette de racines, feuilles, etc. mais aussi de l’élevage de larves, de champignons, etc. qui sont *aussi* important en protéines que la viande ! (En y pensant un peu, le premier outil en bois, a été inventé par la femme : le bâton fouisseur et non pas la lance dont on voit partout les hommes, encore eux, à la poursuite des animaux. Et la chasse consistait essentiellement à courir après l’animal pour l’épuiser : la lance arrivant pour l’achever).

Ainsi, de parler de « société de chasseur-cueilleur » est dépréciatif par rapport à l’empreinte de la présence de la femme dans cette dite-société. En conséquence, on devrait *toujours* parler de sociétés de cueilleuses-chasseurs ; car *ensuite* il a toujours s’agit d’agriculture. L’importance de la femme par son apport pratique de nourriture à la société est sans appel, aujourd’hui encore dans ces sociétés « primitives », société dont on peut considérer l’ensemble des femmes et des hommes comme *ensemble*. Je suis sûr que vous avez déjà compris l’affaire...

Le néolithique n’a pas commencé par l’agriculture, mais par l’élevage, dont la domestication des ovins semble être le point de départ. La chasse devient beaucoup moins indispensable, mais l’apport de la cueillette reste le même. Ici, l’élevage était une pratique mâle, quand la traite reste femelle, ou au moins la transformation du lait et de la chair en aliment, comme auparavant (encore qu’il s’agissait de la position du feu : intérieur -> femelle – ou extérieur –> mâle). Cet élevage a induit une « mentalité » – je parle *d’état d’esprit* – qui interprète la relation humaine à son nouvel environnement. Ici, il s’agit de *multiplier* les animaux, alors qu’auparavant, l’ensemble de la pensée était orientée vers l’idée de *division*. Pourquoi passe-t-on de la « fertilité » à la *fécondation* ? On disait d’un troupeau fertile qu’il se divisait en beaucoup (un, deux, beaucoup), on parle de la fécondation quand on multiplie (un, deux, quatre, huit...).

Ce qui m’a étonné jusqu’à maintenant, est que la légende qui « certifie » le caractère fécondant du sperme (au point d’en faire l’élément fondamental et unique de la reproduction de l’espèce : l’homoncule) date de 4 à 6 milles ans avant JC, ce qui est tardif au regard de l’invention, et de l’élevage et de l’agriculture (12 milles pour le premier, 8 milles pour le second). L’apparition du patriarcat n’est pas concomitant à l’invention de l’agriculture, mais postérieur... pourquoi ?

L’agriculture a déprécié l’importance de la femme dans l’apport de la nourriture, en ceci qu’elle a déprécié la cueillette, cueillette initialement à la base *sociale* de l'apport de nourriture, tandis que la chasse restait un mieux-être. Cette importance a été *socialement* dépréciée par l’agriculture qui apportait la nourriture à partir du *travail* de l’homme, une activité *autre*, alors que l’ensemble de l’activité féminine était considérée comme une  *activité naturelle*, dont, la cueillette, la grossesse et l’accouchement... d’où son importance *sociale*.

Chez les Trobriandais (La Paternité dans la psychologie primitive), les hommes émettent quelques doutes quand à l’absence socialement affirmée de non-correspondance entre le coït et la reproduction de l’espèce. Nous sommes dans une société de *jardinage*, où c’est le frère qui « nourrit » la sœur (bien qu’elle participe à la production maraîchère). L’activité liée à la nourriture est l’occupation des deux sexes, concomitamment. Ici encore, les femmes se moquent totalement de savoir *si* elles sont engrossées par les esprits ou par les mecs : c’est conforme à leur constitution de femme, à leur spécificité de femme que de mettre au monde des nouveaux-nés ! Et, chez les Trobriandaises, cela n’a aucune relation immédiate avec le coït. Il doit donc exister des dispositions pratiques où le procédé de la reproduction de l’espèce devient un questionnement *mâle*, sinon cela n’a aucun intérêt, ou même un intérêt extrêmement négatif, sachant ce qu’on connait du patriarcat.

Cette décrépitude de l’importance *sociale* de la femme qui mène à l’importance de la reproduction de l’espèce ayant pour centre social le mâle, provient du délitement de son importance dans l'apport de la nourriture, du fait que l’activité agricole est d’abord une activité mâle, dirigée par le mâle : ce sera donc lui qui prend la prééminence sociale de l’apport de nourriture. Cette situation est *sociale*, c’est-à-dire que l’homme a *droit sur* la femme et incidemment en matière sexuelle, outrepassant la femme consentante. C’est l’invention stupide et délirante du viol. Dès lors, la femme perd (comme je l’ai montré ailleurs) sa capacité naturelle à la régulation des naissances, et c’est *elle* qui fait la relation immédiate entre le coït forcé (le travail de l’homme) et la grossesse. S’instille alors une crainte du mâle qui vient confirmer à ce dernier qu’il *est* le mâle.

Le passage d’une société de filliation à celle à filiation (de mère à fille à celle de père à fils) se passe par la dépréciation de la femme dans l’importance de son apport *social* qui était de nourriture, importance vis-à-vis du *travail* du mâle à suer agricole. Le patriarcat se caractérise par le « moi-je », « c’est moi qui » (d’où le dieu mono), et disparait alors tout ce qui produit une cohésion sociale de partage et de sexualité « libre » ; bref, apparition de gens d’armes, d’État, d’impôts, de fainéants, de l'obnubilation de la plus-value. En inventant le *travail*, le patriarcat a inventé le viol. Et avec le viol, la grossesse est devenue une maladie.

C’est donc à cause du *travail* – alors qu’elle participait à une occupation sociale de son temps au cours d’une activité nourricière – dédié à la femme, travail qui induit la dépréciation sociale lde a cueillette dans l’apport commun à la nourriture, qu’est né le patriarcat, et avec lui son lot de malheurs *sociaux*, la découverte de la vertu fécondante du sperme – émissaire de l’homoncule, loin d'une vertu « fertilisante », mais procréatrice où la femme devient le vase de l’enfant à naître émis par le père – et les maladies inhérentes à la *désocialisation de l’humain*. Il a séparé le corps en deux entités : la chair et l’esprit.

Qu’importe les représentations du Primitif ignorant de la vertu du sperme, elles sont toujours liées à l’immédiat de la vie de son environnement sur la planète (religion animiste), tandis que le patriarcat a inventé, alors qu’il était soul de bière, le Verbe et celui qui l’énonce – Dieu – pour se dissocier de la vie sur la planète, de son environnement.

Avec l’agriculture, le mâle a inventé le travail en s’imaginant (il a fallu attendre Oscar Hertwig en 1876 pour montrer la coparticipation des deux sexes dans l’union des gamètes femelle et mâle) qu’en éjaculant il dépose dans la matrice de « sa » femme un *homoncule* (idée saugrenue qui montre l’étroitesse de sa pensée du monde). Il se destine à imposer le travail à tous et principalement à la parturiente. Le travail et l’homoncule sont l’essence du patriarcat. L’humain a disparu... reste un pantomime souffreteux socialement, affectivement et sexuellement.

Le patriarcat est une erreur humaine. C’est une erreur pataugeant dans l’insatisfaction sociale, affective, sexuelle. Elle est rectifiable. Le capitalisme est aujourd’hui le petit doigt qui cache le patriarcat en mouvement. Le patriarcat a inventé la souffrance socialement homicide – il s’agit du travail – pour remplacer l’occupation sociale, bienveillante, collaborative et partageuse, communiante. Il a inventé la mécanique et la béquille de la plus-value, insistant sur la fait que notre cerveau est destiné à cette technologie et aux « eaux glaciales du calcul égoïste », qui pourrissent tout. Or, notre cerveau est destiné à la suprême socialité. Nous savons quoi faire !

jeudi, 07 mars 2019

Aphrodisie

english version

Ce sera le dernier et le plus étonnant chapitre de ce livre.

Nous sommes bien conscients que le patriarcat a besoin de se reconnaître dans une morale - et une morale est toujours une morale qui tend à réguler les modalités du rapprochement entre les sexes - pour l'imposer à tous. Officiellement, pour le patriarcat, la sexualité n'est destinée qu'à la "reproduction de l'espèce". En s'appuyant sur la reproduction de l'espèce - et beaucoup de "camarades" et d'autres personnalités me reprochent de focaliser constamment leur attention sur ce pivot - toutes les morales et religions de ce monde patriarcal n'ont pour centre que la maîtrise du plaisir que la sexualité pourrait exiger : dans cette morale, le plaisir est disgracié car il éloigne la reproduction ("Tu enfanteras dans la douleur" encore aujourd'hui...).

Cet état d'esprit se reflète dans le commerce entre les personnes, l'économie de l'échange de biens, de vertus et de services, centrée sur la reproduction de l'objet afin d'obtenir une puissance qui coagule aujourd'hui en plus-value. Cette maîtrise de la sexualité consiste avant tout à l'abroger dans son aspect essentiellement " agréable ", de manière à l'éloigner de toute atteinte, à moins que la seule " reproduction de l'espèce " ne soit de la transférer à l'objet (même si cela signifie tout objectiver, aujourd'hui : marchandiser).

Mais, mes amis, une morale aveugle tout ce qui n'est pas elle. Et, à y regarder de plus près, quand la sexualité de la "reproduction" devrait être limitée aux seuls organes dédiés à la reproduction - les organes "génitaux" - c'est-à-dire, s'il vous plaît, à l’élaboration de la gonade masculine - testicules, prostate et glande séminale - et celle de la gonade féminine, je veux dire les ovaires, les trompes de Fallope et l'utérus, cette morale consiste à dissimuler ce qui est intrinsèquement consacré au plaisir, c'est-à-dire, dans le sexe féminin, la vulve-clitoris et le vagin, et dans l'homme le pénis et le gland. Bien sûr, il faut ajouter à cela ce que la morale patriarcale appelle honteusement les "zones érogènes".

Pour une telle dissociation au détriment de la sexualité de plaisir, les éléments du langage (les organes "génitaux") comprennent tous les organes sexuels et leurs accessoires dédiés au plaisir dans le seul but de la reproduction.

Cependant, ces organes sexuels destinés uniquement au plaisir (le "Cri du clitoris" a récemment été entendu comme le "seul" organe destiné au plaisir...) sont la vulve, le clitoris et le vagin pour les femmes et le pénis et le gland pour les garçons. D'accord, mais qui quoi qu’est-ce ?

Deux réflexions s'imposent : les "organes génitaux" sont liés au nerf hypogastrique et les "organes aphrodisiaques" au nerf pudental, même s'il y a, bien sûr, un enchevêtrement intime entre les extrémités de ces deux nerfs, comme pour le reste. Et le second est que lorsque Wilhelm Reich parle de "caractère génital" (adapté à l'orgasme reichien), il parle en fait d'aptitude à l'orgasme "aphrodisiaque", c'est-à-dire lié aux "organes aphrodisiaques" qui n'ont rien à voir avec la reproduction de l'espèce (sauf accessoirement), comme le pétale ou le nectar, par exemple, au pistil ou aux ovaires des fleurs.

Cela nous permet d'aborder les problèmes de caractère par des altérations de la perception des organes aphrodisiaques et non pas "génitaux" : les problèmes des maladies affectives sont liés aux organes aphrodisiaques et non pas "génitaux". Quand la morale de satisfaction anti-sexuelle - anti-aphrodisiaques - des religions patriarcales évite de distinguer ces deux aspects de la sexualité humaine (ou de tout autre animal, quel qu'il soit, puisque aucun autre animal, autre que nous, n'entend le coït pour autre chose que le plaisir, ne reconnaissant *rien* de la génitalité !) c'est pour que nous évitons d'entrer en contact les uns les autres sur les princeps simples du plaisir de notre rencontre sexuelle : la vulve-clitoris, le vagin, le gland, le pénis, le pénis - et les domaines érogènes, et hors concours, l'amour. J'ai remarqué qu'il faut répéter et répéter la même phrase pour qu'elle soit entendue, tout d'abord, et finalement comprise (bien que j'aie répété 10 fois à mon voisin qui dirige son générateur, qu'il n'a pas encore compris qu'il rend ma vie chiatique).

Les animaux ne s'accouplent pas pour "se reproduire".... parce qu'ils ne savent rien de la *complétion* de la "génitalité" du coït, ils ne savent rien des *conséquences* de cet accouplement. Par conséquent, ils copulent pour le *plaisir* et rien d'autre : l'attirance qu'ils ont l'un pour l'autre n'a d'autre pivot que le plaisir de s'accoupler et ses conséquences immédiates, l'orgasme *pair*.

Les religions et la morale capitaliste actuelle ne conçoivent pas qu'il puisse y avoir d'autre mouvement vital que la "reproduction" (du capital, de la marchandise, du pouvoir, des inégalités de genre et sociales, etc., bref, du corollaire "plus-value", de la valeur "minéralisée"), elle ne peut accepter que la vie se concentre initialement sur le plaisir du rapport sexuel, aphrodisiaque, car cela détruit sa structure caractéristique. Seuls les organes dédiés aux fonctions liées aux gonades féminines ou masculines (y compris la spécificité de la féminité de la grossesse) sont reproducteurs, *tous* les autres organes sexuels sont dédiés au plaisir du rapport sexuel, au plaisir aphrodisiaque.

J'appelle ces organes, les organes "aphrodisiaques". La destination des organes sexuels aphrodisiaques est le "plaisir". Cependant, la corroboration sympathique de ces organes aphrodisiaques n'atteint souvent pas leur *maturité de perception et d'auto-perception*, car les diverses peurs et douleurs qui les entourent de vivre seuls dans une société capitaliste (qui dissimule derrière son petit doigt le patriarcat en mouvement), impliquent et induisent des méfaits qui les affectent dans le fondement même de leur chair délicate (leur alliance, leur propension au partage, leur disponibilité, leur labilité émotionnelle, celle qui va précisément à la rencontre de l'autre) ET les peurs liées à la reproduction, car seule la femme doit alors l'assumer, sur qui l'homme prend ainsi un pouvoir.

Dans La Paternité dans la psychologie primitive, nous découvrons qu'il n'y a pas de relation immédiate entre "génitalité" et aphrodisie, puisque les filles et les femmes - qui consacrent presque leur vie aux délices du rapprochement sexuel - ne tombent enceintes que dans UN pour cent du temps *en dehors* du mariage. Cela signifie que toute violence contre les organes aphrodisiaques d'une femme perturbe sa capacité native à NE PAS reproduire l'espèce : le viol perturbe la capacité d'une femme à NE PAS reproduire l'espèce. Cependant, le viol ne concerne que les organes aphrodisiaques féminins (bien que vous ayez besoin d'une bite bien anesthésiée et que vous la haïssiez).

Tous les aspects que nous montre le patriarcat de la sexualité, où le seul destin qu'il comprend du monde est l'objet comme support du pouvoir, sont destinés à cacher sa maladie émotionnelle : le viol. La prostitution est une relation aphrodisiaque terriblement altérée par une morale patriarcale qui ne tolère pas de ne pas être reproduite, comme l'histoire d'Onan. Tout dans le patriarcat concerne la reproduction et, comme nous l'avons vu chez les Trobriandais et les autres tribus fillisées (héritage par la lignée de la fille), pour se reproduire, il faut violer. Le patriarcat fixe la sexualité humaine (alors que tous les autres animaux, TOUS, s'en fichent) sur la *reproduction*... de cette morale multiplicative (quand la vie est une *division* continue), alors qu'elle est simplement orientée vers le plaisir de la rencontre, exempte des modalités néfastes de ce patriarcat : violence, masculinité excessive, exploitation, désintégration de l'enfance, rejet de la femme à la vie sociale, rejet de la femme, peur du sang œstral, valeur ajoutée, virginité, vénération de l'objet comme instrument du pouvoir.

Pour moi qui vous soumets ce texte, il me semble qu'un retour à l'aspect aphrodisiaque de la vie humaine (puisque nous sommes les seuls animaux dans cette impasse du patriarcat) que toutes nos relations, entre nous et avec notre environnement, prennent une toute autre mesure de son impact, celle du plaisir sans exploitation, sans valeur ajoutée, sans objet comme support au pouvoir, la fraternité des complices et amateurs de vie, non ? Parce que, comme le note Wilhelm Reich, jusqu'à ce que le problème de l'aphrodisie soit résolu, le peuple exigera sa soumission à tout pouvoir, à un chef, par immaturité sexuelle, oops : aphrodisie inaccomplie ! Élever un enfant, garçon ou fille, dans le contexte de la reproduction ne donnera pas le résultat d'une vie vécue - dans le strict respect des autres, mais la recherche de la collaboration conduit au respect des autres - d'une manière aphrodisiaque et agréable (un bébé ne joue pas avec ses organes génitaux mais avec ses organes aphrodisiaques).

Ces organes nous appartiennent en propre et pour partager ceux des autres, nous devons avoir son entière approbation et son soutien en tant qu’égal à part entière. Tout doit être refait, repensé, sinon c'est la cata ! En commençant par des livres d'anatomie * et des cours d'éducation sexuelle : "On peut distinguer deux aspects de la sexualité, comme vous le savez bien, celui concernant la reproduction de l'espèce (organes génitaux) et celui concernant le seul plaisir que vous avez déjà rencontré intimement, qui comprend les organes aphrodisiaques délicats et sensibles et les "zones érogènes" excitantes... ".

*où il faudra changer le nom de nerf "pudental" ou "honteux" par nerf "aphrodisiaque".

 

dimanche, 31 octobre 2010

Mal de pieds

Pour se rencontrer il faut d’abord se croiser ; pour se croiser il faut se trouver au même endroit, à la même heure et sensiblement dans deux directions opposées. Ce n'est que de cet instant-là que la rencontre est possible en brisant le sens du mouvement inducteur pour en faire un mouvement déducteur à la mesure de la grandeur d’un étonnement ou d’une surprise qu’il faut avoir perçue, sinon c’est lettre indifférente ou morte. Ainsi, on croise une multitude de gens sans qu’il y ait pour autant de rencontre.

Depuis un bon bout de temps, j’ai remarqué qu’il y a un rythme dans le croisement des gens (pas la rencontre : le croisement des gens) et cela m’intrigue. Il arrive souvent de croiser des personnes alors qu’on se rend quelque part pour une course ou un rendez-vous et que lorsqu’on revient de cette course ou ce rendez-vous, on croise, en sens inverse, la même personne qui, elle, a eu aussi sa course ou son rendez-vous, et sensiblement -- à quelques dizaines de mètres près -- au même endroit. Cela arrive assez souvent, dès lors, bien sûr, où on n’a pas le nez dans le guidon de la vie quotidienne ou les yeux au-dessus de grosses poches de fatigue pour pouvoir le remarquer. Le temps, l’espace de temps entre les deux événements n’a pas de règle précise : il peut être de l’ordre de la vingtaine de minutes aux deux heures bien tassées. Mais pendant tout ce temps, il s’est passé deux choses de totalement différentes, dont un des résultats est ce re-croisement furtif. Amusant, non ?

Si je ne me suis pas encore arrêté, c’est que je ne sais pas trop ce que je pourrais faire avec précisément ces personnes, sinon que leur poser des questions qu’elles ne comprendraient pas, je suppose. Je suis un peu bête, parfois, je l’avoue, ou pas assez courageux. Et pour ce qui est d'aborder une femme, dans de telles conditions, c’est comme si vous alliez, pour elle, directement lui demander de lui monter dessus, en ces temps de liberté chérie, ou plus simplement vous porter au devant de recevoir un dédain, un mépris ou une moquerie à vous cacher sous terre pour une simple affirmation : « je vous ai croisée tout à l'heure et croyez bien que cela m'intrigue ».

Bien sûr que cela m’intrigue de l'avoir remarquée ! Si je réfléchis « prédestination », je ne vois pas où elle me mènerait dans l'impasse que j'ai dite tout à l'heure ; si je réfléchis « hasard », ce croisement n’a aucun intérêt en soi : il se passe, sans plus et sa fréquence est de l’ordre de la courbe de Gauss matérialisée par l’aboutissement de plusieurs billes tombant d’une hauteur et retardées par des obstacles régulièrement disposés ; si je réfléchis « humain », je n’ai pas de réponse sinon que de dire : « ça arrive ! » à quoi je  réponds : « Oui, mais, à une telle fréquence ? » car il arrive certains jours où on croise trois fois la même personne qui vous était auparavant inconnue.

Les croisements sont donc nombreux, repérables et fréquents, mais, bien que tributaires de ces croisements, les rencontres sont d’un autre ordre. Et là aussi, il y a des choses à remarquer. Il y a des périodes où on croise telle ou telle personne et on se doute bien qu’il y a comme une politique derrière tout ça dont on est le sujet, parfois bénéficiaire ou maléficiaire, ou bien elle de quelque chose de vous. C’est très lol !  Il y a comme un message à transmettre de l’un à l’autre, à un moment donné dont on ne doute pas, lorsqu’il est bénéfique, qu’il est tout à fait opportun et le contraire dans le cas contraire… mais qui est pourtant ! En y songeant un peu, on se dit qu'il est évident que, dès ce moment où l’on est un sujet de l’humanité, l’humanité se manifeste à vous en tant qu’objet intégrant. Mais pour autant, on ne rencontre pas n’importe qui n’importe quand !

Très lol, comme je disais tout à l’heure. Je ne vois pas cela comme un fortuit, bien que j’y sois obligé par la nature du hasard (billes-chemin-obstacles) ; disons que j’aimerais bien que cela ne soit pas fortuit pour me sentir comme intégré dans une immense toile de relations dont je ne suis pas toujours à même de percevoir l’enchevêtrement ou les relations causales, car ça me fait comme du bien de ne pas me sentir seul dans ce grand tout, ce grand chaudron qui contient une soupe si bigarrée, polyglotte et multiculturelle, où je le suis pourtant, affectivement. C’est se placer comme centre du monde en sachant qu’on ne l’est pas, et supposer que tout le monde se pose en centre du monde en sachant qu’il ne l’est pas ; simplement pour tenter de répondre à une question qui pourrait très bien ne pas être formulée puisqu’elle ne tient que sur l’hypothèse que l’on est le centre du monde alors qu’on sait très bien qu’on ne l’est pas tant !

Et pourtant, s’il n’y avait pas ces croisements, il n’y aurait pas de rencontre possible. La rencontre comme résultat d’un croisement particulier mène à penser que le croisement a pour but la rencontre, parfois ; selon des critères que je cherche à percer ! Imaginons que je réussisse à rendre translucide ce phénomène du croisement, combien de croisements ne provoquerai-je pas pour que les gens se rencontrent ! Les journaux titreraient, en gras : « Le maniaque de la rencontre a encore frappé » comme chapô d’article qui contiendrait en gros ceci : « Encore une fois, le maniaque de la rencontre a frappé : muni de sa théorie qu’il pense, ce fou, infaillible, il a encore poussé deux personnes à se rencontrer. Hélas, ne maîtrisant qu’à moitié son sujet, cette rencontre s’est encore soldée par une rupture : les deux personnes, initialement bien disposées l'une à l'autre, les yeux en larmes, le cœur blessé, ont dû se séparer pour partir dans des directions opposées, l’une au couchant, l’autre au levant, une main tenant un mouchoir et l’autre le vague à l’âme comme le couteau damassé des émotions fortes dont elles ont fait usage, tâché de sang cordial. Pourquoi donc, tel de piètres journalistes ou les politiques à l'âme morte, ne retient-il pas de la rencontre que le but, le peu qu'ils savent vivre ne leur permettant pas d'y percevoir davantage que les fins, pour que, comme eux, avant la fin, il n'y ai rien ? Ni la découverte, ni l'aventure du vécu, celle des approches, l'évolution et les changements, l'adaptation volontaire et celle, curieuse, involontaire dont on retire parfois des délices insoupçonnés ou des erreurs qui se retournent à vous comme des claques cinglantes, les imaginations fausses et les intuitions géniales, les déductions faramineuses et les totaux abruptement brutaux, les tentatives de solutions, leur échec comme leur réussite, les bonheurs fugaces et leur tenace persistance, ces douloureuses expériences qui s'effacent comme la brume au soleil qui se décide enfin à apparaitre, en bref la masse — dont on ne pourrait se dispenser de vivre sinon que mort — de l'histoire de ces personnes, qui se trouve à leur yeux dépourvue d'existence compréhensible ou plus simplement, plausible ou envisageable, si fatigués qu'ils sont d'avoir si peu vécu tant de petitesses ! Quand allons-nous arrêter cette folie qui crée tant de malheur dans nos foules de solitude ! Que fait la police des solitaires ! Pourquoi amener les gens à vivre vraiment ce qu'ils ont dans le cœur et qui peut avec tant d'aisance apporter accessoirement le bonheur autant que le malheur ? Combien devrons-nous subir de ses lacunes que ce démoniaque nous montre, acerbe, dans la gouverne communication mentale, dans les brochures et les sites ad hoc, dans la presse et la télévision qui n’en parlent pourtant quasiment jamais ou de manière si vicieuse ! Elles en parlent déjà trop, de cette tendance qu’ont les gens à se laisser emporter par la moindre des poésies malhabilement placardée sur les murs léchés par l’ombre sombre de nos villes. Nos efforts pour rendre malade la rencontre, en réussissant que les gens ne se croisent que toujours, sans fin occupés à une occupation inexorable et futile, resteront-ils vains tant de temps ? Que cesse cette infamie, que l’on passe à l’autodafé cette théorie mortifère pour notre morale ! Que cela cesse ! Que l’on nous protège de la rencontre ! ».

Hélas, croyez bien que si je pouvais être un tel bandit, je me donnerai avec plaisir à une telle vergogne, d’autant que je serais moins seul… encore qu’on affirme souvent que le cordonnier est le plus mal chaussé.

vendredi, 29 octobre 2010

À narchie, anarchie et demi

Pour ne plus se faire entuber par ceux-ce qui veulent tout s’accaparer pour eux, je propose une ou deux solutions.

Préambule :

Les gens aiment qu’on les hypnotise par les paroles, par les images, par les sons. On ne peut pas faire autrement, sinon le monde ne serait pas ce qu’il est ; les gens aiment oublier leur condition d’être humain par ces moyens et d’autres encore : on ne peut rien y faire, c’est la nature de l’humain. L'humain a besoin de se savoir et de se sentir plus vrai que nature et ce vrai est l'affectivité sociale qu'il reçoit. L’humain n’est ni bon ni mauvais, il EST selon lui-elle : point. Il doit cependant se méfier de lui, de ses réactions, comme de ses décisions dès lors qu’il lui est attribué une responsabilité, car il aime aussi dominer : l’ivresse du pouvoir est d’un attrait irrésistible pour beaucoup trop d’entre nous et elle est la plus dure des drogues, plus dure encore que celle du vin et celle de pouvoir faire souffrir légitimement l’autre.

Il est indiscutable que nous devons nous organiser et, en conséquence, trouver une organisation pour cela. Dès qu’un humain, à d’extrêmement rares exceptions quasi-mythologiques, est mis au pouvoir, il se corrompt : à penser que l’humain et le pouvoir, ça ne va pas ensemble. Mais pour autant, il est besoin d’une organisation collective, c’est-à-dire de gens, de personnes à qui on délègue, car on ne peut soi, s’occuper de tout, de telle et telle tâche qui font parties de l’organisation normale de notre société. S’il faut un pouvoir, il faut un contre-pouvoir. Mais les gens se lassent et sont paresseux : la passion du commandement n’entraîne que quelques lambins qui veulent faire les lanternes. On peut pourtant poser une ou deux règles.

L’objet de ces règles est de protéger l’humain contre lui-même. L’humain, pris collectivement, doit savoir qu’il est nuisible à son genre et doit l’admettre, le reconnaître pour prendre des dispositions qui restreignent cette aptitude. L’humain tue, éventre, castre, circoncit, infibule, meurtrit, torture, maltraite par mille chemins divers ; il sait que cela doit cesser car cela l’incommode, mais il ne sait comment. L’humain n’est pas un « ange » ni un « démon » qui sont des vues de son aptitude à la création d’images qui le rassurent sur ses propres pensées diffuses desquelles il ne peut rien faire et ne sait généralement rien faire. De plus, il aime la cachotterie, la dissimulation, l’intrigue, les affaires, les scandales, le sang et les affrontements et est friand de ce qui se rapporte à la sexualité des autres, mais cela ne doit pas nous empêcher de vivre chacun notre vie comme on l’entend.

L’organisation politique simple que je propose vise à ce but de sorte que cette disposition de l’humain voit sa nocivité diminuée notablement. Mais c’est surtout lui qui doit trouver des solutions pour qu’il se rende des comptes sur cette nocivité, devant tous car c’est un problème commun de tous à tous contre tous. En conséquence, y trouver une solution conviendra à tous. L’humain doit pouvoir se donner à ses vices comme à ses vertus sans poser de problèmes de danger général.

La problématique se situe au niveau de l’amour social, de l’affectivité sociale. Cet amour ne se manifeste aujourd’hui que dans les supporters sportifs et les adhérents d'associations : ça donne une mesure de ce dont je parle et de ce qui est ; comme on voit son antithèse dans la xénophobie et les diverses ségrégations, classes politiques, coteries, etc.

Et c’est ici que la correspondance entre l’amour individuel et social, celui qui est socialement donné, se retrouve. L’amour social correspond exactement à l’ensemble, manifesté comme une entité, des possibilités d’amours particuliers. Que l’amour particulier se manifeste « égoïstement » (accaparement de l’affectivité de la progéniture, dédain pour l’autre sexe, pour son propre sexe, mépris de l’enfance, de la femme enceinte, de la parturiente, orientation de l’affectivité de l’enfant vers un but, une fin, une prédestination, l’amour particulier quoi ! comme celui qu’on éprouve pour un chien que vous faites déféquer dans les jardins publiques ou les rues !), l’amour social, la manière dont l’humain, comme manifestation collective de lui-même, manifeste son amour pour lui-même et ses modalités, y correspondra comme une moyenne arithmétique de l’ensemble des amours qui le composent. C’est dire la qualité de l’amour des particuliers, aujourd’hui, dans certaines parties de cette planète ! J’ai bien dit « arithmétique » : le grand amour particulier existe, mais il se diluera dans l’amour social pour ce qui est de sa manifestation sociale, tout comme le scandale amoureux de la torture et de l’assassinat ; et comme dans ce jalon de mesure de la douleur qui s’étale de 1 à 10, il pourra se situer à gauche de l’amour ou à droite de la haine autour du chiffre 5 qui n’est pourtant pas encore de l’amour.

Le plus gravitique problème que doit donc affronter l’humain, est de revivifier l’amour social qui est lui-même relatif à l’amour particulier. Rude tâche. La solution commence par la critique du TRAVAIL puisque c’est ce qui le relie immédiatement à sa propre condition d’animal, d'être existant. L’humain travaille parce qu’il s’ennuie et il ennuie tout le monde, toute la planète avec son satané travail. Il s’ennuie parce qu’il ne sait pas aimer, parce qu’il ne s’aime pas et surtout socialement. Socialement, certains inventent des tâches imbéciles, humiliantes, délirantes que d’autres, beaucoup plus nombreux, pourtant, exécutent bêtement, stupidement, opiniâtrement ; et qui pleurent parce qu’ils n’auraient pas leur part du gâteau qui résulte de LEUR travail ; l’astuce consistant à leur faire penser, que dis-je CROIRE qu’ils ne sont responsables de rien de ce qu’ils réalisent, mais ceux qui les payent qui ne sont responsables de rien, pas même de leur propre maladie sociale qu’ils étalent aux yeux de tous par les moyens modernes de communications, comme à l’époque grecque où l’énergie de la vapeur était utilisée pour hypnotiser le peuple par des cérémonies religieuses et non pour soulager sa tâche car elle aurait supprimé l’esclavage ou au Moyen-Âge où les seigneurs empêchaient les progrès techniques agricoles à seule fin d’éviter que le peuple s’émancipe en refusant sa pauvreté : il suffit toujours pour cela d’accabler ce peuple, détenteur de la plus grande part de l’affectivité sociale, de TRAVAIL en l’assommant d’impôts de toutes sortes, c’est-à-dire en capturant une équivalence sociale à son travail uniquement en raison directe de sa soumission, avec son esclavage affectif très généralement, comme dans la famille, certifié par la peur des coups.

La petitesse d’espace qui est donnée, individuellement, au résultat de sa propre activité, salariée ou non, est la prison monétaire de sa révolte. La « dialectique du maître et de l’esclave » a montré que ce sont les deux pôles de ce couple infernal qui sont malades, chacun l’un de l’autre, en tant que système, que mode de relation affective, sociale. La mesquinerie en est le miroir le plus évident et le plus immédiat, tant dans la relation entre ce maître et cet esclave et inversement, que dans la conception même que l’un demande à l’autre, et inversement, de la Vie, l’usure comme système et comme modalité injectée dès la naissance de ce qui va bientôt exister, dès la conception même de tout. On a saisi que le mot « usure » a deux sens, bien gras : le sens monétaire et le sens mécanique.

En conséquence, le monde doit faire d’abord avec ce qu’il est et non avec ce qu’il voudrait être ; l’idéal est une idée, pas un but. Ainsi, il doit faire avec la paresse, la fainéantise, le vice, tout autant qu’avec la vertu, la générosité, la grandeur d’âme. Les plus disposés à l’entendement se doivent de composer avec ceux qui en ont le moins, non pas pour les exploiter, les avilir ou les écraser, mais pour les sortir de leur crasse : l’intelligence est un moyen, pas une fin, l’affectivité est une fin et un moyen, c’est lorsqu’elle fait défaut qu’elle est la fin de l’intelligence.

L’humain n’a pas le choix d’être bon, sinon il le serait déjà depuis belle lurette ; il ne le sera jamais, il faut donc faire avec et prendre des dispositions pour que ce mal-bon fasse, chez d’autres, le moins de dégâts possibles. Les rêves humains sont trop grands pour la petitesse et la faiblesse de l’énergie affective qu’il met à les réaliser, car plus il est écrasé et plus il rêve et plus ses rêves deviennent grandioses moins il peut les réaliser, et ainsi de suite : son énergie affective s'évapore dans ses rêves. L’humain doit se désabuser quant à sa condition qu’il croit être relative aux cieux où, j’en suis persuadé, on doit vous demander une obole pour uriner dans un endroit ad hoc, comme au Carrousel du Louvre où tant de modernité insiste à coups d’enseignes de lumières, à faire oublier tout simplement que vous vivez, que vous êtes doté d’une vitalité qui a des conséquences immédiates… et monnayable, c’est-à-dire une chose-âme morte hissable au stade des dieux de sa fumée.

Par ailleurs, ses grands rêves sont si ténus qu’il suffit d’un ou deux discours pour les rendre totalement inefficients, sans substance : quand on est encore jeune, une claque; quand on a un peu plus vieilli, quelques gendarmes, un loyer et un emprunt ; plus vieux encore, les enfants dont on doit s’occuper à faire vieillir le plus rapidement possible ; vieux avant l’âge, on n’a plus la force de même s’en souvenir et vieillard, ils restent ce qu’ils ont toujours été : des rêves. Bien sûr, l’humanité évolue, mais ce n’a jamais été qu’indirectement, à cause de ce qui la plombe, l’argent, la modalité de recherche effrénée du profit dont on veut toujours ignorer que, pris ici, il est soustrait là et d’autant que la masse est importante, comme dans les vases à osmose inverse.

L'humanité n'a évolué qu'à cause de la technologie qu’implique la marchandise comme mode de fonctionnement : la classe sociale diffuse qui ne demande qu’à se défaire d’une conséquence pour elle aussi fâcheuse y est passive. Ses rêves doivent être plus terre-à-terre, moins soutenables pour être durables, ce durable dont elle doit cesser de faire l’économie. C'est l'hygiène de l'eau qui est technique, qui a éradiqué les maladies d'une époque ; c'est l'hygiène mentale, affective, qui est relative aux conditions affective de la vie sociale, qui amoindrit la crasse intellectuelle.

Loin d’évoluer directement à cause de son affectivité (qui est encore de l’ordre de Louis Capet dit le quatorzième), l’affectivité de l'humanité évolue indirectement à cause de sa technique : l'humanité n'a pas encore d'emprise directe sur son affectivité sociale. Et le peu qui est entrepris pour améliorer cette « chose » dont parlait Charcot lorsqu’il évoquait l’hystérie à Freud, est si infime, si minime, si dérisoire que cette humanité qui va dans le mur à cause de cet aveuglement, va droit dans ce mur avec un sentiment d’impuissance irrévocable, soutenable et indéniable. Certains pleurent déjà de la catastrophe, à chaudes larmes, d’autres veulent l’ignorer, mais le résultat est le même : on ne fait rien pour changer cette lacune fantastique de l’entendement humain sur lui-même et le monde dans lequel il vit et qu’il détruit à coups de hache, de bulldozer, de parkings à supermarché, de raffineries de pétroles, de pneus dont la gomme s’en va dans les égouts à chaque pluie et des fuites d'huiles de ses individu-mobiles, de pesticides, de poisons, d’usines à poisons, de guerre, de violence à l’enfance, d’ignorance, de petit Jésus sans sexe et de Vierge sans pénétration ni même de tâche de sperme, de coups de matraque, de règles salariales et syndiquées, d’affamement, de bouffe dégueulasse, et j’en passe comme de devoir déshabiller une pomme de sa robe pour ne pas être empoisonné par la pelure de la marchandise. Le résultat est là, devant les yeux, le nez, le goût, les oreilles de tous, mais l’ensemble ne fait rien. L’humain est sans doute bon en tant qu’individu – si si, pour une très grande majorité – , mais en tant qu’ensemble, en tant que collectif, il est impotent. C’est un étrange animal qui se renie en tant que tel, animal, pourvu d’un pouvoir de nuisance incommensurable n’ayant pour limite que la numération inverse de son nombre, et encore ! qui rêve de soumission pour les autres – et fanatiquement pour ses enfants ou son chien qui lui servent d’instruments de mépris – et lorsqu’il ne le peut, de se soumettre au moins pire avec une déférence à la mesure de son hypocrisie, cette crainte de ne pas être ce qu’on ne voudrait pas paraître ne pas être : un pleutre face à cette « chose » que Freud a développé plus tard dans ses essais sur la sexualité enfantine, enfance dont Reich disait qu’on n’y comprenait rien parce qu’on ne comprend rien à la Vie. Et, pourtant, la vie est là, ici et maintenant et partout, comme la vérité.

La politique sera donc ce qui regarde l’humain en tant que collectif et la manière dont il comprend, agit sur et réagit à ce collectif pour qu’il nuise le moins possible à chacun qui est doté de la liberté, dès la naissance, qui, dès sa naissance, est doté de la libre disposition de soi.

Ligne de conduite :

La première règle concerne la DURÉE du mandat politique : un mandat pour une action, une tâche, etc. ne doit durer qu’une année et une seule. On va me dire : « oui, mais un an, ce n’est pas suffisant pour faire quoi que ce soit » : obtus, répondis-je, car ne penses-tu pas que 1 - c'est TOI qui délègue, 2 – pour UN mandat, 3 – que tous tes délégués actuels sont INCAPABLES en CINQ ans de faire quoi que ce soit qui eut pu amélioré ton cas et donc, qu’un mandat de un an n’aura pas plus d’inefficacité qu’un de cinq ou sept ans.

Ces mandats sont des MANDATS, c’est-à-dire des ORDRES du peuple pour effectuer telle ou telle chose, pas des desideratas de particulier. Le contre-pouvoir est là pour constater que ce mandat est correctement exécuté et que seul CE mandat est exécuté. Aux gens donc de discuter du mandat à exécuter : c’est de cette manière et de cette manière seule qu’ils auront le pouvoir sur LEUR vie en prenant les décisions qui les concernent au moment où elles doivent être prises et où elles sont prises en vue d’être réalisées.

La seconde règle : Nul ne peut prendre plus d’une fois le MÊME mandat politique. : il lui est loisible de se charger d’autant de mandats successifs qu’il veut, mais jamais deux fois le même. Non pas qu’il ait pu se montrer incompétent ou non pour l’exécution d’un mandat, mais que nul ne doit devenir spécialiste politique sous peine de massacrer l’organisation sociale, l’humain en tant que collectif, on le sait. Il ne doit plus y avoir de spécialiste politique, la politique doit se diluer dans les gens, dans le peuple. Il serait étonnant que soit élu à un poste quelqu’un de vraiment incompétent : si tel est le cas, le contre-pouvoir a le pouvoir de restreindre, comme son propre mandat l’autorise, la marche du mandaté qui n’exécute pas son mandat, ou le dévie.

Puisque les gens l’ont choisi, c’est le mandaté qui adopte la forme et les moyens de l’exécution de son mandat ; si la tâche se voit devoir être orientée dans une autre direction que celle initialement posée car à l’exécution, comme bien souvent, il se présente une solution plus aisée, il est de la responsabilité du mandaté de la réaliser (une durée de mandat de un an ne peut mener à de grandes catastrophes) selon cette nouvelle forme et ces nouveaux moyens. Le mandaté n’engage pas seulement SA responsabilité, il engage aussi celle de l’humanité et de ses choix.

Chaque différend d’ordre politique est porté devant un Conseil formé de trente trois personnes élues ou tirées au sort qui juge de l’opportunité de porter l’affaire devant tous, sinon il statue. Cette affaire, portée devant tous, est jugée par tous. Les différends d’ordre privé sont réglés par un Conseil formé de trente trois personnes élues ou tirées au sort qui juge de l’opportunité de porter l’affaire devant tous, sinon il statue.

Je peux ajouter d’autres règles, annexes :

- nul ne peut détenir plus d’un logement (un logement comprend ce qui est nécessaire pour être confortablement logé : salle de bain, cuisine, buanderie, cave, deux pièces par personne plus une commune). Chacun est autorisé à avoir son propre logement dès une année et une seule, après sa puberté, à charge de pouvoir l’entretenir dans le cadre de la collectivité. Des logements collectifs sont possibles. Chacun fait ce qu’il veut chez soi, sauf à gêner son entourage.

-  pour ce qui est de la monnaie : le prêt à intérêt est interdit, l’intérêt est aboli : il n’est pas autorisé de faire de l’argent sur de l’argent, de créer de l’argent à partir de l’argent par l’usure sous quelque prétexte qui soit. Nul n’est autorisé à détenir plus de la richesse cumulée que celle des trente trois personnes les plus pauvres (à eux de les enrichir !). L’héritage en numéraire est interdit ; l’héritage en biens est soumis à un Conseil, spécialement élu pour un an, comme les autres Conseils, de sorte que la richesse passée ne s’accumule pas à celle du présent qui doit être toujours suffisante.

- chacun fait de lui-même ce qu’il veut, l’esclavage est aboli, il y a autorisation de production artisanale libre, sans emploi de travail salarié. Le salariat est aboli. Il n’y a pas d’ennemis du peuple à moins que le peuple soit impotent auquel cas, sa soumission le regarde. Il est accordé la liberté de la parole et de presse à tous, sans exception. La liberté de réunion et la liberté d'association est octroyée à tous, sans exception. Une association de personnes ne peut revendiquer de propriété de quelque nature qui soit, seule la Commune peut se dire propriétaire de biens communs, qui appartiennent à tous et dont tous sont responsables. L’État ne possède rien. La rotation des lieux de juridiction permet de régler le problème de l’entretien des bâtiments à usage collectif, comme les lieux de réunion de pays. La police est une organisation des gens pour régler les problèmes, pas en créer : il n’y a donc pas de corps payé pour faire la police. L’enfant ni la femme, ni l’homme ne peuvent être soumis, arrangeons-nous. Les criminels de quelque nature doivent être compris comme des affectivités socialement dérangées.

- la terre : celui qui veut s’occuper d’une exploitation peut revendiquer un droit d’appartenance jusqu’à dix hectares de labour, de prés et/ou de bois, dont il fait ce qu’il veut. Il ne peut avoir de salarié. S’il peut s’occuper de plus de dix hectares, il doit le prouver pour assurer une appartenance, sinon n’importe qui peut revendiquer ce surplus pour l’exploiter soi-même dans cette limite des dix hectares d’occupation totale. Un Conseil de dix personnes nommées pour un an, règle les différends.

- la question de l’argent et de la publicité des mandats. Ceux-ce qui sont riches ? Modérer la richesse : une personne ne peut pas être plus riche que, mettons, dix personnes ensemble prises parmi les plus pauvres, même si ces pauvres le sont volontairement à ne vouloir pas s’activer pour l’obtention des richesses. Le riche est tributaire des pauvres, de toutes les manières, ici cela ne changera rien, sinon que d’en limiter les dégâts.

L’expérience (Asturies, Communes, Kronstadt) montre qu’il n’y a pas nécessité pour les mandatés de recevoir compensation pour leur mandat, ce qui pourrait doubler le sujet de leur possibilité de corruption. Il n’y a de progrès social qu’affectif, la résignation est la résignation de l’affectivité à ne pas vouloir être ce qu’elle est ; point.

mardi, 26 octobre 2010

En faim, le baiser qui tut parle

Outre ses cheveux fins et blonds comme les rayons du soleil, son sourire, les battements éclectiques de son cœur, sa malice et son angoisse féminine, Annie était tout simplement la femme la plus baisable que j’ai rencontrée de ma vie… et qui me le rendait bien ! Elle est aussi grande que moi, blondinette, un agréable visage et sourire, pas grosse, les fesses juste ce qu’il faut pour être très jolie : ni garçonne ni popotin, et ses seins ont grossi assez fortement lors de notre fréquentation. Et c’est là que se pose le problème : la satisfaction sexuée. Car, cette satisfaction et ses conséquences la gênaient beaucoup : de voir ses seins devenir si beaux la dérangeait, de même que de voir son visage s’adoucir, d’avoir envie de laisser pousser ses cheveux, de porter des robes ! et peut-être même des jupes : de devenir un peu plus féminine, en somme.

Je me pose la question souvent de savoir ce qu’une femme a besoin de guérir en moi qui lui fait me fréquenter : il me semble que, pour cette fois-ci, la guérison venait de moi et qu’elle a été refusée pour ses conséquences. Car la féminisation de la femme conduit à plus de féminin encore, c’est-à-dire à devenir amoureuse à cause de ce féminin et non plus seulement à cause d’une idée directrice, si je puis dire, morale. Si Annie a reconnu en moi une part de son « masculin » qu’elle pouvait exprimer, elle a reconnu que ce masculin implique SON féminin pour s’exulter et cela l’a gênée. Je me souviens d’un rendez-vous à la campagne où nous devions passer une semaine ensemble. Je dois préciser qu’elle était mariée mais que son mari ne l’avait pas touchée depuis les deux ans, au moins, précédant notre rencontre… alors qu’ils dormaient dans le même lit. J’ai un peu tiqué, intérieurement, sur ce fait, car, généralement, la disposition d’un tel refus vient de la femme (un homme quitte le lit lorsqu’il ne veut plus de sa compagne) et j’ai trouvé comme un trait de sadisme à se refuser de si près puisque déductivement, son homme, toujours dans ce lit, attendait d’elle son ouverture. Mais enfin… lorsqu’on trouve une telle femme, il est bien difficile de ne lui  pas laisser comme des flous volontairement entretenus pour profiter de ce que l’on a, sur le champ et qui vous donne tant de plaisir partagé. Cette fois-là, donc, à la campagne, Annie a été complètement sèche, tant des lèvres du haut que celles du bas et les baisers impossibles à poser : la culpabilité était si forte de pouvoir prendre tant de liberté sexuelle – aller avec un amant pour profiter de son amour – aussi bien vis-à-vis de son mari que de ses enfants (qui devaient, dans cette tournure d’esprit, prendre un soupçon d'illégitimité) – tout cela lui a été insupportable. La liberté du vivre est insupportable pour la culpabilité.

Et puis, j’avais remarqué que plus nous avions de plaisir au lit (ou ailleurs, comme couple) et plus une forme pernicieuse de distanciation s’opérait. Je l’avais prévenue du fait que l’orgasme, lorsqu’on n’y est pas trop habitué, fait peur, que l’on doit absolument le savoir pour pouvoir remarquer les réponses négatives que l’on peut avoir vis-à-vis de l’amour qu’on éprouve et qui se trouve dégradé pour des raisons ; et par des réactions ambiguës d’acceptation, de pleurs et de dénégation alternativement qui sont le pendant de la bataille qui se mène en vous de l’acceptation pleine de ce que vous vivez de bon, d’adapté à vous et vos besoins, opportun. Mais, quoi qu’on dise, il faut un sacré caractère déjà porté sur le plaisir pour réagir favorablement à de telles recommandations parce que, généralement, suivant les dispositions de cette société vis-à-vis du plaisir (genre ce qu’entend wikipédia de l’orgasme, de l’hétérosexualité, de la pornographie) le départ est faussé, et de loin pour une arrivée plus heureuse. Ainsi, on ne remarque pas qu’on adopte des attitudes sensiblement « hystériques » sur des points de détails qui ont, certes, une base légitime, mais dont on ne perçoit pas immédiatement que l’adoption est négativante, comme un ballon (le détail) trop gonflé qui éclate au moindre contact (le baiser) et vous fait refuser la sensation du don et de sa perception. Attention ! je ne suis pas bête : cet argument ne cache pas mes propres incapacités à donner de l’amour, à comprendre les besoins de mon amante et à m’y adapter ! Il s’agit du laisser-aller confiant, comme un don de soi au plaisir que l’on éprouve et que l’on doit mettre bien plus haut que bien des contingences qui jouxtent souvent des rejets de ce que l’on vit, ici & maintenant, comme quasiment inacceptables du point de vue de la morale que l’on n’oublie pas comme étant celle du sacrifice (dont l’Économie marchande est la démonstration parfaite). D’ailleurs, dans le cadre de cette morale, tant que la femme reste dans ce sacrifice, elle y trouve raison et autorisation de plaisir : cette société ne lui laisse que cette forme de légitimité (mais à la fois, lorsqu’elle regimbe à cette obligation, elle oublie aussi que tous les hommes ne sont pas totalement en faveur d’une telle morale et qu’ils éprouvent, eux aussi, des difficultés à s’y soustraire !).

J’avais, pour moi, rencontré en Annie, LA femme. Il n’est pas aisé de comprendre qu’un homme est un être entier, qu’on a cela parce qu’il est ceci à côté, en bon ou en moins bon et que l’amour vécu relie entre elles ces parties que l’on croyait éparses et que c’est avec grand plaisir que cela se passe. Il en est de même de la femme, bien évidemment, mais avec SA spécificité sociale. Ce n’est que tout dernièrement que j’ai compris pourquoi je l’aime tant et qu’elle me reste tant en mémoire (qui est chez moi physique) : parce que Annie est la femme la plus baisable que j’ai jamais rencontrée de ma vie (ce qui signifie, pour les obtus : celle que je peux le mieux aimer et dont j’éprouve le plus de plaisir à aimer et vivre AVECsi le plaisir est une cause, il est aussi une conséquence) ; et je comprends aussi pourquoi j’en ai tant de nostalgie jusqu’à me dire que cette séparation est une bien grande punition que m’inflige la vie, punition que je ne comprends évidemment pas, mais qui est là quand même. Je ne nie pas que je suis moi-même un peu compliqué et que mes calculs sont assez souvent nébuleux, encore qu’avec Annie, j’ai adopté comme ligne de conduite de toujours peser le bon que j’en recevais, de tout ce que je pouvais trouver de séparateur, et il y en avait : l’un surpassant l’autre, je n’ai eu aucun choix à faire. Je ne peux pas dire que ce genre de sacrifice (ceci contre cela) à l’amour a été trop loin en balance de ce plaisir et qu’en conséquence, il ne tient qu’à moi d’en pâtir, effectivement. Mais je sais aussi que celui-ci qu’elle a fait en pleurant à chaudes larmes de renier le plaisir que nous avions ensemble, sacrifice basé sur le contradictoire de devoir choisir entre une « fidélité » à son mariage (dont elle exclut sa sexualité) et le bonheur d’un homme (illégitime puisque non socialisé) et ce paraître femme débauchée car tant versée sur l’amour dit « physique », en préférant, aujourd’hui encore (ce me semble) vivre seule plutôt que bouleversée, me spolie d’un présent de la vie dont j’aurais pu parfaitement profiter.

Et je vais vous dire pourquoi : quand LA femme en arrive à un tel point de participation à l’acte d’amour qu’importe le moment ou le lieu qu’il en est très généralement réuni de la satisfaction car le commun ne se pose plus comme question mais se manifeste comme certitude, il y est perçu comme une humiliation d’être moralement tombée si BAS ; et c’est faire faute, corrélativement, à ce que son homme perçoit de soi qui ne correspond pas à ce qu'on attendait de si haut et qu'il vous arrive de partager pourtant. Pareillement du rire, de la cuisine, de la beauté des choses ou d’autre ; et qu’à la compréhension que le défaut de satisfaction provient d’un entêtement à dire un muet « Non ! » et de ses conséquences qui vous suspendent à une incompréhension qui vous dépasse, on s’aperçoit tout à coup du LIEN qui vous retient et qui peut facilement devenir une chaîne au bout de laquelle, non pas allégé par une plume, mais balourdisé par un boulet, comme ce muet « Non ! » qui vous oblige à la traîne… on a peur que cela soit. Ce « Non ! » muet n'est que rarement relatif à l'amour des corps ou des âmes, mais toujours à des choses du quotidien : c'est là qu'est le paradoxal : l'attente du désir confronté au besoin, des représentations devant lesquelles on ne sait quoi faire, auxquelles on ne s'attendait pas et qui ne correspondent pas à ce qu'on attendait de soi dans la vie. C’est un manque flagrant de confiance en la vie, en soi, en l’autre (le contexte social y est pour énormément). Et c’est pourtant cette fragilité qui vous a permis cette ouverture à propos de laquelle on ne reste toutefois que sur le seuil.

On retombe alors dans cette faculté du pardon face à la perte irrémédiable, à la façon de la réparation qui vous laisse désappointé souvent, que l’on égare pour ne plus savoir les réaliser et vous donne ce sentiment d’impuissance devant cet amour que vous éprouvez comme un claudiquant… que vous ne voulez plus être par amour-propre. Soupire. Pour moi, tout cela est une erreur, bien sûr, car fondé sur des dispositions relatives à sa position sociale que l'on ne veut pas perdre, alors qu'on ne perd rien, sinon qu'une image, un paraître qui semble, je dis bien semble, d'une importance telle qu'elle vaut toutes les autres pertes ; comme le cinéma 3D n'est que la colorisation de l'ombre.

samedi, 23 octobre 2010

Tract comburant

[j'ai recopié à la main ce tract trouvé sur le toile d'araignée mondiale encore libre]


Le retour de la croissance n'est ni possible ni souhaitable

Puisque nous vivons dans un monde dont les ressources finies ne sauraient soutenir une croissance sans fin et que nous parvenons de plus en plus précisément à envisager le moment où la Terre sera entièrement consumée par notre mode de vie, nous invitons les salariés, chômeurs, précaires, étudiants, retraités à réfléchir à ce que pourrait être une vie pérenne et souhaitable.

En ces temps de désastre écologique très avancé, nous pensons qu'aucune position politique et auc [ou] une revendication qui n'intègre ni le caractère d'impasse du développement économique, ni l'aspect suicidaire de la croissance, ne peuvent avoir la moindre valeur.

Nous sommes donc à la fois fantastiquement utopistes et radicalement pragmatiques, bien plus pragmatiques au fond que tous les gestionnaires "crédibles" du capitalisme et des mouvements sociaux, syndicats de cogestion, partis opportunistes et autre tenants de la croissance comme planche de salut.

Le retour au plein emploi n'est ni réalisable ni désirable

Nous voulons ainsi briser le culte de la création d'emplois et de richesses, réhabilités avec le concours de la gauche dite socialiste dans les années 1980. Aucun discours sur l'exploitation et la précarité n'a de sens et d'efficacité, s'il fait l'économie de la remise en question du travail et d'une interrogation profonde sur la nature de la production.

La perspective du plein-emploi, qui sous-tend la plupart des mots d'ordre et des revendications, n'est ni réaliste ni désirable. En effet, [la matérialité du] le travail humain, en Occident, est supprimée massivement par les machines et les coordinateurs depuis plusieurs dizaines d'années. Il est évident que le capitalisme ne peut plus créer assez d'emplois pour tous. Et ceux qu'il crée encore péniblement sont de plus ne plus vides, déconnectés de nos besoins fondamentaux. De plus, les importants bénéfices [relatifs aux] des gains croissants de productivité, ne profitent toujours qu'à la même classe, pendant que les travailleurs doivent se dévouer encore et craindre pour leur avenir.

Dans ce système, la production matérielle est délocalisée vers les pays dit "en voie de développement", où se concentrent le désastre écologique -- même si nous ne sommes pas en reste… -- et les pires conditions de travail. Dans notre économie de services, fleurissent les emplois de serviteurs : esclaves des cadences robotique, domestiques des "services à la personne", petits soldats du management.

Soyons conséquents, détruisons l'industrie et son monde !

Nous pensons qu'un mouvement social conséquent doit se donner pour but d'aider l'économie à s'effondrer. Le monde actuel ne connaît pas d'en-dehors, on ne peut pas espérer le fuir. Il faut donc y constituer des milieux de vie où émergent de nouveaux rapports humains et où l'on puisse produir ses moyens de subsistance, hors logique capitaliste et sans le concours de la machinerie industrielle.

Il faut dans le même temps entreprendre le démantèlement de pans entiers de l'appareil de production existant, inutiles et nuisibles. Bien sûr, tout cela exige, dans nos discours comme dans nos pratiques, un refus du capitalisme et un rejet de l'Etat et de ses représentants, qui sont et seront toujours des obstacles à nos projets d'autonomie.

Cessons de réclamer un emploi stable et une retraite correcte pour chacun ! Il n'y en aura pas, organisons-nous pour ne plus en avoir besoin !

Que la crise s'aggrave !
Grèves, sabotages, occupations !
Que le capitalisme s'effondre !


Groupe libertaire de Lons et alentours

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[quand les anars commencent à avoir une syntaxe approchable, il y a de l'huile quelque part à ajouter au feu...]

samedi, 16 octobre 2010

Gnoséologie et quadrilectique

Henri Lefebvre a écrit des choses très intéressantes. Je me souviens d’un livre sur la pensée de Karl Marx (Pour connaître la pensée de Marx, Éditions Bordas, Paris, 1948) qu’on ne trouve plus, hélas. Il a aussi écrit un truc sur la cybernétique, très rigolo. Et, page 122 de « Problèmes actuels du marxisme » chez PUF (1958) : … la « gnoséologie » distingue plusieurs lois : celle de l’interaction entre les « choses » et les processus déjà distingués par une analyse concrète ; celle des rapports entre quantité et qualité ; celle du bond qualitatif à un moment donné ; celle enfin des contradictions comme raison du devenir. Il en oublie une, que votre serviteur a proposé : celle de l’hystérésis -- qui complète merveilleusement celle de changement de quantité en qualité et du saut qualitatif : le temps nécessaire pour qu’un état passe de son état à un autre : le moment du saut qualitatif.

Mais ce qui m’intéresse ici, c’est la confusion entre contradictions et devenir. « Les contradictions comme raison du devenir » signifie que pour devenir, le devenir a besoin des contradictions. Or, pour devenir, seul le temps qui ne passe pas l’empêche de ne pas devenir. On parlera plutôt du devenir de la (ou des) contradiction(s), comme raison des contradictions. L’inverse n’est pas juste : le devenir n’a pas besoin des contradictions pour devenir (ni être), sinon que comme prédestination et le devenir n’ayant pour prédestination que lui-même, ce ne peut être une contradiction, sinon que lui, et rien de plus. C’est comme une réflexion qu’on m’a faite hier soir : je disais que mon jardin (associatif) était un endroit d’expérimentation de modes de culture (et de moindre effort, bien évidemment) et on me recommandait d’écouter les idées des autres plus expérimentés et plus conventionnels ; ce à quoi j’ai répondu : « et qui me donneras les idées que j'ai dans la tête... ? » ; à quoi on me dit : « pas besoin puisqu'elles y sont déjà » sans comprendre qu’elles ne sont pas dans la tête des autres et que ces autres ne peuvent donc pas, parce qu’elles n’y apparaissent pas, me proposer celles que j’ai dans ma tête. J’ai réussi tout de même à garder mon jardin encore une année.

Le terme « gnoséologie » me plait beaucoup. La philosophie est l’énoncé d’une perception du monde et elle montre du même mouvement le monde selon une manière de le percevoir. C’est ce qui m’intéresse. L’interrelation entre les choses revient à reconnaître l’interrelation entre ces pensées énoncées et le monde, aussi bien ; donc entre les gens, entre les gens entre eux. Selon ce que pensent les gens de eux, ils le pensent du monde et de ses relations. La philo élargit, ou  tente d’élargir cet entendement. Seulement, le plus souvent, elle n’est qu’une énonciation de ce qui est, de ce que les gens sont et de ce qu’est leur perception du monde. Lorsqu’on découvre une « contradiction » dans la philosophie, on découvre en même temps la contradiction d’un moment du temps humain et de sa perception. Et je trouve amusant qu’on pense que le devenir trouve sa raison dans la contradiction, puisqu’il ne peut qu’être. Ce que veut dire Henri Lefebvre est qu’il est possible, en comprenant les contradictions du présent, de peut-être influencer les conclusions du présent dans l’avenir – ce qui est correct. Le monde du secret est de déni de la sexualité comme réalité ; le secret du monde est la fuite devant la satisfaction sexuée. Dire que les contradictions sont la raison du devenir revient au même : ce qui est empêche le saut qualitatif et il faut le triturer (le devenir) pour qu’il advienne.

Ce n’est pas très clair. Parce qu’on perçoit en soi le désir, il est supposé que sa solution est dans son devenir : c’est faux, enfin… non : c’est juste dans le faux. Le désir est contradictoire : il se formule comme déjà réalisé et il n’est pas ; à la différence du besoin qui demande à ne plus être, à se supprimer. Le désir contient ses propres contradictions : être ET ne pas être encore. Le besoin sait qu’il n’est pas ; le désir refuse de ne pas être. Ainsi, dans la règle du saut qualitatif, le désir ne se réalise pas, tandis que le besoin, oui, et comme satisfaction. Le devenir a donc pour raison les contradictions du présent dans la mesure où son devenir est prédestiné au présent, comme le désir ; mais pas comme le besoin. On va me dire alors que le désir est naturel chez l’humain car humain et le besoin est plus « bestial », si je puis dire, moins « humain ». C’est mal comprendre ce qu’est le besoin, c’est le comprendre comme contradictoire à son devenir : la satisfaction.

En étant moins brutal, je dirais que le désir est l’image d’un besoin, qu’elle serait donc inévitable. J’ai bien des images qui me passent par la tête, de viol, de meurtre, et de choses pires ou presque, sans que j’en veuille manifester une réalisation, car je sais que je n’en aurai pas de satisfaction : j’ai déjà vérifié et plus que vérifié. Je pense qu’il faut être dérangé affectivement, avoir en conséquence des modalités de satisfactions étranges, pour en trouver une dans la maltraitance, l’irrespect, la fin de l’autre ; ou de se mettre dans des circonstances extrêmes évitables. Et c’est là que vient s’immiscer la loi de l’hystérésis : le repu ou la pré-détente. Affirmer que le devenir a besoin de contradictions pour se manifester est donner au désir la place qui revient au besoin qui échappe à son devenir. Et de même qu’on fait fi de la satisfaction sexuée, on fait fi du contenu du besoin, car vil, terre-à-terre, bassement matérialiste : comme l’une est inatteignable, on la pose en image de sorte à ne pas pouvoir l’atteindre, comme ça c’est plus facile : elle reste un désir, une contradiction du besoin : d’une part : j’existe, d’autre part, mais jamais pas encore. Les modalités du repu ou de la pré-détente s’en trouvent fortement influencées : du fait que tout est éloigné en images (en « représentations » disait Guy Debord, un pote à Henri Lefebvre dans sa jeunesse jusqu’à ce que Henri Lefebvre fasse un très mauvais usage d’un texte de l’International situationniste sur la Commune de Paris) le besoin, pour se satisfaire, demande à se contredire, à se nier lui-même comme nécessité et à revendiquer sa réalisation ; et ce mouvement est celui typique du désir à ceci près que le désir peut ne pas être réalisé, que son porteur (pour le dire à la J.-P. Voyer) en soit sans fin le porteur, c’est-à-dire, séparé de son besoin qu’il ne sait plus reconnaître puisqu’il ne le perçoit pas même comme charge.

Or, si je mets mon grain de sel dans la gnoséologie (que j’avais, avant d’en connaître le mot, nommé quadrilectique), ce sera pour dire que le devenir se réalise dans les complémentaires du présent ; et les complémentaires des désirs, bien évidemment (les désirs ne correspondant qu’à des images de devenir) tendent à ne faire appréhender le présent que sous forme d’images : un monde de désir ne comprend rien aux besoins du monde et encore moins au monde des besoins qu'il met en images.

La quadrilectique (qui prend en compte la simultanéité de quatre éléments, comme la gnoséologie, avec la précision de l’hystérésis) se penche sur ce fait toujours mystérieux (encore qu’on en a une bonne approche lorsque l’on y est attentif) du moment déclanchant du saut qualitatif, l’orgasme, et la nature du repu, du repos ; et antérieurement, la nature de la tension et la force de la charge, la pré-détente comme détermination. Ce moment n’est pas contradictoire, il est l’addition de deux entités qui sont complémentaires, jusqu’à n’en faire qu’une qui se divise alors, car SON moment est devenu. Selon la dialectique, antérieurement à leur addition, les deux entités sont contradictoires à leur précédence en vue de donner ce résultat : cette addition qui aboutit à leur fin et à leur renouveau sous une nouvelle forme, synthèse d’une thèse et d’une antithèse : c’est un peu faible puisque ce qui paraît contradictoire dans la dialectique est qu’il faut trouver la contradiction qui sera le moment déclencheur par l’adéquation optimale d’un complémentaire et de sa raison d’être. La raison d’être des complémentaires est le devenir qu’ils vivent au présent.

Néanmoins, on va me faire remarquer que la dialectique est la recherche de l’antithèse, de ce qui empêche le devenir de devenir : là encore il y a prédestination, donc plantage. Le devenir est labile, il se manifeste tel qu’il se manifeste, avec ou sans recherche de solution : il est là au fur et à mesure qu’il se présente. On va insister en disant qu'on rend le devenir plus humain. Certes oui, il est possible de le prédire, de l’anticiper : si je mets du feu sous ma casserole, l’eau va bouillir. Mais selon cette méthode, il ne s’agira toujours que de recherches autour d’une cause et d’un effet ou vice-versa. Il ne s’agit pas encore de transformation en tant que saut qualitatif qui inclut la perception de la charge-décharge et de l’hystérésis. La dialectique ne s’intéresse pas à et ne veut rien connaître de l’énergie. La gnoséologie commence à s’y intéresser. En entrant dans la baignoire de la quadrilectique pour s’y immerger, on commence à prendre son temps. car il ne s’agit que d’addition d’énergies vitales dont la somme comme entité nouvelle se divise. Guy Debord parlait de tension sociale affective… et c’est bien de cela qu’il s’agit.

Parce que ce mouvement de charge-décharge passant par l’addition et se réalisant dans la division, implique obligatoirement une perte quelque part d’un excédentaire – excédentaire qui a provoqué cette addition et qui procure précisément le repu par sa disparition --, autrement dit un retour au don dans le mouvement même du processus de devenir, ce mouvement d’addition et ensuite de division ne plait pas à tout le monde et principalement au monde rigide des affaires. Cet excédentaire est l’objet-même de ce processus et je lui donne nom de « don » car c’est ce qui résulte de son usage où à la fois cet excédant, comme résidu de cette division qualitative, ne peut pas ne pas se trouver. Ainsi, il est don et pas don : l’eau que l’on trouve est-elle un don ? Oui, lorsqu’on a soif, sinon elle est là, tout simplement.

Par exemple, c’est là où ce processus est le plus manifeste, ce qui est nommé la « procréation » avec sa visée spéculative et intéressée de la multiplication, et que l’on comprend comme une re-production de l’espèce, qu’il est le plus malmené : l’amour (addition), le coït (division), la gestation après que se soient additionnées les deux gamètes qui donnent un œuf qui se met alors lui aussi à se diviser, et la gestation (don organique et échange de dons affectifs entre tous) et l’accouchement-allaitement jusque la séparation : tout cela va de guingois et est superbement bien capitalisé, rigidifié, multiplicatif. La quadrilectique permet de comprendre que le monde ne se multiplie pas, il se divise, et cherche à saisir pourquoi on comprend qu’il se multiplie et pour ce faire, qu'on cherche à prix de mort à le multiplier.

mercredi, 13 octobre 2010

Le fi du dé

Putain ! Je ne sais rien faire, je refuse de travailler et je suis seul. Je me meurs. Je ne m'entends avec personne. Putain ! Merde ! Quel géhenne ! Quel raté ! Quelle erreur magistrale je fais ! Qu'est-ce donc que je fais ici ? Vivre tant de douleur ? Mais c'est quoi cette vie ? Pourquoi m'a-t-on fait naître pour ne pas pouvoir vivre autre chose que ce que je vis ? Cela tient-il seulement à moi que de ne pas aimer cette société ? de ne pas aimer ces « relations » sociales faites de bassesses, d'hypocrisie, d'érotisme débile, surtout d'érotisme débile ? Zut ! En fait, ce n'est pas que je ne sache rien faire, c'est faux : je sais faire un large panel de choses, cause à ma curiosité et pas si mal. Mais je ne sais pas m'adapter au salariat, au patron, au sérieux de ce travail de production qui produit que de la m.rde, je ne sais quoi faire avec les autres que nous puissions faire ensemble : j'aime me sentir avec les autres, j'aime ce cocon qui fait que nous soyons nous, que NOUS sommes et pas à faire n'importe quoi pour gagner de l'argent pour gangréner le monde de NOTRE production. Je ne peux faire mienne cette production du monde. J'en entends au-devant de la classe de me dire que je devrais être heureux : j'ai à manger, je suis protégé du froid et des intempéries – par mes propres moyens, bien sûr –, je n'ai pas le fisc aux trousses (et encore !), aucune police ne m'a présentement enfermé pour mes opinions dans une geôle. Ce sont là les conditions minimum du bonheur pour ce devant de parterre qui devraient me satisfaire et qui les satisfont et dans lesquelles ils pataugent. Quelle misère ! Mais qu'attends-je de si mirifique que je ne l'ai pas et qui est si rare en ce monde ? Je ne suis pas drogué, je ne suis pas malade... mais qu'est-ce que j'attends pour être heureux ? Nom de non ? Qu'est-ce qui repousse les autres en moi ? Qu'ai-je de trop ? ou de pas assez ! Un emploi ! Un emploi pour mon coeur ! Je paye cache !

Je suis maudit, je n'arriverai pas à être heureux. Je ne suis pas pourvu du sérieux nécessaire pour prendre ce qui est sérieux dans cette société au sérieux. Pire : ce qui est sérieux pour cette société mérite des rires pour moi ! Je n'ai donc aucune chance de survie amoureuse, car je n'ai pas le même sens du dérisoire qu'elle, un sens de l'important identique, un recul de la futilité diamétralement opposé, on pourrait dire, et de l'indispensable, n'en parlons pas. Lorsque je rencontre une femme, il y a quelque chose qui m'attire et je suis près à payer de moi pour en vivre la réalité. Quelle femme est prête à payer pour voir ma réalité ? Que des emm.rdes, voilà ce à quoi elle s'attend, que du non-bonheur (alors qu'elle vit déjà dans le non-bonheur, la non-implication dans l'autre, l'absence de découverte d'un autre) que des lourdeurs, des adaptations compromettantes ou insipides ou à l'opposé, une demande de satisfaction impossible soit par jeux érotiques ou par situation qui demanderaient de ma part une disposition que je ne peux avoir que très soul – et devant laquelle je ne rechigne pas – à cela près que les lendemains qui peuvent être quelques années plus tard, ne sont pas toujours aussi enchanteurs. Et puis les filles se lassent, on ne les sent pas aussi disposées au renouvellement du présent que plutôt d'en sortir de l'ornière pour aller voir ailleurs. Bon, je ne dis pas que je ne me suis pas vu, de mon côté, obligé de rompre, mais il y a eu une ou deux fois où j'étais vraiment amoureux sans être compris et c'est assez douloureux... et long. Bref, j'ai souvent payé de ma personne pour savoir qui j'avais envie de rencontrer ; aujourd'hui, il faut de la certitude : l'aventure c'est d'la daube ! que des ennuis et des embrouilles et si le mec l'est pas content qu'on n'en veuille p'us, il devient méchant, hargneux ou teigneux et même violent : pourquoi donc s'insérer dans une galère imprévisible ?!?

C'est dans cette condition d'isolement (c'est de contact qu'il s'agit : une simple couche d'air suffit pour vous montrer de l'indifférence ambigüe) que je me trouve à me morfondre le moral qui remâche ses semelles usées par tant de marche solitaire. Si le temps qui passe s'y met, vous avez beau vous lancer dans l'espace comme un dé à la recherche de son nombre, son fi vous tempère comme une balle qui va courir s'enfourrager dans les eaux cagneuses de l'étang du perdu où des feux s'escament comme autant d'espoirs rendus nauséabonds d'immobile en flammèches démontrant qu'ils furent et puis s'en va.

jeudi, 07 octobre 2010

Fin du progrès des choses !

Le progrès des choses a suffisamment progressé, nous devons impérativement et très rapidement nous occuper, aujourd'hui, du progrès des gens (j'ai commencé à en entamer une liste, mais je me dis que, justement, ce n'est pas à moi d'en proposer une, mais aux gens de savoir ce qu'ils vont enfin faire de eux qui soit un peu différent de ce progrès manifesté dans les choses : au mieux, le meilleur des progrès serait qu'ils cessent d'être des choses ; il faut commencer par en percevoir la réalité, sa réalité. Seulement, les connaissant, je suis sûr qu'ils vont tout faire pour éviter ce qui les fâchent, leur demande un peu de courage, de détermination et qui fait que nous soyons dans cette situation où le travail est toujours obligatoire, ou le gain est recherché obstinément et par l'effort et par l'abnégation et/ou le sacrifice de soi ou des autres, l'esprit séparé de l'amour – la naissance de la mécanique « pure » –, l'amour séparé des coeurs ou mystique, l'irrespect de l'enfance – petite, moyenne et grande –, leur irresponsabilisation quasi-volontaire vis-à-vis des produits de leur activité, du fait qu'ils vivent ici et maintenant, leur attraction pour et la satisfaction qu'ils en retirent, des « choses » issus de leur imagination – dans le mot « imagination », il y a le mot « image » qui lui-même contient le mot « mage » – pour ce que j'en vois dans l’immédiat, mais je ne suis pas seul et je radote, aussi... je ne ferme pas cette parenthèse...

vendredi, 01 octobre 2010

Les messes qui ne rient s'tournent niaises et l'étalent

S'il y a bien quelque chose, plus qu'une chose ! une attitude face à la vie, un comportement, une cuirasse caractérielle, une conception et une praxis de la vie qui domine ce monde, c'est bien la mesquinerie. On la trouve partout, partout, partout. Ses prétextes sont multiples à la mesure excédentaire de ses résolutions, solutions, résultats et c'est ce qui la fait se reproduire. En fait, je sais très bien qu'elle n'a pas de solution à très cours ou cours terme : son ancrage dans les âmes se manifeste en tout lieu, tout temps, toute fonction, et jusque dans ce logiciel qui me sert à écrire ces lignes et qui est pourtant « gratuit » et qui, sous ce prétexte de « liberté », vous impose ceci ou cela, car cette mesquinerie obnibulant la tête de ses programmateurs, leur fait ne laisser aucune place de liberté à l'autre et donc, trouve incidemment à l'obliger à quelque acte dont il ne peut se départir.

C'est par erreur que ce monde est généreux et pour en profiter il faut être soi-même une erreur de ce monde, encore que, un film comme « Brasil » tente de montrer que de telles erreurs peuvent être pirement fatales pour les hasards de l'amour et pour cette liberté dont je parlais il y a un instant, à qui il ne reste plus d'être vécue que dans la folie. La majeure partie des déboires que subit l'humanité est due à la mesquinerie de chacun ou presque de ses membres qui y opère et y laisse sa trace, de la plus insignifiante à la plus importante, si tant il y en est, vu l'égale « importance » de tous dans ce vaste système. Et si la mesquinerie s’estompe parfois ici ou là, c'est par perfectionnement, car la générosité n'est pas dans la conception des choses produites par ce système social, mais qu'il se rétablit, par revirement d'un excès de cette mesquinerie, en revoyant ce qui l'empêche de pas trop mal fonctionner. Les choses s'améliorent, le sens des mots y participe mais par une orientation vers une perfection qui n'est qu'une des faces les plus cachées de la mesquinerie. La perfection n'est pas un plus pour l'humanité, est elle un moins pire, et encore ! Car très généralement, cette perfection est un pire dont on se passerait parfaitement bien.

D'ailleurs, que vous n'ayez pas la mesquinerie de penser que je tente de ne pas penser mesquinement, c'est gentil. Mais je suis moi-même mesquin, pas toujours mais trop s'en faut. C'est ce qui me perd avec mes amours, notamment ce qui m'a perdu avec Annie.

A-t-on caressé que la relation à Dieu ou aux dieux de l'humain est de cette forme ? On peut dire du Christ que, comme Fils de dieu et Dieu lui-même, sa mise à mort, fut-elle postérieurement imaginaire, est un avilissement de son dieu par l'humain : sa générosité est telle qu'elle ne peut supporter pour le salut de son âme que son dieu soit PLUS généreux qu'elle. Ce n'est qu'à la constatation du contexte historique – qui n'a plus lieu d'être plus tard – que l'on suppose que dans cette démarche de ressuscitation, l’humanité ait fait preuve de moins de mesquinerie car auparavant ce dieu était encore plus radin, espiègle même. La mesquinerie humaine est telle qu'elle doit amoindrir de ses pouvoirs-attributions-idéalisations-etc. tout ce qu'est pour elle un dieu et cela, après avoir attribué à ce dieu toutes ces bonnes choses, à postériori de sa « générosité ». Qu'elle ait ressuscité son dieu après l'avoir tué le souligne d'autant plus. Pour les mahométans, que dieu s'adresse à des hommes montre encore son avilissement : comme si un dieu avait à s'adresser à un ou deux hommes en particulier. Que dieu s'adresse aux hommes (je dis bien « hommes » et pas « femmes » : dieu a beau s’avilir, mais quand même...) c'est le corrompre du pécher que ce dieu est sensé montrer, c'est Le salir, c'est un rapetissement de ce qu'Il est, Son rabougrissement à l'état d'homme, réduire Sa grandeur à celle de l'homme qui a ainsi la possibilité de pouvoir Le piétiner. Le leurre est d'admettre que l'« appel de dieu » est une forme de courage alors qu'il est la manifestation d'une lâcheté de la part de la personne qui se dit en être le récipiendaire, c'est une lâcheté devant la sexuation et ses responsabilités dont il a dit de ce dieu qu'Il n'a qu'une forme comportementale : la négation sans compromis. L'appel de dieu est un tripatouillage qui permet de se sortir du problème de l'amour entre humains sans l'aborder, en le noyant dans la boue de ses propres rétentions, de sa mesquinerie et en le moralisant de sorte à justifier cette mesquinerie : il existe dans cette morale, bien distinctement, le cul, le coeur, l'esprit et l'Autre, chacun dans une case bien à lui, avec sa propre scolastique, ses propres circonvolutions tautologiques, à la rigueur pouvant fricoter avec le contenu de la case d'à côté, mais guère plus loin, car dans ce système, tout est plat, en deux dimensions et rien de spacieux, en trois dimensions qui redonneraient à ce quadriptique la consistance et l'aisance de se mouvoir qui lui convient.

On retrouve encore de la mesquinerie dans la dialectique : la mise en opposition extrême de deux éléments issus d'un seul, de sorte à les confronter afin qu'ils fusionnent ensuite pour donner un nouvel élément neuf. Le bien & le mal, le chaud et le froid, le mâle et le femelle, tout est en opposition, rien n'est complémentaire, c'est-à-dire que les seuls éléments qui joignent ces deux extrêmes sont le fil FUTUR de leur anéantissement, pas leur présent. Il n'y a pas d'étages, de gradation entre ces deux extrêmes, car c'est précisément leur opposition qui forme leur être destiné à se supprimer dans une forme « supérieure ». Je ne dis pas qu'il n'est pas possible de procéder ainsi, que les PURES oppositions n'existent pas en ESPRIT, qu'elles ne sont pas des Idéals qu'il faille trouver dans la réalité vivante ; je dis que cette manière de faire est mesquine est ceci qu'elle ne voit en rien ce qui complait la vie, la complète = être plus car avec. Je ne dis pas non plus que le Bien et le Mal n'existe pas : je sais quand j'ai Bien et je sais aussi quand j'ai Mal et je ne dis pas qu'il faut se dispenser de faire avec, puisque nous sommes humain : ne soyons pas si mesquins. Je dis que cette opposition n'a de construction qu’ailleurs de l'ici & maintenant et ne permet la résolution du problème posé que dans cette opposition de PURES IDÉALITÉS.

Je démontre très aisément qu'entre le chaud et le froid se situe le tiède ; pour autant, du fait que je ne trouve rien entre le mâle et la femelle, il n'existerait pas de milieu qui joigne ces deux extrémités de la vie ? Ne serait-ce pas plutôt le système que manie ma pensée qui faillirait dans sa compréhension du monde en ne trouvant point de point milieu entre l'homme et la femme qui me fait certifier que ce sont là deux extrêmes de la vie en opposition ? C'est mesquin. D'ailleurs (ça y est : je cause comme un philosophe !), d'ailleurs, dis-je, cela ne plait pas à tout le monde, et l'on en vient à affirmer qu'il y a une part de féminin chez le masculin et inversement. Là encore c'est mesquin, c'est vouloir scissionner les deux sexes : c'est sur un tronc commun formé d'un nombre d'os et d'organes semblables, mêmes ceux qui caractérisent le sexe, que sont formés les corps et vient se spécifier un sexe. C'est la sexuation qui fonde le monde et elle se distingue en deux sexes qui ne sont pas des oppositions. Le simple fait d'être pourvu d'un des deux sexes ne signifie pas que je sois différent de l'autre, mais que je suis détenteur d'une spécificité sexuée. C'est une curiosité qui cherche à se satisfaire que de chercher dans et où se situent les spécificités sexuelles et de quelles manières elles se manifestent corporellement pour en justifier, éventuellement, un comportement social dérivé d'un comportement lié à la sexualité, une manière de faire avec ce que l'on a de ce que l'on est. Quel malheur de voir tant de filles et tant de garçons si distants de ce qu'ils/elles sont ! Que peuvent elles/ils faire de ce qu'ils ont ? Un peu moins de mesquinerie, de chipoterie dans la compréhension de la sexuation règlerait CE problème de la mesquinerie.

C'est pourtant simple : la sexuation est le fait d'être pourvu d'un des deux sexes où le féminin se distingue en ce qu'il assure le résultat de la fusion des deux gamètes dont elle détient pour part la moitié et le masculin en son apport pour part de l'autre moitié à cette fusion ; les modalités ressortent de ce que nous nommons « sexualité ». Dans le règne animal, se distinguent les ceux-ce dont la sexualité est liée au rut et les autres, dont nous faisons partie, où le plaisir se situe plus précisément dans l'usage de la sexuation ; la reproduction ne relevant plus que de la relation sociale des impétrants. Rien ici n'autorise le viol ni du fonds ni de la forme.

Car la mesquinerie a une raison, au sens mathématique comme au sens morale qu'au sens de principe pensant. Le fait de ne pas pouvoir penser plus généreusement, de ne pas pouvoir laisser la liberté se manifester dans le général et de s'y retrouver, où elle – cette liberté – se retrouve, a une raison qui se dissimule derrière sa rigidité. Je vais donner un exemple. Certains pensent qu'il ne faut pas chercher à spécifier les sexes car cela les réduira à des comportements rigidifiés (ce qui donne exactement le contraire de ce qu'ils escomptent, idéalement, et assurent ce qu'ils veulent pratiquement : la séparation des sexes) ; c'est oublier que la multitude implique une multitude des formes, donc de variétés : un pommier va vous donner un million de fleurs odorantes et pourtant elles seront toutes différentes les unes des autres et chacune ne va pas recevoir la même abeille (s'il en reste) de la même manière au même moment. La peur de variance fige et la raison de cette fixation de l'émotion soulevée par la variance se situe dans cette peur de ne pas être partie de cette variance qui englobe tout de son universalité. Du point de vue moral, la variance n'implique pas – selon moi – le Mal, mais selon la morale de ces invariants, le Mal est la variance. Typique de la cuirasse caractérielle.

Le salariat, le biberon précoce, le nucléaire, la dispendieuse dépense d'énergie de la société humaine, la thésaurisation immatérielle d'équivalences attribuées au résultat de l'activité humaine et la gestion de cette immatérialité, la méthode facebook qui consiste à récupérer sans votre assentiment les adresses courrielles situées sur le serveur de votre boîte aux lettres pour s'en servir et faire croire à vos correspondants, sans votre assentiment, que vous les invitez à les joindre sur leur page d’accueil alors qu'il faut impérativement que vous y créiez la vôtre, la retenue des enfants assis pendant des heures durant sur les bancs des écoles, cette bataille de surface autour du partage des fichiers commerciaux sur l'Internet, l'esprit militaire ou religieux, la politique et le politicien, le Juge pour ceci ou cela, celui qui protège ses ouvrages comme celui qui les pirate, l'un parce qu'il a peur de perdre le fruit de ses entrailles cérébrales, l'autre parce qu'il ne respecte pas autrui en détruisant l'âme de son créateur pour ne pas le vouloir reconnaître, le tarissement de l'eau comme celui de la terre arabe ou leur pourrissement par des produits composés chimiquement issus d'esprits mercantiles qui donnent du travail à d'autres qui l'exécutent poussés par le dénuement véritable ou sollicité, l'usure préprogrammée de tout ce qui est vendu, vouloir échapper aux réponses cohérentes demandées par le questionnement de l'enfance, l'épuisement de la terre autour de tout ce qui en est retiré en minéraux de toutes sortes, déjà aux temps préhistoriques sans le discernement, l’empuantissement de l'air si généreux pourtant qu'il emplit sans faillir un jour, une nuit, tous les poumons qu'on n'étouffe pas par la peur ou les coups ou la noyade, et nourrit les plantes qui vous nourrissent ensuite, le travail, tout, la CRÉATION du MANQUE bien loin de le résoudre, sinon qu'en image, et encore ! est le sujet du monde. Et je craints fort que ce soit là une des caractéristiques spécifiques de l'être qui se nomme humain, qui induit toutes les autres !

Hé oui, cette mouture du Verbe torréfié à la chaleur de la bienveillance pour le passer au percolateur des idées déçues afin d'en extraire une déliquescente amertume adoucie du sucre de l'espoir non raffiné, ne nous donnera aucune solution qui nous sorte de cette impasse de nous-mêmes ; hé oui, je ne peux dire qu'hélas ! Ce n'est pas pour autant que ce moteur du sujet du monde doit se voir dispenser de discussion à laquelle je contribue de ce moulage du même Verbe en bandelettes sur les formes rodomontrices de la langue de bois pour l'agrémenter par dissimulation, de mes couleurs, aujourd'hui.

 

mercredi, 22 septembre 2010

L'aveugle point du lisse

Bien des idées passent et s’évadent dans les éthers, comme des âmes perdues se dissolvent sans plus qu’une trace, pas même une odeur ou une couleur camaïeuse se distingue dans l’azur, subsiste. Lorsque rien ne les renouvelle, comme un air frais que respire la cervelle, une pluie qui abreuve celles qui y sont restées, les bras vous en tombent. Et lorsque les zébrures de l’éclair rageur ne sillonnent plus l’équilibre des cieux et des terres, rien ne les retient plus et elles s’évaporent comme l’eau des flaques au soleil ou sont bues par le temps comme le lapement du chat le lait.

Le vécu antécédent y est pour beaucoup, dans son foisonnement qui se presse à la mesure des asticots sur le rai du présent fermentant, et se bouscule sans pouvoir s’ordonner des tours ou des mots de passage, des distributions et des catégories pouvant en rendre le tri plus facile. Mais trier pour quoi ? puisque que cette fatigue qui vous donne tant de mal à la retenue du folâtre des pensées ne vous permet plus d’y porter votre intérêt ! On met en ordre pour le plaisir de l’autre, pour rendre agréable un énoncé dans lequel il se doit d’y pouvoir être distingué une trame ou un fils, un tissu bariolé dont l’ensemble forme un dessin par l’entrelacs des traits qui s’étalent devant vous et qui aiguise une curiosité dans les surfaces laissées à la vue intérieure à l’aune du déroulement du dessein.

Dans les pires moments de l’adolescence, certains ont reçu comme punition de devoir décrire une boule de billard blanche sur quatre pages sans parler de sa forme ni de sa couleur ; il n’y a pas pire moment que de se retrancher dans la description d’une âme vide pour tenter de lui redonner du plein. L’écriture remplit, mais à une telle lenteur qu’elle laisse à la traîne toute une kyrielle de pas informulés, à la cadence hachée de l’énoncé hésitant du fait qu’il faille extraire du fond du puits profond de ce qui veut perdurer à être, la torture de la formulation. C’est qu’on se trouve, comme devant cette boule blanche, ronde ou sphérique, qui se tourne autour de soi-même sans qu’on en perçoive un seul mouvement sinon que linéaire, au devant de ne rien avoir à dire que sa solitude affective, face au froid du glissant et de l’insaisissable, le geste maladroit où vous trouez le tapis qui vous le rend en croche-pied, une trébuche qu’aucun geste des bras vous fait rattraper et qui vous étale dans votre fatigue, encore, de vous relever. Pour peu que le sol soit jonché des gravillons des arguties et votre peine s’augmente des déchirures périphériques dont la poisse sanguine englue mieux dans le marasme des écorchures de l’âme.

Parler du vide comme de la surface lisse de l’imitation de l’ivoire, verra pour une part sa pénibilité s’évanouir dans la publication qui en sera tout à l’heure faite : communiquer est correspondre, même dans le vide de la toile et donne le sentiment peu éloigné de la sensation d’exister en un endroit situé là où quelqu’un vous lit, sans savoir ni le lieu, ni l’heure de cette situation. Ecrire coûte, surtout quand on en arrache des lambeaux de plaisir de l’outil de la satisfaction par gestes brusques, saccadés, à la manière de la mauvaise humeur où vous noient vos réprobations devenues quasi-sempiternelles devant ce sort terrible qui vous reflète votre impuissance d’un sourire déploré ne signifiant rien d’autre que cette débilité : des chaînes si étroites qu’elles vous scient les chairs du ressenti et si solides qu’on s’y sent suspendu, les membres cordiaux enceints dans ses tours resserrés par le poids de cette âme que vous supportez seul et le bout aussi fin que le cheveu de la déesse de l’amour que vous tenez entre l’index et le pouce et dont la présence est si faible qu’il ne reste que la sensation qu’il va vous échapper sans aucune certitude de sa réalité toujours.

La force de telles illusions indésirées, contrebalancée par le simple fait que la vie tient à vivre, étire le fil et, vous le savez, qu’elle perdure et cela va rompre. On chutera inévitablement en arrière avec un gouffre sous les fesses pour ne plus vous retenir et la vie s’en ira dans cet effondrement de vous là où plus rien ne vous reconnaîtra, où plus rien ne discernera qui vous êtes, plus même vous. Quoi faire ? Ne tient-il qu’à vous seul d’être seul ? Lorsque la boule de billard s’est tournée, pouvez-vous toujours situer son ancien point de repos ?

Pour autant, cet amer qui nage dans votre bouche déteint sur l’ensemble de votre vécu et les distractions que vous vous accordiez pour le plaisir issu d’une petite communauté qu’elles vous apportaient, vous lassent, elles aussi, pour vous enfoncer plus dans ce fouillis désertique. L’isolement se renforce et renforce davantage le sentiment d’impuissance devant les petites misères de la vie quotidienne à qui vous ne pouvez à personne parler pour les diluer dans le temps. Cette page-ci, n’y suffit pas, car personne ne veut lire que le briquet est cassé, que l’adsl fonctionne mal, qu’on a de plus en plus froid aux pieds et aux bouts des doigts et que l’appétit ne vous donne plus l’imagination culinaire à laquelle vous êtes coutumier et qui vous faisait passer le temps du dîner moins dépourvu de nouveauté. C’est pourtant de vie quotidienne dont vous manquez, de partage d’affects, d’effets, de reflets. Le lisse lisse tout faute d’aspérités.

C’est sans secours, on ne peut pas se demander, à soi, du secours, car c’est le manque de l’autre qui vous fait défaut ; cela ne tient qu’à l’autre que vous ne soyez plus seul. Cela tient à vous, bien sûr, mais moitié à l’autre, aussi. C’est-à-dire que vous ne voyez pas où vous pourriez vous porter secours : d’abord les forces commencent sérieusement à vous manquer, ensuite vous ne voyez pas comment vous pourriez vous changer pour rencontrer l’autre. Et quel autre ? Il est où qui vous satisfasse ? En quoi ? On le sait : le bonheur de l’amour est composé du trépied du corps, du cœur et de l’esprit. On sait que cela intéresse encore… mais comment ? Et où ? Dites-le moi ! J’y cours ! même en claudiquant. Quel extrême que de penser que le secours que vous implorez s’enfuira dans la rencontre de l’autre !

vendredi, 17 septembre 2010

Éloge du chiotte à compost

On fait souvent usage des mots « toilettes sèches » pour insister sur le non-usage de l’eau dans l’évacuation des excréments par le tout-à-l’égout, à la place de ceux de « toilettes à compost » qui, eux, sous-entendent la participation à un cycle, la transformation de ces déchets sans l’usage de l’eau, certes, mais principalement avec celui du temps qui passe qui, lui, est le summum de la gratuité et agrémenté d’un ensemble de dispositions qui favorise cet usage. Dire qu’il n’est pas utilisé d’eau dans les « toilettes à compost » est beaucoup plus impliquant que de ne seulement pas utiliser d’eau comme dans les toilettes dites « sèches » : c’est une manière de penser la gestion de l’ensemble des déchets et ceux que vous produisez vous-même, chaque jour du simple fait de vivre. La séparation des « eaux grises » (eaux de lavages essentiellement) de manière à supprimer les « eaux noires » (eaux souillées par les excréments) est un ENTENDEMENT du monde.

Il est évident que les consortiums de l’eau ont tout intérêt à empêcher que cet entendement, cette compréhension des possibles, ne se fasse pas, car c’est leur gagne-pognon. Pourtant des immeubles sont déjà équipés de toilettes "sèches" et la gestion de leur compostage ne présente pas de difficulté ; et individuellement, ce n’est qu’une question d’organisation, au mieux, collective.

L’humanité aura bien changé en bien le jour où il y aura un ramassage municipal des sacs des toilettes à compost. Il s’agit de comprendre que la pollution de l’eau qui ne se pas fera de cette manière, mènera à comprendre qu’une autre pollution, l’industrielle, est étrange par sa balourdise et son obstination, car l’effort qui sera fait par les gens pour protéger, par les toilettes à compost, LEUR usage de l’eau, ne sera plus aussi tolérant pour ce qui est des autres manières de polluer l’eau, ce sang de la terre.

Faire la « promotion » des toilettes à compost n’est pas un truc de bobo ou de baba, c’est LA solution qui englobe une multitude d’autres résolutions qui mettront fin à l'emploi qui est fait des excréments par les firmes de dépollution de l’eau à usage ménager afin de gagner de l’argent lorsqu’ils favorisent la pollution des eaux par celles, noires, des WC... jusqu’aux résidus des médicaments qui servent à vous « guérir » des maladies engendrées par cette société. Il y a un lobbying contre les toilettes à compost qui fait passer des lois par nos chers délégués, nos députés parle-et-menteurs, qui en réfrènent l’expansion.

C’est parce que, dans ce contexte social, compréhension bien étrange et ambiguë est faite avec les organes génitaux, à la sexualité, que nos déchets corporels doivent cesser de rester anodins, ignorés, comme on veut cacher les fonctions liées à la sexuation (le fait d’être doté d’un des deux sexes) et incidemment la pollution générale qui inonde tout ici. Car c’est sans doute dans cette étrange et ambiguë relation entre les excréments et la sexualité, la confusion entre un organe sexuel et une fonction excrétrice que l’affaire achoppe et que réside cette résistance à tant de simplicité. L’usage des toilettes à compost facile cette discrimination qui, par conséquent, discriminera davantage leur différence et leurs spécificités et consécutivement ce qu’il faut faire et ne pas faire en matière de « pollution ».

J’insiste sur le mot « compost » vu que, à la différence du mot « sèches », il montre mieux ce que deviennent nos excréments : des éléments d’un recyclage, une intégration des déchets humains dans le cours du temps et son usage, ce que ne montre pas le mot « sèches » qui conserve encore un aspect séparé, donc séparable de ses propres productions. D’autant que, pratiquement, les toilettes sèches demanderaient une disposition qui sépare les urines des fèces qu’un particulier n’est pas toujours à même, dans un premier temps, de faire. On ignore souvent que les urines sont stériles, chez la personne saine ; elles peuvent contenir des résidus de médicamentation, comme les fèces, mais elles sont stériles à moins de provenir d’un être très malade. Elles peuvent donc, elles aussi, être considérées comme des eaux de lavage, des « eaux grises ». Un dispositif dans la cuvette des WC peut faire cette séparation. Mais si on utilise un seau qui réceptionne aussi les urines, ces toilettes ne sont plus sèches du tout. D’un point de vue plus collectif, le seau est protégé par un sac à compost (c’est-à-dire, lui-même compostable) d’une trentaine de litres que l’on referme à peine plein et place dans un dispositif ad hoc, et il est ramassé par des municipaux selon des critères hygiéniques correspondant et sans gêne pour eux.

Le principe des toilettes à compost est simple : les matières fécales sont composées principalement d’azote qui empêchent leur décomposition rapide. En y adjoignant une matière carbonée (« on recouvre ses déchets de sorte à ce que l’usager à venir n’en soit pas importuné ») tels que sciure ou copeaux de bois, feuilles sèches ou broyat de paille, la décomposition des matières azotées qui donne cette odeur si particulière, est stoppée et commence aussitôt une décomposition de type compost. Cette décomposition, suivant qu’on retourne ou non le fumier qui perd vite ses aspects repoussants, tous les trois à quatre mois environ, demande un temps de compostage de deux ans, maximum ; au mieux il demande, avec des soins, six mois. De sorte que l’on peut confectionner deux réceptacles de un mètre cube qui seront alternativement utilisés tous les deux ans et le terreau servira pour les jardins. Ce procédé est, bien évidemment, industrialisable par une accélération du processus, l’usage de la lombri-culture, etc. à l’échelle communale. L’hygiène liée au procédé est connue et sûre. Les résidus médicamenteux eux-mêmes disparaissent dans le processus de compostage.

La différence de traitement des eaux grises des eaux noires est considérable. Les eaux noires (la chasse d’eau des affaires) qui contiennent les excréments humains sont réellement pathogènes, nocives et délétères, mais seulement parce qu’elles contiennent ces excréments. Dès lors que les eaux domestiques sont exemptes de matières fécales, elles peuvent être considérablement mieux traitées par lagunage, sans aucun problème, qui est moins coûteux en énergie (c’est le soleil et les plantes qui travaillent pour nous). C’est une des raisons pour lesquelles les consortiums de traitement des eaux veulent conserver le tout-à-l’égout actuel qui ne fait pas cette discrimination, car c’est dans ces « eaux noires » qu’ils trouvent leur légitimité ; et la propagande qui va avec.

C’est donc l’approche que l’on a des déchets en général et de ceux qui vous sont les plus intimes et dont vous voulez vous débarrasser au plus vite (vade retro, satanas !) qui résoudra un des aspects les plus immédiats de la pollution et, pouvant déteindre sur une compréhension plus générale de la pollution générée par cette société qui n’a que faire de ses déchets, sinon, encore le même déchet, dès lors qu’elle y trouve son compte, l’argent qui est, lui, incompostable, ces toilettes à compost permettront de saisir une autre organisation sociale qui saura générer moins de travail pour moins de déchets !

Note d'avril 2017 : la difficulté, en ville, est de trouver de la sciure ou autre matière carbonée de bonne qualité. J'ai remarqué qu'en utilisant du pellet de bois (ou granulé de bois) légèrement humidifié et auquel on a jeté une dizaine de gouttes d'huile essentielle de cèdre ou autre résineux, fait très bien l'affaire, car la cohésion de ce granulé tient sur sa déshydratation. Un sac de 15 kg (4 €) doit pouvoir tenir un couple de mois...

mercredi, 15 septembre 2010

Le remue-lemming

Je me souviens de la première fois où j’ai comme douté de la manière de penser de cette société alors que je lisais un article sur les lemmings : ces petites bêtes se « suicideraient » lorsqu’elles « se » savent en surnombre. Que j’ai trouvé cela étrange ! C’est étrange que des bêtes, pleines de vie, faites pour la vie, vivantes, « se » suicident. Et puis j’ai constaté que c’est lors (c’est dans l’article) d’une transhumance qu’elles veulent traverser un détroit et qu’elles s’y noient. Autrement dit, du fait de ce surnombre indiscutable, le besoin d’aller voir ailleurs leur fait traverser un détroit où elles pensent, estiment, subodorent trouver de quoi satisfaire ce surnombre. En conséquence, elles ont déjà l’habitude de traverser des cours d’eau ou des étendues d’eau et que le désir d’alors, leur fait entamer une traversée qui leur sera fatale, à celles qui s’y engagent. Celles qui restent, voyant leur nombre diminuer, peuvent penser qu’il ne leur est plus nécessaire d’entamer cette traversée. Aussi, je me suis mis à penser, moi, qu’elles ne se suicident pas, mais vont sur des chemins qui s’avèrent mortels pour elles, ce qui n’est pas du tout pareil.

Dans de tels cas, je remonte l’histoire à l’envers : pourquoi donc, veut-on absolument penser que le suicide est possible chez le vivant ? puisque c’est de cela qu’il s’agit, comme d’une fatalité humanisée, devant laquelle il ne resterait qu’à baisser les bras, à la subir, à s’y soumettre. Je suis simplet, je veux bien, mais là, ça fait beaucoup à avaler, comme grosse couleuvre : il faudrait se résigner à un fait dont on est, soi, responsable ?

On veut faire penser que le surnombre doit faire l’objet de sacrifice. Premièrement : pourquoi ce surnombre, chez nous, les humains, nous qui sommes sensés être sensés ? Et secondement, pourquoi un tel surnombre chez d’autres mammifères ou autres animaux ? Cela fait parti du cours de leur vie : l’abondance dont profite une génération qui se reproduit alors en fonction de ce qui lui est proposé, ne convient pas obligatoirement à la génération suivante, car cette abondance n’est plus si abondante en raison de ce nombre supérieur, soit de ce nombre même soit de la moindre abondance. Ce que je veux dire est : penser que nous sommes des animaux qui ne savent que profiter du moment de l’abondance du moment sans penser au lendemain, ne laisse dubitatif quant à notre maîtrise de CETTE abondance dont nous pourvoit la vie. De fait, si l’humain établit un équilibre entre son TRAVAIL et les FRUITS de ce travail de sorte à ne pas se reproduire en fonction de l’abondance que ce travail apporte ici et maintenant, il devrait être à même de ne jamais manquer de rien, ou de très peu. La question subsidiaire devient donc : mais c’est quoi cette misère ? Ne serait-ce pas cette manière d’interpréter le monde de sorte à penser que les lemmings « se » suicident dès lors qu’ils « se » sentiraient en surnombre ?

Et puis cela sous-entend surtout qu’une partie d’une population doit se sacrifier pour la survie de l’autre ; quant au choix qui doit être fait des uns et des autres, certains seront de toutes évidences plus égaux que d’autres. Ainsi, en résolvant l’énigme du lemming, je me suis fait apparaître quelques facteurs pour le moins improbables, d’une part et d’autre part, le fait que je n’étais plus tout à fait d’accord avec les interprétations que ces scientifiques sociaux, nés de cette société, qui ont tété son lait sur les bancs de ses universités et autres laboratoires, et qui ne pensent que pour corroborer par cette interprétation sa manière de fonctionner. Ça jette un doute aussi vivant qu’un asticot dans une pomme malade : les explications que cette société donne des faits issus de la « nature » sont sensiblement orientés et cela me gêne, car ce que j’aime, c’est de trouver une explication la plus vivante possible pour clarifier un fonctionnement vivant. Or, ici, selon elle, il s’agit de mort « volontaire ».

La trace qu’une telle constatation laisse, outre le doute dont je parlais tout à l’heure, est qu’on va chercher ailleurs les explications qui vous manque du monde, en lâchant celles qu’on veut bien vous donner. Comme on doit, en quelque sorte, tout refaire, trouver de nouvelles références, établir de nouvelles fondations, au début c’est assez long et pénible, incertain et vague, tâtonnant et hésitant. Puis on se fait ses marques, comme on dit. Il y plusieurs choses qui ne peuvent mentir : on respire, on mange, on boit, etc. Si les organes génitaux se situent près de l’anus, c’est tout simplement parce qu’ils servent eux aussi à la décharge, mais cette fois-ci, de l’énergie excédentaire accumulée de par le fait de vivre ; et la fonction de la décharge n’a rien de sale, sinon que pour une personne qui trouve les organes génitaux entachés de souillure, ce qui est moral et non pas vital. La charge se fait par l’apex des corps, par la bouche, les yeux, l’ouïe, la chevelure, la cervelle et la décharge par la racine, la base de sur quoi tout ceci est bâti, les pattes arrières, ce qui donne l’élan. Si la jonction supérieure des pattes avant s’en séparée de l’axe osseux du corps en se scindant en deux omoplates pour acquérir une mobilité extraordinaire, celle des pattes arrières est toujours et encore soudée à cet axe.

S’il ne s’agissait que d’une confusion passagère, je ne serais pas si coupant : c’est l’ensemble des interprétations du monde qui cherche à se correspondre à un fait global d’organisation sociale. C’est ce que je nomme un « état d’esprit d’un moment » dans le cours du temps.

Cette pensée est fondue tant à partir de celle que l’on nomme « dominante » que de celle qui ingère cette domination. C’est LE drame humain : le fait que le battu fait sien le fait d’être battu, et son « état d’esprit » aussi bien. Si les gens ne se révoltent pas, c’est qu’ils n’en n’ont pas « l’état d’esprit » et cet état d’esprit est tributaire du fait qu’ils sont battus, dans tous les sens du terme. Les victoires de ses idoles qui jouent encore à la balle répondent à ses désirs inassouvissables et pour une fois, encore, réalisés… par d’autres ! Ses renoms militaires sont encore des victoires pour d’autres que eux ; ses conquêtes commerciales accomplissent la pauvreté de leurs existences amoureuses. Et la ruée matinale qui les mène au travail restera stérilisatrice semblablement à cette cheminée d’usine ou la tonne de papier qui échoit dans ses poubelles bureaucratiques.

C’est cet « état d’esprit » qui limite l’ensemble des possibles d’une société donnée dans l’acquisition comme vécu immédiat du bonheur : certaines sociétés refusent le « progrès » parce que celui-ci détruit cet équilibre entre ce que la nature pourvoit et le bonheur implicite de l’organisation sociale qui le permet. Un état d’esprit si emprunt de lui-même qu’il en oublie totalement, même contraint par la nécessité et l’évidence, son intégration indubitable à la vie qui le porte, sur laquelle il pose érigé ses pieds ou repose son dos quand il dort, ne peut survivre à son idéologie, à son Idéal. Il sait, comme dans son interprétation du « suicide » des lemmings, qu’il va à la mort, mais refuse de la voir : un état d’esprit est comme une âme qui ne veut pas mourir alors que son corps périt ; elle laisse sans cesse penser le contraire de ce qu’elle est : un souffle qui disparaît lorsqu’elle quitte le corps mort, un rien d’autre.

C’est donc un fait de morale qui maintient ce monde et cette morale tient sur une interprétation qui retourne à elle-même, une tautologie, une maladie. Le remède est à la fois simple et compliqué. Simple, car il suffit de s’en défaire, compliqué, car il n’est pas si facile de s’en défaire… et pour quoi ? Elle ne laisse de place à rien d’autre qu’à elle-même ! Enfin… c’est ce qu’elle n’est plus si sûr de pouvoir croire.

mardi, 14 septembre 2010

La plaie de l'Idéal

Je pense que, du fait que l’enfant se rêve comme surpuissance sur le monde par cela-même que sa pensée se voudrait d'une surpuissance du même ordre, il se forme comme une structure de pensée à partir de laquelle il voudrait se retrouver face à l'impuissance – qui n'est que relative à ses ambitions irréfléchies – ; et il s'avoue ainsi indirectement dans une disposition, que je n’hésite pas à nommer « Idéal »... et cet idéal est un plaie.

J'ai longtemps cru que l'Homme est bon, mais c'est l'humain qui est bon : l'homme ou la femme sont bons individuellement, assez souvent, mais collectivement, ils sont très loin de mon Idéal. Ce sera donc mon Idéal qui devra perdre sa majuscule ! D'ailleurs, la grande majorité de ses oeuvres d'art sont des Idéals : corps parfait de Michel Ange, détermination optimale dans les sculptures soviétiques, maoïstes ou coréennes, le stakanoviste moderne qu'incarne le cadre, etc. toutes les allégories veulent montrer et montrent un Idéal, qui du poète, qui du dirigeant gouvernemental, qui du « père » d'une pensée, qui du sexe le plus performant (dont il est fait un usage irréfrénément stakanoviste), qui de la voiture la plus belle (qui cherchera à correspondre le plus exactement possible à un caractère adaptatif singulier et donc, dans la mesure de ce caractère, à une fortune, une manière de l'acquérir – qui est toujours d’appauvrir ses congénères ), qui de la nana la plus belle, la plus attractive sexuellement, la plus séduisante, la plus sexy-bandante-suceuse-baiseuse, etc. L'Idéal est la plaie de l'humain.

Ainsi, j'organise ma vie selon cet Idéal, qui n'a rien à voir avec la réalité. C'est peut-être une idée que je me fais de moi d'après la perception que j'ai de moi et qui doit par ailleurs correspondre à ma manière de vivre, tout en étant persuadé que  j'en suis loin, personnellement, que c'est quelque chose que je voudrais atteindre... et corrélativement où je ne suis pas présentement. Non pas que je n'essaie pas d'y parvenir, ou que je ne sache pas que je ne pourrai jamais L'atteindre, mais que je refuse de penser que je ne pourrai jamais y arriver, que je n'en suis pas capable... et les autres tout autant. Je ne suis pas assez idiot pour penser que je doive demander aux autres ce que je ne suis pas capable de réaliser moi-même, pourtant, cette image filigranique macule le fond de ma manière de voir le monde. Penser que l'Homme (je dis bien homme, pas avec un « F » majuscule), lui qui a massacré, violé, pillé, et le reste, est bon, n'est plus un filigrane, mais un voile d'une opacité d'au moins 25 % porté devant ma vision de ce monde et de la perception que j'en ai. L'humain est bon, sans doute, mais individuellement ; dès qu'il est en meute, il devient délirant, il lui faut un Idéal qui focalise ses actions  pour les rendre communes et, généralement, c'est assez loin de cet Idéal, affectivement aimant, socialement agissant, sexuellement parlant et intellectuellement pensant. Il arrive parfois, hélas, que cette opacité obstrue de ses 75 % la vision de certains de mes congénères, au moins, et pas obligatoirement des plus religieux.

Pour peu que cet Idéal soit appliqué dans les préceptes que reçoit l’enfance dans son grandissement, et nous, chez lui, voilà face à trois problèmes :
- l’enfant sait qu'il ne pourra jamais l'atteindre (il a raison) ;
- l'enfant veut l'atteindre (il a raison) ;
- l'enfant n'en a rien à faire (et il a raison) ;
avec pour chacune de ces trois manières d'y réagir, des conséquences très particulières. Car pour chacune de ces trois manières de réagir face à une mise en demeure devant l'Idéal, l’enseignement, lui, va réagir d'une manière qu'il trouvera toujours opportune, suivant la période d'une époque et de cette époque dans son évolution ; manière à laquelle l'enfant va lui-même réagir suivant son caractère, son être adaptatif.  Sans prendre en compte l'influence des différents Idéals de chaque personne qui le côtoie sur lui, l’enfant doit s'adapter à ce qu'on lui demande, c'est une loi biologique immédiatement liée à l'enfance, et, à mon avis, on devrait faire beaucoup plus attention à l'application des modalités de cette loi, à certains de ses critères d'application et principalement pour ce qui regarde le petit humain. (En fait, de cette loi, il n'en est rien su et ce qu'on veut en savoir l'est d'aussi loin que la galaxie Andromède, car elle détruit l'Idéal).

L'enseignement contient et l'Idéal et la manière de mettre face à lui l'enfant, c'est à dire le but à atteindre et la manière de l'atteindre, par ordre chronologique. Il est possible d'imaginer un Idéal qui laisse à l'enfance le soin de se comprendre soi-même, avec l'aide de l'adulte puisque cette loi qui remarque pour la spécifier la relation de l’enfant à l'adulte dans le cours de son grandissement, n'a pas du tout exclu la présence de cet adulte comme support vital. Ce support vital n'est pas suffisant pour certains, il faut aussi y adjoindre un Idéal dans lequel il puisse se reconnaître et justifier affectivement cette présence avec l'enfant. Ici, cet Idéal est une transformation (pour le moins) de l'amour de l'adulte pour l'enfant, ce sentiment qui le lie à lui biologiquement, du fait de sa dépendance biologique à l'adulte ; et par « dépendance biologique » j'entends l'amour, le bon soin, la protection, la nourriture et la réponse aux questions. 

C'est comme si l'Homme et la Femme avait quelque chose à justifier de son existence et qu'on veuille le faire comprendre à l'enfant qui n'en a rien à faire, par la persuasion invasive et le plus souvent par les coups et les blessures physiques (circoncision, infibulation, scarification, tatouage, coups de fibules, tortures diverses, etc.), le chantage affectif et les interdits relatifs à la sexuation (le seul fait d'être pourvu d'un des deux sexes).

Mais l'Idéal ne vient pas seulement de l'enseignement, enfin... toujours directement. Suivant le cas d'un des trois que j'ai dénombrés, l’enfant va réagir suivant ce qu'il, lui, consent de ce qui serait parfait pour lui, c’est-à-dire, au mieux de cette adaptation qu'il voudrait la plus aisée possible, la moins pourvue en anicroches, souffrances, douleurs, obstructions, buttes, interdits, etc. auxquels il doit se confronter.  Sans se mettre immédiatement en butte, comme chez l'adulte, au paradoxe de l'Idéal qui se trouve être dépourvu du perfectible puisqu'il est LE parfait, comme fait de conscience et d'infériorité que son détenteur supplante avec plus ou moins de malheurs et d'impuissance, l’enfant n'en ressent pas moins dans son fors intérieur, ce qui lui coûterait le moins des peines qu'il y a à vivre... lorsqu'elles se présentent à lui.  C'est l'Idéal qui transforme les avanies en coups du sort et résout ces avanies selon ce qu'elles ne sont pas : des coups du sort.

Et l'éducation, au lieu de bien montrer, tranquillement, que l'Idéal est une solution d'impuissant, en ce sens qu'Il manifeste un retrait quant à des solutions, des options, des choix, des positions qui ne font pas parti de Ses positions, choix, options, solutions, loin de suivre le chemin évolutif (assez semblable à sa compréhension de la mort) par l'enfant, module cette impuissance manifeste de l'Idéal à appréhender le monde selon ce qu'il ou Il est, par une autre forme d'Idéal : religion ou mécanisme, principalement. Cette éducation s 'appuie pour cela, on le sait bien, sur la satisfaction sexuelle emprisonnée dans cet Idéal. De sorte que l'on peut comprendre que son énergie, l'énergie qui lui est nécessaire pour exister et manifester son existence en pratique, provient de cette satisfaction sexué de la vie qu'Il a emprisonnée.

Arrivé à un tel stade de dépassement de la vie individuelle, personnelle comme simple élément de la vie intégré dans la vie comme général à la vie, l'amour devient un Idéal, au même titre que la haine ou la poursuite du travail, de la richesse argenteuse ou la recherche d'une énergie supra-efficiente comme le nucléaire qui n'a jamais fait ses preuves depuis tant d'années qu'il cherche à vous en remontrer sinon, précisément que dans les formes de cet emprisonnement enracinées dans le futur et dans le présent, dans ce qu'il est, ce présent futur et sa consommation de travail dont l'unité est de l'ordre, maintenant, du millier de tera-watt avec une rentabilité minimale de 70 % pour ce qui est de son gaspillage, de sa pollution, de son excédentaire, en tant que mesure d'économie, l'idéalisation de l’interdépendance de chacun de nous avec le nous, ayant pour base de mesure la mesquinerie de chacun pour le malheur de tous, l'argent.

La raideur de l'Idéal est telle que, même lorsqu'Il se spécifie comme un laisser-aller, ce laisser-aller devient une obligation. Il déforme les relations entre amoureux à tel point que des séparations sont inutiles ou d'autres absolument nécessaire et immédiates sans qu'elles s'opèrent. L'Idéal a son mot à dire sur la liberté alors qu'Il est une prison et ne voit la liberté que selon Ses critères et ne l'admet que selon Eux. L'Idéal est la plaie de l'humain, plaie affective, sociale, intellectuelle.

Je pourrais dire, à la manière d'un livre qui parle de la position sociale de la femme dans les quelques variations d'organisations humaines, qui remarquait que la femme n'a jamais été plus libre que dans les société où son frère (matriarcat) comme son mari (patriarcat) ont les mêmes pouvoirs sur elle : ne pouvant jamais s'entendre entre eux de ce qu'elle doit faire, elle fait ce qu'elle veut ; hé  bé, c'est parce qu'il y a tant d'Idéals que je puis trouver un semblant de liberté, car chacun d'eux trouve en moi une part qu'il chérit alors que je ne suis rien de tout ce qu'Il désire. Les mailles de chacun de Leur filet m'ont ici ou là rarement emprisonné – et je me débats parfois avec tant d'énergie que je préfère, comme le renard, y perdre une patte que de me voir entre Leurs mains – : il suffit de se montrer simplement sous les couleurs de la porte de sortie qu'Ils voilent, qu'Ils auto-voilent chacun à sa manière, pour qu'Ils ne vous aperçoivent plus. Car la frayeur que soulève la vue de la porte de leur liberté est telle qu'Ils trouveraient tous les moyens possibles et imaginaires pour vous tuer cette liberté et la vie qui va avec.

Je redois à Frédéric Wolff, dans son livre « Qu'est-ce que la démocratie ? » une porte de sortie formulée dans les interlignes de son ouvrage : pour nous extraire de ce marasme, il y a finalement une solution qu'il est aisé de formuler : « Nous devons organiser notre monde dans le savoir abrupte que l'humain est certes bon, individuellement, mais mauvais, collectivement ». Autrement dit, nous devons nous organiser de sorte que l'Idéal ne nous gouverne pas, ni celui-ci ni celui-là.  Nous devons nous organiser de sorte qu'il nous soit indispensable de diviser le pouvoir que le pouvoir délégué octroie dans l'accomplissement d'une tâche, à tel point que l'humain, détenteur de ce pouvoir, ne devienne jamais nocif : nous n'avons QUE cela à faire !

dimanche, 05 septembre 2010

Multitudes d'identiques uniformes

Ce mec, c'est un plouc. Je n'oublie pas que son objectif est de protéger le capital de ses copains, je le sais. Je suis heureux que cela mène à sa perte, car il nous pense selon des critères complètement délirants ; et ses potes pareil. Une amie hier soir de s'alarmer parce qu'il a gagné 4 points aux sondages. Je lui réponds : … mais à partir de quel stade, de 30% ? Cela ne fait que 34, c'est ridicule... Et qui sont ces 4 points ? Ses derniers ? C'est pas très fort... tout juste de quoi exciter un journaliste...

C'est sa manière de se cacher (kascher ou kärscher ?) derrière le scandale politique dont il est le représentant suprême. On veut nous faire travailler encore et encore, alors qu'il faut, pour le moins répartir ce « travail » entre tous pour travailler « tous et moins ». Je n'ai jamais entendu, dans mon pays, autant de gens parler de politique dans la rue, entre eux, au marché : la rue gronde, les gens ne sont pas d'accord, nous sommes touchés dans ce qui fait notre identité, notre multitude multicolore et polyglotte et nous n'avons pas la mémoire aussi courte que les jambes de ce géant de l'entourloupe, de la poudre de perlimpinpin qu'il jette à qui veut aux yeux ouverts avec trop peu de discrimination pour ce qui est de l'usage du mot « race ».

Nous avons donc un personnage de l'Etat, à demi-français par son père, époux d'une femme naturalisée par mariage, qui voudrait faire une sorte de propre dans notre pays qui a accueilli les mocos, les bicos, les ritals, les portos, les polichs, les grecs et les métèques, les bougnouls, les négros, les porto-ricos, les usonniens, les mexicos, les bochs, les suédois, les spanichs, les teutons, les gens des Îles et ceux du voyage, les bataves, les berbères, les arabes du pourtour méditerranéen, les proches et lointains orientaux, les chintocs, les vièts, les ruskovs, les soviétiques, les roms, les gens du Laos, de Birmanie, les Noirs d'Afrique, qui a été traversé par les Burgondes, les Vandales, les Arabes, les Visigoths, et j'en passe : ce sont toujours ceux qui ont à se reprocher le plus un supposé manque de pureté quant à la légitimité de leurs prétentions sociales, qui vont vous chercher chez les autres ce qu'ils ont fait leur proche tâche et leur paraît, à eux, peu légitime. Il y a eu le même topo il y a 80 ans par un plouc pour soit-disant tenter de résoudre une organisation des gens déplorables par un manque de générosité des nantis de l'époque, du vouloir accaparant de pôvres riches à réduire à la misère leurs congénères.

Ce personnage de l'Etat touche ici à quelque chose qui fait notre identité : précisément ce « sang multicolore et polyglotte » qui est une de nos caractéristiques et qui, lui, s'assimile avec suffisamment de plaisir pour adopter les modalités de notre langue. Selon moi, sans que j'en fasse une règle, pour se dire natif d'un pays de sorte à prétendre en connaître les entournures, il faut être de la seconde génération né dans ce pays : les grands parents peuvent alors instruire leurs petits-enfants de ses us et coutumes qui sont acquis sur le tas comme adaptation et les bercer des chansons d'une époque qui contiennent une langue d'une époque et sa syntaxe. Notre personnage de l'Etat n'est que d'une première génération. Il ne sait pas ce que ce que d'être français, il organise des colloques, des forums, pour reconnaître que ce qu'il pense nous correspondre à ce que nous sommes, sans rien vouloir en reconnaître, parce qu'il, lui, ne sait pas qui nous sommes.

Ce mec qui a la nationalité française parce que sa mère est française, veut déchoir de la leur ceux qui sont des délinquants : en quoi donc cela peut-il intéresser un brigand d'avoir ou non la nationalité française ? Pour aller pointer au commissariat ? Et pour combien de personnes ? Des pets de mouches. Toutes ses « grandes mesures » sont de cet acabit, toutes : des pets de moustiques armées de l'« Assemblée » nationale, de la justice, de la police et des gendarmes et quand ça n'ira plus du tout, de l'armée.

Je me demande parfois s'il parle notre langue, tant est étrange sa manière d'en tordre la syntaxe. La syntaxe est la marque de l'intention d'un auteur : lorsqu'elle est mauvaise, celui qui l'exprime n'a pas des intentions très clairs. L'ensemble de l'organisation de la société s'oriente vers l'obligation de l'achat, de sorte à être coincé par l'obligation au travail. Le loyer ? Ca vous bouffe plus de la moité de ce que l'on touche en allant au travail. Et pourquoi ? Parce qu'un gonze a eu du pognon pour acheter un appart tout fini en plus du sien et qu'il le loue parce qu'il n'en a pas besoin, lui ou ses proches. Et comme les gens sont dans la misère, ils prennent ce qui se présente, au prix fort : allez dormir dans des cartons, pour voir. Pour la viande, c'est pareil (il faut être étourdi pour manger du boeuf qui n'est pas nourri à l'herbe : il a besoin 8 parts de protéines végétales pour produire 1 part de protéine, alors qu'il en faut 2,5 pour la volaille et 3 pour le porc et autres petits bétails) : la meilleure est la moins accessible, le reste est pollué pour vous polluer la vie.

Ceux que l'on vire ailleurs sont précisément ceux qui sont soupçonnés de ne pouvoir pas procéder à l'achat ritualisé par le salariat. Quel est l'intérêt d'un slogan tel que « travaillez plus : vous achèterez plus » (travaillez plus pour gagner plus) ? Acheter quoi ? Des grosses bêtises fabriquées à Usine-Péter-où-Chnoque ; ces petites choses devant lesquelles on espère vous faire baver dans une télé avec plein de couleurs vives et fugaces et des femmes à demi à poil aux grands sourires. C'est par la syntaxe que l'on évoque la peur de paraître ridicule de ne pas posséder ceci ou cela qui est à la mode de l'achat du moment : le blanc lave plus blanc que le plus blanc des plus blancs, la 3G vous pousse au firmament des étoiles par l'accès cosmique qu'elle donne au temps qui passe comme une flèche propulsée au méga-herz, accédez au plaisir de la télévision en hyper-petit écran partout transportable pour ne rien perdre de ce qui vous perd. L'amélioration de notre sort, acquis de haute lutte par nos plus immédiats ancêtres, est détruite, saccagée, piétinée par la haine de ces nantis chapardeurs et leur manière de vivre.

Ne serait-ce que nous ne savons plus la manière dont sont tués, pour nous, les animaux que nous mangeons, montre la transformation insidieuse de la société qui s'opère : les batailles pour plus d'humanité dans cette mort, qui commençaient à porter un peu de fruit, se sont rompues contre les contreforts des religions circoncisantes. Le chef de l'Etat le sait et y concoure : il en connait les effets séparateurs où les uns qui mangent du cochon, et des autres qui veulent en empêcher les uns, ces derniers justifiant moins de cruauté pour une naguère même prétention religieuse sur la vie. Former des armées virtuelles qui s'affrontent sur des broutilles lorsque c'est l'ensemble de la vie qui porte le voile de la soumission est la plus dérisoire des prisons. Nos relations sociales y sont réduites à poussière. Ce pourquoi je vis, la société des humains, est délité par cette organisation gouvernementale de la société. J'ai trop de choses à dire pour être cohérent.

 

mercredi, 01 septembre 2010

Et qui vaut taille

Ces films de guerre sont vraiment là pour spécifier que le peuple et ceux qui le composent, c’est de la vale-taille, bon à être sacrifié pour une cause dont il ne soupçonne pas la grandeur, tant il est petit et à laquelle on demande pourtant d’immoler de la vie. C’est de bonne guerre lorsqu’on veut que ceux qu’on voudrait qui se contemplent dans de telles images, restent sans critique, cois, et supporters ; et aussi un bon apprentissage à acquiescer la vue du sang d’un autre, étranger à cette cause qui le dépasse, mais dont il a fait sienne comme un pomme dans une bauge, prêt à en découdre pour fendre la peau, percer les cuirs et trancher les trucs qui peuvent saillir qu’on a eu le malheur de laisser dépasser au mauvais moment et au mauvais endroit. Le seul fait que ce peuple va se porter devant de telles images, montre son approbation à un tel projet d’endoctrinement qui signifie, ma foi, qu’il ne sait pas faire autre chose de son temps.

Bon, j’exagère : il est possible que ces films où il faut sauver une fille ou un soldat, ou encore où un héros doit démontrer la justesse de ses vues quant à la justice, l’équité relatives des classes et leur maintien, soient comme une purge du pire et comme un médicament préventif, à ceci près que la dose est assez brutale, pesante, congrue et rouge. Je ne sais. Et puis il y a du rustique dans ces évocations, des barbes, du muscle et des regards furibonds. C’est, dis-je, peut-être une distraction, je ne sais car ce sont là des mœurs que je découvre soudain.

N’empêche, la pédagogie consistant à montrer par l’exemple des possibles aussi violents laisse songeur. Tous ces efforts, tous ces cris, toutes ces tourmentes, ces abattements, ces trucs d’hommes, en gros (deux muscles, un cerveau) qui en veulent dur à cette tâche qui consiste à se défaire d’un autre homme, dénommé « ennemi » alors qu’on ne le connaît pas… il y a comme un goût de revenu, de vomi qui rend amère la bouche. Je suppose qu’on attribut à cet ennemi la même alacrité à défendre la cause de ceux qui le commandent et qui lui disent qu’il est bon, non pas pour lui-même, mais pour un ensemble dans lequel sa présence future restera dans l’aléa des conjonctures au regard de la manière dont il s’en sortira plus ou moins sauf, avec la même hargne, finalement, à défendre, dans cette attaque viscérale les pensées qui donnent une direction guerrière à ses gestes. D’ailleurs, il a subit un entraînement, le gars de l’image, propre à précisément l’obnubiler dans l’exécution de cette entreprise propice à lui donner du cœur à l’ouvrage, une sorte de conditionnement où le sujet de sa propre personne passera sans penser outre à son accomplissement. Décerveler un humain, finalement, ce n’est pas bien difficile : il suffit de lui crier dessus, de le forcer à faire ce qu’il n’a pas envie de faire et de le confronter à une mort sociale s’il n’est pas d’accord de n’avoir pas envie ou même, pour de plus rétifs, à l’enfermer dans un espace exigu en le nourrissant de pain sec et d’eau. Ca s’est vu, ne croyez pas que j’exagère ! D’autres, pour moins encore, se sont vu brûlés, décapités, empalés, écartelés, boursouflés d’eau, les os broyés aux coins, les yeux crevés et d’autres organes encore totalement et soigneusement maltraités pour ne plus fonctionner correctement.

C’est pourtant ce que montrent ces films et par le menu. Il faut bien admettre, du bout d’un regard comme un long bâton dérange un cadavre de chat assez avancé, qu’il doit y résider un plaisir ou un autre à tant d’exposition. Ces charges pleines de fureur, de cris et d’explosions, de projectiles, surtout, propulsés à bras d’humain suite au déclenchement volontaire que stimule la gâchette (un relent de puissance : « ha ! je l’ai eu ! » dans son désir bouffi d’orgueil) ou encore à l’aide d’une poudre noire, dite « à canon », lancés dans une seule direction en escomptant que le hasard, aidé du nombre, portera une efficacité des plus rentables en blessures mortelles, que l’on distingue comme dans un brouillard tant est dense la hargne qui fourmille l’air de la quantité mise en œuvre, abasourdissent par leur ampleur. A nouveau, c’est précisément l’objectif de telles images : le nombre. Pour faire une guerre, il faut du nombre et beaucoup et de tout.

C’est le nombre qui fait l’armée et si Napoléon a gagné ses premières guerres en s’appuyant sur une technique inédite, celle du tirailleur en ligne - individu qui prend sur lui seul la victoire, en beaucoup - plus tard il a admis que c’est le nombre qui la provoque ; à peu près correspondant à celui du succès en nombre de ce spectateur de ces films, spectateur qui retrouve fidèlement ses mêmes figures de figue sous des déguisements différents qui le rassure quant à ce succès dont il veut avoir la certitude ferme. C’est pour cette raison que je doute de sa sincérité lorsqu’il m’affirme qu’il va visionner ces films comme moyen cathartique ou préventif. Ce serait plutôt libérateur, à mon sens. De tels films le libère de cette agressivité qu’il a accumulé ailleurs et dont il n’a pas pu, d’une part se défendre et d’autre part se défaire. Ces atrocités le libèrent de son manque de liberté qu’il ne sait pas entretenir, caresser, choyer, conserver, aggraver, déployer. Outre la rencontre amoureuse, c’est la conquête de la liberté qui sert d’appui à cette constitution affective qu’il veut retrouver en images et qui lui fait débourser ses menus sous à l’entrée du cinéma. La conquête de la liberté, vue au cinéma, est paradoxale, puisqu’en images, alors qu’elle est un fait social, individuel, une relation en partage et une réalité qui trouve sa description dans et à travers ses mots. Or, au cinéma, en images, elle n’a que la consistance de l’image, une vision et une vision qui se déroule dans un accomplissement qui restera en images puisque les lumières revenues, rien n’a changé, tout est comme avant, peut-être une sensation de rêve persiste comme l’absence d’un temps mort, une mi-temps, un entracte, mais rien de plus, matériellement, socialement ou collectivement responsable de ce qui arrive.

Suivant ce schéma simplissime de la conquête de la liberté mise à mal, les gens se satisfont de ce qui est, car, même en image, cette liberté chérie a trouvé à se manifester et cela peut satisfaire celui qui l’a perdue. Et pour cela, les armes détonantes de toutes leurs pétarades, de leurs estafilades sanguinolentes, de leurs entailles béantes, de leurs coups bas, traîtres, vicelards, pervers et maudits, que des trucages méticuleux s’efforcent de rendre les plus vraisemblables possibles, les déplacements de forces et de force, les subtiles moqueries d’un hasard ourdi, les précautions rendues dérisoires d’accéder à cette liberté comme les espoirs tendus à l’extrême de l’acceptable toujours repoussé dans les limites de l’improbable, loin de le faire jouir de cette conquête de la liberté parce que réellement vécue, le pose plutôt dans des stades d’angoisse dont il se sent sécuritairement protégé par l’image qu’il contemple et dont il connaît la consistance, et lui montre un aveu : son peu de puissance qu’il puise en lui de la comprendre, de comprendre ses modalités – qui sont souvent à une distance astronomique de ce qui lui est montré car beaucoup plus proche de la réalité – ses entournures et sa multiplicité de formes, et désagrège son appétence à l’accomplissement d’un tel projet en le comblant d’ersatz, d’images d’icelle.

Non, ce n’est pas moi qui suis moral, ce soir, ce sont ces films : par rapport à eux, j’en suis dépourvu.

lundi, 30 août 2010

La rencontre : trois mots

Il n'y a pas d'articles "trialectique" sur l'encyclopédie Wikipédia, la police qui y règne en maîtresse est trop peu apte à admettre une telle liberté, à moins de la serrer de très près pour la rendre indigente. Il y gît cependant discrètement un unique article qui l'évoque indirectement : celui sur la rencontre.

La rencontre est un évènement : c'est la conjonction de trois facteurs dont deux sont dynamiques et un statique, ou bien le plus souvent deux de ces facteurs sont statiques (ils ne bougent pas dans leur être-soi) tandis que le troisième est dynamique et vient bouleverser leur immobilité pour les fondre ensemble.

La rencontre est le résultat de cette conjonction comme nouvel élément, un fruit du temps.

Par éléments statiques, il est entendu que ces éléments sont dans la continuité de leur être, de leur état d'être, et par conjonction dynamique, il est entendu que l'élément en question n'est pas dans la continuité de son être : il se présente dans la rencontre comme un élément fortuit (temporel, social, conjoncturel), peu maîtrisable bien que pouvant être un objet prédictible ; il propose une altération à ce qui est et cette altération, acceptée par les deux éléments statiques, est intégrée comme jonction à ces deux éléments qui se fusionnent dans un ensemble nouveau.

Ce facteur dynamique peut se trouver dans des moments sociaux prévus à cet effet (fêtes, vacances, manifestations diverses : bals, manifs, colloques, conférences, festivals, etc.) propices à son expression. Son caractère fortuit, cependant, ne pourra pas être à proprement parler provoqué, car c'est toujours la conjonction intime des trois éléments disparates de la définition qui produit la rencontre.

On peut parler de rencontre pour deux personnes, incitée par la sympathie, l'humour, la gentillesse, le respect (le fruit peut être un amour, une amitié, ou en cas de contraire, une haine), pour deux idées (le fruit peut alors être une invention), d'évènements sociaux qui sont la conjonction d'une disposition sociale et d'un contexte social : ici l'évènement détonateur ou détonnant, permettra à la société de s'ébrouer pour accoucher d'une forme plus moderne de la liberté de la rencontre.

Il y a encore rencontre entre la graine et le sol qui l'accueille auxquels vient s'ajouter l'eau de la pluie en permettant à cette graine de monter en température et de croître.

Une découverte est toujours le fruit d'une rencontre, de la conjonction intime de trois éléments. Et à propos de la découverte, chose remarquable, elle est toujours deux événements, au moins deux conjonctions au même moment en deux endroits différents de notre planète, sous une forme similaire d'une même rencontre, d'un même fruit : on ne se rencontre jamais seul.

Du point de vue de la philosophie, la rencontre est une nécessité sujette à une contingence : la rencontre est le paradoxe en soi (car le contingent qui règne sur le nécessaire n'est plus du contingent et, inversement, le nécessaire assujetti au contingent ne peut être nécessaire, car ce nécessaire peut ne jamais se réaliser, trouver son effectivité à travers la contingence où il perd son aspect obligatoire). Le paradoxe réside particulièrement en ceci que pourtant, la rencontre se réalise et réalise à la fois sa nécessité et la contingence qui l'a créée : c'est ce qui en fait son côté merveilleux qui se renouvelle toujours.

Certains la cherche sans fin dans le jeu, d'autres la trouve fortuitement chez les autres. La rencontre est la négation et le parachèvement du hasard.

mercredi, 11 août 2010

Que sont nos trêves devenues ?

Il y a plusieurs confusions qui règnent sur le rêve, la conscience à l’état de veille durant le sommeil. On parle de « contrôler » les rêves comme de saisir les manettes d’une machine à faire des frites sans trop savoir quelles sont les patates et si elles sont épluchées ou démonter la pédale d’un machine à décolleter qui se mettrait tout à coup à pondre des œufs, ou encore à la rencontre d’une machine à coudre et d’un parapluie sur une table d’opération. On ne sait pas de quoi on parle et on parle surtout pour contrôler la pensée, celle qui fuse sans morale, en toute vigueur sans rigueur, dont on a du mal à maîtriser les fusions et les fissions tant elles sont trop souvent subrepticement en dés-adéquation avec la morale de l’époque ; ce qui est très gênant. Et c’est là que c’est prenant de contrôler les rêves car on sait qu’il y demeurera toujours un aspect érotique à ceci près qu’on le voudrait plus sage.

Le rêve a une fonction, le rêve est une fonction en fonctionnement dont l’intérêt est précisément de rester sans contrôle. Au cours de la veille, une quantité d’événements se passent hors du champ de la conscience (soit qu’elle n’en ai rien à faire, soit qu’ils la gênent, soit autre chose) qui sont pourtant imprimés dans la vie qui passe ce cours du temps et qui sont plus ou moins contradictoires, sinon sources de déplaisir. Ces événements sont imprimés dans le systèmes nerveux neurovégétatif. Le sommeil est la résolution de ces contradictions et leur digestion. C’est un phénomène indispensable, même lorsqu’on dit ne rien vivre ou ne faisons rien vivre, comme dans ces prisons aux murs blancs et insonorisés. Le rêve est la régulation autonome de la vie pour le maintien en vie correct de la vie, pour le maintien fonctionnel de la vie. Penser contrôler le rêve revient à dire qu’il y a du progrès dans l'ITER et son petit frère d'EPR, par exemple, qu’on serait susceptible de pouvoir contrôler, déjà qu’on en maîtrise pas les coûts de construction.

Cette régulation du système neurovégétatif se formule sous forme de faits du jour ou des deux jours précédents le sommeil, parfois de plus loin lorsque la tension impliquée à ce système neurovégétatif est très dure, tenace ou inavouable. Ces reviviscences de moments se manifestent sous forme d’images associées aux sens, de celles vécues ou assez proches d’un vécu contradictoire. L’association de sens (ouïe, odorat, tact, goût, vue, équilibre, etc.) permet à l’organisme de résoudre plusieurs facteurs en lot, car l’objectif est l’homogénéité du système vivant, la conservation de son intégrité. Et tout cela se passe en fonction de l’animal en question, bien sûr et je suis quasiment sûr que les insectes rêves, ceux qui vivent plus de une journée.

Et le rêve se manifeste par des décharges énergétiques (ou hormonales, c’est kif-kif). On voit un chien courir, un chèvre bondir, etc. et on voit parfois de la souffrance.

Je pense que les animaux qui ont dissocié le coït du rut (la crème des primates), doivent avoir une relation avec la mémoire des rêves. Et j’en suis arrivé à penser que la pensée est une émanation sophistiquée du rêve, une fille du rêve. Vouloir le contrôler, revient à contrôler la vie, vieux rêve débile d’un humain désaffectionné. La pensée est un rêve conscient, un rêve qui se constate rêver et comprend son rêve. C’est ce que je pense. La pensée, loin d’être cet attribut mirifique des dieux n’est que le résultat du rêve arrivé au stade d’une mémoire particulière. La pensée peut être autre chose que ce qu’on en connaît, à un autre stade de la mémoire d’être elle-même. Comme les dieux, Dieu est un rêve.

C’est parce qu’on ne sait pas ce qu’est le rêve qu’on rêve d’une machine à rêver, ou de dispositifs, de drogues qui permettraient de maîtriser le rêve, de l’orienter dans un sens qui vous soit absolument propice, bénéfique, etc. On oublie que c’est la réalité vécue qui génère le rêve et que si on a de mauvais rêves, c’est la réalité vécue antérieurement qu’il faut changer, car la fonction du rêve est de résoudre et non de construire, de dissoudre et non pas de souder, de ressouder et non pas de bâtir.

Lorsque la réparation est heureuse ou malheureuse, on peut en avoir la mémoire, en cherchant un peu et cela se fait par association d’idées, terme qui exprime mal le fait qu’une idée va ou saute à une autre dans le cours du temps (il s’agit plus d’une succession d’idées dont on ne maîtrise pas l’association sinon qu’a posteriori). Mais généralement, la réparation se passe au nez du vécu somnifère et ne laisse pas de traces inutiles, encombrantes ou incommodes.

La mode est, en ce moment, de penser que le rêve est manipulable. Oui, il est manipulable, par le son, l’odeur, la teneur en vapeur d’eau de l’air, des idées suggérées à l’oreille. Mais dans quelle mesure et pour quel effet ? J’y reviendrai. Mais la première manipulation est celle du vécu antérieur au rêve, de la réalité à travers laquelle le vécu a dû passé et comment il s’en est sorti. On sait très bien que les rêves d’un riche ne sont pas les mêmes que ceux des pauvres, que les rêves d’un ouvrier ne sont pas ceux d’un patron, que ceux d’un croupier ne sont pas les mêmes que ceux d’un cambiste qui sont différents de ceux d’un chauffeur de taxi eux-mêmes différents de ceux d’un chauffeur de premier sinistre. Et chacun de ces protagonistes assument à sa manière une soumission à cette réalité avec plus ou moins de malheur. La manipulation première du rêve est ce qu’on vous impose de vivre, ce qui vous est imposé de vie et ce que vous en faites, dans une réalité située hors du sommeil, à l'état de veille. Et qu’on vous susurre des mots doux ou des langues étrangères durant votre sommeil, ne changera rien à cette soumission à la réalité, au système neurovégétatif qui est déterminé à résoudre les problèmes énergétiques que cause cette réalité, cet éveil. Et les tensions sont parfois si fortes et si diffuses, si confuses et si rétives qu’il arrive qu’on ne puisse s’endormir. Pourtant, le sommeil est bien là pour vous rendre heureux, n’est-il pas ?

Je vais expliquer comment la pensée est fille du rêve. A l’origine, il n’y a pas de nerf. Ce n’est que lorsqu’un organisme s’est formé de plus d’une cellule que cet organisme a eu besoin d’une système de communication entre les cellules qui le composent. Le nerf est né de la nécessité d’un pluricellulaire d’avoir une coordination entre les cellules qui le composent. De ce fait, certaines cellules se sont permises de prendre un rôle plus particulier dans l’organisation de cet organisme. Le nerf a suivi et il a dû, lui aussi, s'organiser pour faire communiquer l’ensemble de ces diversitudes, en un nœud. Nous appelons ce nœud central. Sinon, il est absolument intégré à l’ensemble de l’organisme. Ce système nerveux nous le nommons à ce stade « système végétatif » car sa fonction est de réguler, comme un « végétal » (c’est dire combien, académiquement on l’aime, ce fonctionnement !) l’ensemble de l’organisme en question. Cette distinction du "végétal" est due au fait qu’il a été nommé un autre système nerveux présent chez quelques-uns des animaux, comme central et plus particulièrement « conscient » ou volontaire chez l’humain. Physiologiquement, rien ne distingue foncièrement l’un de l’autre, sinon que la disposition géographique de l’un et de l’autre, encore qu’on ne peut soustraire la présence de nerfs communs à ces deux systèmes. L’un, le central, prend le chemin de la colonne vertébrale interne, tandis que l’autre prend un chemin externe à cette colonne vertébrale, d’une part et d’autre part que l’un commande principalement le muscle strié tandis que l’autre régule les muscles lisses et le fonctionnement végétatif des organes, leur vie à eux, tout seuls.

Ainsi, lorsqu’on voit une image terrifiante qui fait battre le cœur et vous met en sueur, est-ce le système végétatif qui est en marche, ou alors cela provient-il de la conscience que vous avez de cette image, qui est dite venir du système central, de la volonté. C’est confus, tout cela. Alors je vais faire un peu de biologie. Le cerveau, ce nœud nerveux, est composé de nerfs, et d’une substance de soutien, la glie elle-même composée de trois sortes de cellules, au moins, et qui ont un comportement très particulier. Elles sont là pour réparer, nourrir, soulager, alléger, joindre, soutenir, isoler, et on n’en trouve que trois ou quatre pages dans les manuels d’anatomie. Il y en a une aussi qui voyage dans le cerveau. Bien sûr, c’est par millions qu’elles sont. Et puis, en cherchant bien et longtemps, j’ai lu que la proportion entre la glie et le reste des cellules cérébrales est différent chez la souris, chez l’éléphant, le singe et l’humain. Et c’est énorme ! Chez la souris, ce rapport est de 20% ; chez l’humain, la présence de la glie par rapport au « cerveau » est de 80%. Et cela, dans une échelle croissante en fonction de l’animal dans l’arbre généalogie du temps. C’est là, tout à coup, que j’ai compris ce qu’est une « idée » : c’est la jonction entre deux parties du cerveau réalisée par cette cellule voyageuse qui a pris une charge ici pour la mener là-bas. Et que la pensée est cette circulation train-train de ces charges-décharges, liée à la charge vitale global de l’organisme et cela en fonction de la nécessité d’adaptation de l’organisme à son environnement. Si la pensée humaine est devenue si complexe, ce n’est pas à cause d’une complexité accrue de sa cervelle, mais simplement dû à la complexité accrue de son environnement qui oblige à des associations « d’idées » plus variées. Et plus tard, il n’a fallu qu’un saut pour comprendre que la pensée est une extension du rêve à l’état de veille.

Mais ce n’est pas venu aussi facilement. J’ai dû d’abord passer par la compréhension de la « cuirasse caractérielle » de Wilhelm Reich. Le caractère selon Reich, est l’adaptation plus ou moins heureuse de l’individu à un environnement qui devient le sien obligé. Le dressage, par exemple, est l’adaptation d’un animal à un environnement qu’on lui impose et auquel on lui donne les meilleures adaptations possibles pour son bonheur meilleur. Pour l’humain ce n’est pas pareil : ses rêves ont une telle mémoire sur sa réalité, que chez lui, cette rémanence devient une fonction qui bouleverse tout. L’humain a des plaisirs (il s’agit bien de plaisir et non de désir, car le support du désir se dérobe continûment sous les pas de l’irrésolu et pour le combler il faut produire de la tension et de l’indécis ; le plaisir est le soluble de la tension, c’est ce qui nourrit la vie). Le bambin a faim ; il doit attendre ; sa faim, c’est organique, se fait de plus en plus présente et donc pressente ; il attend encore sa tétée ou son bib ; rien ne vient ; pour ne pas souffrir davantage, le bambin « cuirasse » sa faim en l’enfermant dans un non-ressenti. Lorsque sa nourricière vient, le bambin n’a plus faim, enfin… elle est cachée et la nourrice doit la réveiller pour la satisfaire sinon le bambin ne mangera rien. L’amour de l’enfant, c’est la nourriture qui nourrit son corps ; ensuite elle nourrit son âme par l’amour qu’il reçoit d'elle. C’est là le schéma de la naissance de la cuirasse caractérielle : ne PLUS souffrir davantage à ce vis-à-vis de quoi on est ORGANIQUEMENT tributaire, à ce que ses propres organes ont besoin pour respirer ; et cela se passe de telle sorte que ce non-ressenti est lui-même non-ressenti : il n'y a pas même de manque. Il faut opérer toute une démarche d'esprit (psychanalyse, etc.) ou bio-psychique (analyse reichienne) pour qu'apparaisse d'abord le manque - ce qui est douloureux - et ensuite la raison du manque - ce qui est douloureux - et pour finir abolir cette raison, si tant faire se peut et est opportun.

L’apport de Ryke G. Hamer a été de découvrir, par le biais de l'amnésie de la maladie, que la cuirasse caractérielle se « voit » dans le cerveau : c’est une gangue de substance gliale qui « isole » le point de réception de la douleur correspondant à l’organe ou la région musculaire douloureuse, du reste de la vie et de sa perception. C’est-à-dire que la partie nerveusement « centrale » devient une partie nerveusement « végétative » de l’organisme. Car, si le système nerveux « central » est une spécialisation du système nerveux « végétatif », le premier peut à tout moment revenir à l’état du second à travers des processus tels que le cuirassement caractériel. De toutes les façons, un organisme DOIT se cuirasser, mais les conditions de cette cuirasse correspondent à une adaptation matérielle, visible, tangible et logique : irréfutable : mets ta main au feu, et ça brûle, fait attention où tu mets les pieds, cette plante est dangereuse, ne la mange pas, etc. Mais une cuirasse qui s’est faite sur une souffrance psychique n’a pas de tangibilité qu’elle-même. Interdisez à un enfant de toucher, alors qu'il n'en fait pas une affaire publique, ses organes génitaux ou d’embrasser sa/son petit/e camarade et vous n’avez aucune raison tangible de répondre à cette interdiction sinon qu’une cuirasse psychique et la cuirasse psychique, chez l’humain correspond au retour au végétatif de ce qui est central. On comprend ainsi le retour du refoulé à travers des symptômes musculaires.

Le rêve reprend ici son droit qui est de résoudre l’incompréhensible pour l’organisme donné à s’adapter à son environnement et lorsqu’on sait ce que l’humain fait de son environnement – une poubelle – on comprend le désarroi de certains organismes, la révolte d’autres, le suicide d’autres et la prise de neuroleptique pour la généralité.

Ce que signifient donc des films comme Inception ou Paprika, ce n’est pas que quelqu’un puisse rentrer volontairement dans le rêve d’un autre ou qu’une personne puisse vous emporter contre votre gré dans son rêve, ce qui est faux, mais qu’on puisse vous le laisser imaginer. Vous ne pourrez pas trouvez de solution en rêve à une telle contradiction ! La manipulation durant VOTRE réparation, ce que vous avez de plus intime, en somme, ce qui fait que vous êtes vous et comment vous l’êtes, de vous laisser croire qu’il est possible à votre insu d’en faire ce que bon semble à un autre, correspond d’abord à ce qu’on aimerait que vous fassiez – une adaptation parfaite à une société à laquelle vous ne vous adaptez que mal – en vous laissant ainsi manipulés par impuissance, tel que vous l’êtes aujourd’hui devant la vie de vos rêves qui est tributaire de vos états en veille. Cela signifie, bien sûr, le point de la connaissance du rêve et de ce qu’en imagine cette société de l’absurde, et les moyens qu'elle utilise pour vous amener à croire à de telles absurdités.

Les rêves collectifs se construisent ensemble, par la conscience de chacun de l’autre à l’état de veille, éveillé et non pas endormis, conscient et non pas inconscient.

L’immixtion dans le rêve d’une pensée étrangère est un processus policier, tyrannique et ne peut se faire que par la douleur physique. Philip K. Dick a beaucoup travaillé le rêve sous drogue et il n’est pas d’un avis dissemblable lorsqu’il fait usage de la logique protectrice à l’état de veille et non pas endormi, car la logique du système végétatif, d’abord est totalement incomprise par la cuirasse caractérielle, sinon qu’indirectement à travers des compilations statistiques, et ensuite n’a rien à voir avec la logique de l’éveil, sinon que la folie parfois douce. Les rêves éveillés d’un écran noir manipulent votre réalité endormie. Cette folie, on veut réellement la rendre douce, sans révolte contre ce qu’on lui fait endurer la veille.

Lorsqu’on dit qu’on rentre dans la folie de quelqu’un d’autre, cela signifie qu’on entre dans son irrésolution de sommeil qui déborde sur l'état de veille, irrésolution à laquelle nous sommes tous sujets, car tous à peu près sommes soumis aux même contradictions de soumission. Dans Loving Annabelle, c’est le combat de l’amour contre la cuirasse ; l’amour est vainqueur et le résultat aboutit à la prison. Vous saisissez ? Dans Inception ou Paprika, on vous propose d’admettre que vous entrez dans le rêve d’une autre personne ; dans le dernier clip de Eminem et Rihanna, la révolte de la jeune fille est finalement, à la dernière image, un rêve. Mais quel est donc le plaisir irrésolu de tous, ici bas, dans ce monde d’exploitation répondant au slogan « faire du fric » de la vie, et dont on rêve éveillé ? L’amour et tout ce qu’on nous montre est une copie de ce monde en pire ! La première des choses que vous rencontreriez si vous entriez dans le rêve d’une autre personne, est son amour et la manière dont cette personne a résolu cet amour, rien d’autre ; et c’est bien ce qu’on veut faire oublier en vous faisant, éveillé, rêver à autres choses.

mardi, 10 août 2010

Le corps de l'os

Je viens de visionner, pour la quatrième fois, le dernier tube de Eminem et de Rihanna. D’abord, la manière de chacun des deux sexes est très bien défini : respect des proportions physiques et des conventions sociales, ressenti d’une cage que jouent les rôles conventionnels dans la relation entre les sexes et de vouloir faire autre chose, les acteurs sont beaux et la relation semble normale.

J’ai trouvé les paroles sur le web.

Ca commence par la fille, mais pas celle du film, celle du texte, la chanteuse. Elle part sur une mélodie au tempo de 90 à la noire, avec deux ou trois croches par-ci par-là et appuyée par un piano quasi-arpège et discret. C’est une mélodie qui part bien dans les aigus sur le temps fort (2 et 4) et c’est super entraînant et très féminin. Puis vient le mec en marcel : même tempo (c’est de l’à-peu-près car la musique a du rubato) mais à la double croche, scandé par le rythme des mots en mélopée et avec le temps fort sur la levée des temps (le propre du rap, quoi). Ce qui fait que lorsque revient à nouveau en refrain la mélodie féminine et qu’on garde les mêmes temps forts du mec sur le même rythme, un frisson vous prend la tête et le cou et peut même descendre dans le dos. J’adore tant ça se complémente.

On voit très bien la diction de la chanteuse et, à la prononciation du mot « hurts » (blesser), le mouvement de la lèvre qui se redresse pour montrer des dents signifiant « ce bousculement que tu m’obliges sans douceur alors que tu voudrais que je l’approuve totalement, me heurte, je suis bien marrie de devoir le supporter » et elle répète la mimique au dernier refrain. Ca n’a pas l’air facile entre tous les deux.

On comprend vite au ton du gars qu’il y a quelque chose qui cloche pas. Le gars est au lit avec la fille, en position ventre contre dos. Ils dorment. On voit ensuite la fille assise en tailleur, jouer du regard avec le feu qu’elle porte dans ses mains. La fille se réveille et remarque sa main dans la main du gars (tatouage). Hic. Geste de colère (« Je me suis faite encore avoir ! Zut ! ») Le garc pige pas. Il chante dans un champ d’herbes sèches, l’air déterminé à vouloir s’expliquer coûte que coûte, à vouloir se faire comprendre. Et d’ailleurs, dans le texte, il semble bien qu’il s’agisse d’une explication. Il est fou amoureux de la fille qui ne veut pas de ses manières. Mais lui, ne sait pas comment faire autrement, il a pas appris et la chanteuse d’admettre alors :

Just gonna stand there and watch me burn
Well that’s allright because I like the way it hurts
Just gonna stand there and hear me cry
Well that’s allright because I love the way you lie
I love the way you lie

(en mauvais modern français, ça donnerait un truc dans le genre :
Je te demande de rester là où tu es et de me regarder embrasée
Rien d’autre, parce que c’est la manière dont j’affectionne cette brûlure
Je te demande de rester là où tu es et de m’écouter crier
Il en est ainsi parce que j’aime la manière dont tu mens
J’aime comme tu mens.)

La pilule qui contient le fait de se faire berner et d’aimer cela, a du mal à passer ! « Oui, mais… tu comprends, je ne peux pas m’expliquer autrement, c’est ma manière de faire, le comment je vis et même l’unique voie que j’ai de vivre. » dit le gars en frappant dans les murs. Bien sûr, des moments heureux existent, pour la fille, dans de telles conditions, mais est-ce pérenne ou même vivable en dehors de ces moments agréables ?

La fille doit supporter le mec… et finit par le faire, faute de mieux. La violence masculine qui n’est en rien et nulle part obligatoire, due à sa force physique accompagnée d’un volume musculaire plus importante que celle féminine, trouverait une justification dans sa propre violence et non pas dans sa tendresse. Ici, précisément, il s’agit d’affirmer que la tendresse est violente chez l’homme et qu’il n’y a rien à faire : il a ça dans le sang. C’est l’adrénaline inhérente aux androgènes, à la testostérone, aux couilles. Ce n’est pas que la violence ne doit pas exister quelque part, mais ici elle est présentée comme indispensable à la relation pour que le masculin puisse y trouver son compte. Il faut être raide si on veut pénétrer et cette raideur est encore et toujours ressentie comme une raideur musculaire alors que le corps caverneux et le corps spongieux ne sont en rien des muscles : il n’y a rien de musculaire dans le pénis, sa raideur n’est en rien due à de la musculature : pas besoin de faire de l’haltérophilie pour bander, mon pote ! C’est un mythe. Même les filles s’y trompent.

La naissance physique de ce mythe de la musculature comme seule source de raideur est la violence. C’est la violence qui excite et cette excitation est une ouverture du système artériel du bassin réagissant par la mise en fonction du système nerveux para-sympathique dominant le système nerveux sympathique. Il n’y a de musculaire que l’expression de la violence dans le reste du corps, mais dans le pénis, du muscle que tchique : que du SANG et du nerf à la pression artérielle augmentée par la violence, l’adrénaline de la violence.

Ainsi, si la copulation est liée à la violence, ce n’est, dans ce cas, que parce que le masculin, du fait de cette violence augmentant substantiellement la pression artérielle de l’ensemble du corps par le rapetissement du système veineux, peut, alors, bander… du fait d’avoir égaré la tendresse. Car, la tendresse, elle aussi, agit sur le système nerveux para-sympathique, avec une montée de tension plus douce et une coordination à l’autre plus concordante et sans violence remarquable aux deux personnes en présence.

Cette conformation du pénis sans muscle aucun est si universelle dans les formes que dans les temps, se trouve confirmée dans ce fait que certains animaux (les poissons et les reptiles, par exemple) ont besoin d’un os spécial à la place d’un muscle que l’on trouve chez les mammifère, à la base du pénis, destiné à faciliter l’intromission ; mais, d’expérience, ce muscle serait-il absent que rien n’empêcherait pour autant cette intromission : le muscle n’a rien à voir avec la force sexuelle attribuée au pénis, c’est un leurre, les filles !

D’ailleurs on le voit bien dans ce clip : la seule mélodie est du féminin, la mélopée masculine est martelée, incisée, puissante, musculaire autant que son comportement et notre héros se sent bien diminué de ne pouvoir plus s’exprimer hors de sa musculation. Les relations dans nos banlieues sont de cet ordre : la force masculine avec les grosses chaînes et les autres gros trucs, contre la douceur de la féminité perchée, la raie des fesses moulées, sur des talons qui l’empêche de courir, prisonnière de son rôle. Pour la femme, la force masculine est un jeu, un jeu sérieux. Elle en est réduite à l’objet : voilée ou dévoilée.

Dans les civilisations où son rôle social, à la femme, est prédominant, le masculin qui a le plus de succès est celui qui est pourvu du plus d’humour, et non pas de muscle. La force masculine sert, normalement, de défense ; elle a peu d’usage autrement : la chasse, c’est affaire de ruse et de finesse. Elle est devenue nécessaire avec l’arrivée du labourage. Auparavant, c’était la femme qui s’occupait du jardin. Puis est venu l’observation du retour du grain à l’endroit où on l’a trouvé l’année précédente pour comprendre qu’on pouvait provoquer, comme dans le jardinage, ce retour en un endroit choisi. Là où la seule force féminine suffisait, ici la force masculine est devenue nécessaire, car semer c’est bien, mais il faut protéger la graine des autres animaux et donc l’enfouir, la cacher. Et retourner la terre ce n’est pas facile. Ce n’est qu’au fur et à mesure que la technique culturale s’est améliorée que ce travail a été laissé aux moins violents, car les plus musculeux pouvait s’en dispenser d’une part du fait du rendement nouveau apporté par cette technique et d’autre part en l’imposant aux plus faibles. Et comme l'importance alimentaire de l'apport de l'agriculture se faisait de plus en plus sentir, de même qu'on parle de "chasseurs-cueilleuses" par ordre d'importance (alors qu'en réalité, l'apport de nourriture animale a toujours été nettement moindre que l'apport féminin de la cueuillette), on parle de prépondérance du cultivateur et plus des jardineuses.

D’autant que les plus rusés avaient profité de la « faiblesse » féminine pour usurper ses pouvoirs « de fécondité » en devenant son intermédiaire dans la prêtrise et ainsi dominer, par la violence, cette femme. C’est que les hommes avaient la vie menée dure, dans cet intercalaire entre le paléo- et le néo-lithique. Ils étaient sacrifiés à la vie (on ne savait encore rien de leur « utilité » dans la reproduction) pour le retour du foisonnement de la vie. Mais enfin, ils réussirent à supplanter le féminin et ainsi est né le patriarcat.

A ce sujet, j’ai un petit mot sur l’énigme soulevée par Sigmund Freud à propos du « meurtre du père ». Cette expression n’est valable que dans la société patriarcale, car ça ne s’est pas tout à fait passé comme il l’a compris, avec Œdipe. Il faut se replonger dans le contexte où le père est un père social et en rien un père géniteur, car ce n’est que tardivement que l’on remonte à cette connaissance de la relation entre le coït et la reproduction de l’espèce, avec ses aberrations qui n’ont été remises en cause qu’au xixème siècle. Il ne s’agira donc pas du meurtre du « père » mais de celui du mari de la mère. Et cette constatation ouvre un peu la fenêtre du passé. Pourquoi donc, le fils tuerait-il le mari de sa mère ?

Il n’a pas le droit de copuler avec elle, ni avec ses sœurs (même si les légendes relatives à la naissance du monde le montrent : sans doute que par logique, le fait d’être alors frère et sœur parce que sortis tous deux de la matrice du temps, autorise, cette fois-là, cet « inceste » encore pratiqué par les reines dans la société égyptienne assez tardivement) car il est de son sang, du sang de la même lignée de ses ancêtres : ses ancêtres sont ceux de sa mère et tous ses ancêtres sont féminins, bien sûr. Faut bien piger ça, sinon, ça va grincer.

La femme est la détentrice de la lignée d’un groupe humain, l’homme en est le soutien, rien de plus. Il n’était pas concevable, à l’époque, de se défaire de l’homme, du sexe masculin (comment baiser sinon, comment pratiquer l’amour si bon ?) à la différence des rancœurs d’aujourd’hui. Mais pour autant, l’utilité de l’homme était le plaisir d’être ENSEMBLE, chacun dans ses attributions. C’est de ce lointain que descendent encore nos attributions sexuelles. Le patriarcat voudrait bien l’ignorer, mais je suis là, avec d’autres, qui veille à ce que cette lumière, avec d’autres, reste bien brillante, hors de l’obturant champ wikipédien. Il est probable que ce « meurtre » ne soit perpétré qu’uniquement vis-à-vis du roi, du mari de la reine. La reine ne peut avoir qu’un seul homme et l’homme n’a d’utilité que pratique, avec son éjaculation humectante et sa détumescence. De plus, ce con, il éjacule à n’importe quoi : on le pend, il éjacule ; on le dépèce, il éjacule ; on le bat, il éjacule ; etc. Ce cycle d’érection et de détumescence n’est pas toujours bien en adéquation avec son moment.

Le fils n’a pas pour objet de remplacer le mari de sa mère, tel que l’énonce Freud : ici le mari de sa mère n’est pas son père génétique, mais son père social. C’est loin d’être identique. Pour exemple : l’inceste, chez nous tabou, du père et de la fille, n’a pas lieu d’être entre la fille de sa femme, au mari, puisqu’il n’est pas de sa lignée, à elle, à la fille. Et, effectivement, s’il n’est pas toléré, il est admis, dans les sociétés à filiation matrilinéaire. Par contre, chez nous où le père est le « chef » de lignée, cet inceste est absolument tabou, mais pas vis-à-vis de sa nièce : la fille de sa sœur, comme deux-trois mariages de rois en France, car elle n’est pas de sa lignée mais de celle du mari de sa sœur. J’avais trouvé un livre qui établissait ainsi une gradation du tabou de l’inceste en fonction de la forme de la lignée – et je l’ai établi en fonction de l’héritage : on hérite pas des mêmes choses ici que là ! Et la constatation de cette auteure a été de dire que là où la femme est le plus libre, c’est dans une société où le frère et le mari ont exactement le même pouvoir social sur elle et comme ils sont incapables de s’entendre, elle y fait ce qu’elle veut !

C'est que face à ce sentiment d'inutilité, lorsque le masculin est en-dehors de la relation amoureuse profonde, l'homme a besoin de se sentir comme indispensable: il émet le désir de protéger et il se met à protéger. L'amour de la femme n'est pourtant pas si compliqué, du moment où il se donne. Elle garde ce qui lui semble opportun et n'hésite pas à rejeter ce qui lui empêche d'accéder à cet opportun avec la satisfaction de la confiance... même si le résultat n'est pas toujours à la hauteur de ses attentes. Cette protection du masculin ne correspond donc pas tout à fait à ses attentes, sinon que la confiance sans faille en elle, au moment opportun. Mais, en dehors de l'amour profond, il y a là encore une faille dambigüité que toutes les confiances du monde ne pourront pas dissoudre. Et, finalement, la paternité répond à cette incertitude par des chaînes en voulant se donner l'importance d'une possession qu'il pourra donner en héritage. Si l'enfant appartient encore à ses parents, c'est que chez ces parents, un est propriétaire de l'autre, par ordre hiérarchique : ce désir de détenir ne correspond en rien au plaisir de donner.

Ce plaisir (pas désir : plaisir) de son contact de chair, cette gigantesque et savoureuse douceur, la grâce qui y répond et l'attente que l'on vit d'y correspondre, de sentir le proche de la chaleur et de la sensation qui vient, attentives et perdues de soi : le baiser d'amour ! qui unit si fort les corps à l'âme et cheville deux âmes à un corps ; l'intime contact intime et sa force profonde. Il n'y a pas de technique pour aimer, il n'y a que la sensation d'aimer qui se vérifie en elle, en soi, en nous. C'est le ciment de la confiance en soi et en la vie, en l'autre. C'est précisément ce que ne peut supporter la violence et qu'elle détruit par tous ses moyens de malade. Elle nomme l'amour de loin, le nez et les lèvres pincés pour n'en être pas submergée par la vague.

Nous ne sommes pas encore sortis de ce truc selon lequel la femme devait être protégée par un homme, frère ou mari. Et je pense, hélas, que nous sommes loin d’en être sortis ! Mais poursuivons l’Histoire, la nôtre. Pour ce que j’en sais, c’est que le mari de la reine devait renaître chaque printemps, après avoir été enfoui dans la terre, avoir traversé les Enfers, goûté à la pomme d’or et réapparaître avec l’étoile du printemps : suivant la latitude ce sera Vénus ou Sirius. Et pour revenir des Enfers de la froidure de l’hivers, il faut y être enterré. A mon avis, c’est le Fils de la Reine qui devait s’en charger : le Fils tuait le Mari de sa Mère pour que celui-ci ressuscite au printemps, donnant matérialité et visibilité au désir de la vie jaillissante. Bien évidemment, sera choisi pour donner réalité à ce phénomène, un autre beau jeune-homme qui deviendra le Mari de la Reine, le roi. Légitimement, dans une société à filiation matrilinéaire, le fils n'a fait que protéger la mère et sa lignée en tuant son mari violent.

Le complexe d'Œdipe interprété par S. Freud demandait cette précision. Ce n'est que dans le contexte présent, et sans doute pour une raison sensiblement identique, que le fils veut se "substituer" au père-mari dont l'autorité est une violence socialisée, car ce fils est détenteur d'un amour incommensurablement plus fort que celui de son père pour sa mère, selon lui, car vécu. Régler ce problème est facile : dire à l'enfant qu'il peut aller voir ailleurs s'il en est de même et pour se faire, de l'exprimer, cet amour, aussi ailleurs. C'est ce qu'autorise une société à filiation matrilinéaire (où le père-mari est rarement violent) mais interdit de nos jours, car l'expression sexuée est dissociée de l'amour et inversement. J'en parlerai ailleurs, sans doute.

Le différé et l’indirect, le propre de l’humain comparé à l’ensemble des autres animaux et qui est le seul élément en quoi il diffère, se manifestent premièrement dans la mémoire et sa coagulation : les mots ou images verbales. Le siège de la mémoire n’est pas la cervelle, enfin… uniquement la cervelle, la mémoire se situe dans l’ensemble du corps et de ses organes, muscles, nerfs, sang, lymphe, etc. Souvenez-vous de cette fois-ci où vous êtes piqué avec cette aiguille, ou bien de cette peur effroyable que vous avez ressenti à la vue de cette scène terrible : la mémoire est dans le corps, le cerveau lui donne la substance du mot, de l’image verbale et cette image verbale devient à son tour motrice de mots, d’autres images verbales : c’est le différé et l’indirect. Il lui arrive aussi de créer des mots, des images de mémoire pour se cacher à elle-même, cacher ses hontes ou des douleurs trop fortes.

De même que l’invention de l’agriculture repose sur une série de constatations naturelles ayant trouvé une logique applicable par une technologie évolutive, de même l’emprise du monde sur l’esprit humain, avec ses craintes reposant sur des images verbales, intérieures, des ombres et la peur pour sa vie, a besoin de lumière, d’autres mots, pour se rassurer en « s’accaparant » le monde, comme le disent les philosophes et les capitalos, par les mots. Ainsi s’instaure une autorité sur le monde dont la manipulation est plus ou moins adroitement socialisée et où la force musculaire n’a plus le répondant qu’on en attendrait. C’est compliqué tout ça.

La violence contre la femme est née lorsque ce mâle s’est rebellé contre ce « sacrifice » du mâle. Cette rebellion, cette violence a été aussi une violence sexuelle. C’est la femme qui a fait l’immédiate relation entre la grossesse et cette violence de l’homme sur elle, car elle y perd sa régulation des naissances. De nos jours, c’est encore la femme qui s’occupe de ses affaires contre l’homme qui veut l’asservir par la grossesse. C’est de cette manière qu’est née, en Mésopotamie, peu avant la naissance de l’écriture, du Verbe, la conscience de la relation entre la grossesse et la paternité ; et guère plus longtemps après, celle de la religion monodéiste, dans une région un peu plus au sud. A notre niveau, s’il faut quarante générations pour faire une nouvelle « race » stable, je crois qu’il en faudra encore quelques-unes de la notre pour qu’une telle empreinte disparaisse définitivement… si notre bêtise nous en laisse le temps, bien sûr.

S’il y a mensonge, on le voit bien, il est bipartite. Le féminin et le masculin ont toutes les occasions de se mentir et la femme d’en faire, en CE moment, les frais. C’est bien que ce clip de Rihanna et de Eminem se soit fait à eux deux. Elle reste seulement la Femme au cheveux rouge et aux lèvres pulpeuses, au corps de déesse et lui, l’homme qui se bat contre l’ombre d’elle, blanche et fluette. Ca fleure bon !

dimanche, 08 août 2010

Intime solitude

Pas d’idée, c’est la cague. Tant de choses à dire, pourtant, mais radio : nada. Le sexe, les femmes, le travail, le pouvoir : pfeu ! Rien que de l’ennui, finalement. En fait, tout le monde se moque de tout le monde, d’en dire plus serait rajouter à l’ennui l’ennui, sans plus. Et il n’est vraiment pas facile de sortir de l’ordinaire où on trouve de tout pour vous en soustraire. Des films, des romans, des histoires, des malheurs à la télé et le petit qui chope la varicelle ; d’autant qu’il n’y a plus de pain et que c’est dimanche soir et que le congélo est en dégivrage.

Sortir de l’ennui est un problème qui va jusqu’à l’ennui quelque fois. C’est ennuyant, les problèmes : ça apporte souvent des ennuis. Mais je me trompe : ce n’est pas de celui-là dont je voulais parlé, je voulais de l’autre ennui-là, celui où on ne trouve rien à faire, pas même à respirer tant il vous ennuie. Passion : que tchique ! Pas de sang mouvant et brûlant qui circule dans les veines et le cœur est sans cœur, lui-aussi : il vous lâche, le lâche, dans un moment si prégnant où vous auriez tant besoin de sa pulsation, de son tonus, de son don. Ha ! donner son cœur ! et la vie s’allège comme une plume sèche sur un gazon ras à cette caresse aérienne qui passait par-là. Et il y a pire, peut-être, que le don du cœur : c’est l’absence de l’intime. Rien que d’y penser la peur me saisit dans un mouvement descendant où le sang qui réchauffe mes mains s’en va vers je ne sais où des pieds. La présence de l’intime. Voilà un sujet intéressant, mais de discuter de son absence, c’est beaucoup plus flippant ! Il n’y a rien de palpable, de tangible, de chaud, de son, d’odeur et de goût : il n’y a rien. Et ce rien est terrible, car rien ne le peut définir que sa constatation qui passe immanquablement par la résonance de l’intellect branché, dans ce cas, en direct sur l’émetteur de la crainte qui trouve, précisément, sa justification dans cette absence. Terrible, non ? La raisonnance de l’intime absent.

Glurp.

Quand j’étais jeune, vers 20 ans, j’avais un don : je savais ne pas flipper, j’avais acquis, je ne sais comment, le pouvoir de ne pas craindre et de ne pas craindre, non plus, la peur. C’est un don magnifique et je l’aimais beaucoup. Même si je ne puis retrouver précisément les circonstance de sa perte, j’en reconnais encore, dans une ou deux de mes réactions, des traces qui, pour aussi infimes qu’elles transparaissent dans le cours du mouvement du temps (et conséquemment par son côté éphémère) sa présence ne se laisse pas de se faire reconnaître. Et j’adore. Isidore veut dire « cadeau d’Isis ». Isis est cette déesse égyptienne qui, avant de copuler avec son frère, l’a retrouvé en douze morceaux, je crois et le treizième étant son pénis (ce qui signifie que nous sommes dans une société matriarcale : 13 mois de 28 jours + un jour ou deux) pour la féconder (ce qui signifie que nous sommes alors dans une société patriarcale). Je me demande bien quel pourrait être ce « cadeau d’Isis ». Et à destination de qui. Isis en fait est déjà le résultat d’une deuxième transformation du monde : il n’était pas, ensuite il a été et Isis en est la conséquence. Comme dans toutes les société à filiation matrilinéaire, le garçon vient après. Du fait qu’on ne sait d’où il provient, sinon que de ce qui a produit Isis, il vient de la même matrice, il devient inévitablement le frère d’Isis… et en conséquence, elle, sa sœur. La société patriarcale retient qu’elle a été sa sœur et beaucoup moins que lui est son frère. Je dis cela, juste pour situer d’où est le plaisir : c’est toujours intéressant de décrire la topologie affective d’un lieu, afin de mieux le saisir dans un conte qui relate l’origine de l’univers et de l’humain.

Mais pour autant que je possède ce don, dont je parlais précédemment, je me demande parfois comment je fais pour survivre avec si peu d’intime. Et il y a tant de bruits autour de moi ! Et essentiellement des bruits de gens qui travaillent. Les gens qui travaillent sont toujours bruyants, ils font toujours du bruit. Je n’ai jamais compris pourquoi, enfin… l’intérêt qu’ils y trouvent, à être bruyant au travail. Il faut qu’ils se fassent remarquer, ils ne peuvent pas laisser les autres tranquilles : ils travaillent ! Le travail c’est légitime, et oui ! Et quand on travaille, on travaille : rien d’autre que du travail, le reste, macache. L’environnement : walou – vous savez, les PCB, la dioxine, l’agent orange, le Roundup, la radio-activité, les nitrates, les produits issus du pétrole relativement à la quantité extraite, traitée et non-traitée (pollution directe : pipelines, marée noire, etc.) que je ne saurait calculer ce soir, à moins d’y vouloir passer 364 autres ; et de fait, tout est permis ! Le travail tue tout : l’amour, la joie, la vie, le rire, la paresse, l’intelligence en la rapetissant tant que la cervelle d’un alcoolique est encore plus volumineuse, et l’intimité, bien sûr. Le premier meurtrier de l’intime, c’est l’travail. Tout le monde le sait et tout le monde l’oublie pour aller au travail. On le sait, mais on le fait. L’intime ça rapporte pas un rond, n’est-ce pas ? C’est pas lui qui va nous faire bouffer ! Et qui va s’occuper des enfants, qui va les nourrir, les habiller, les protéger ? L’argent ! Et l’argent va s’acquérir en vendant sa force de travail contre la perte de l’intime. Le cercle est bouclé.

J’ai lu, enfin, tourné des pages parce que c’était un peu longuet et vide de sens, d'un bouquin qui parle, entre les lignes, des moyens de l’aliénation de masse de l’aliénation des masses : cinoch, zique, bouquins. C’est tout un monde, bien ficelé avec de l’argent, bien relié avec des histoires à dormir debout dans une ambiance de boîte. Et une opiniâtre détermination qui emporte tout et dont on ne sait d’où elle sort : il faut faire de l’argent. Et la question que je me posais était de savoir comment j’allais bien pouvoir comprendre l’agencement de la trame et du fil de ce baise-gueule de façon à pouvoir le décrire de sorte que mes contemporains s’en rendent suffisamment compte pour que, non pas que mon action soit efficace – ce dont je me contrefous dès le moment où ça marche –, mais que, finalement, ils se déterminent à y mettre fin. J’avoue que j’ai tant l’esprit un peu confus, en ce moment – et j’admettais que c’était là un prétexte à revivigoration – que je m’ai pas réussi dans ce projet. Je pose cela, avec la conscience qui tire la langue après avoir humecté mon crayon, sur l’ardoise de l’absence d’intime… au cas où ! Mais, je ne suis peut-être pas aussi intelligent que je le voudrais, alors que demande pardon.

Ce don, dont je parlais tout à l’heure, je l’aime beaucoup : on peut jouer avec. Pas tous les jours bien sûr ; non : de temps à autre. Son usage est, pour moi, un plaisir des dieux. Le hic, c’est que je trouve très peu de personnes pour jouer avec. Beaucoup très peu, même. Le plaisir de soulever le plaisir. Vous savez… vous voyez un plaisir, par terre. Alors vous vous penchez et faisant un coupe d’accueil de vos deux mains, vous soulevez ce plaisir. On l’entend le plaisir dans une voix, on le voit le vrai plaisir sur un visage : il rayonne, il pétille dans les yeux de l’autre : c’est une merveille. Bien sûr, pour le voir, il faut l’avoir face à soi, du regard. Mais on peut le saisir dans une musique différée, aussi. Je me demande parfois, faute de n’en percevoir pas d’autres sensibles qui peuvent être limités par moi, si ce n’est pas le seul plaisir qui puisse de saisir différé. Non… il y a les images, aussi.

Alors je me demandais, toujours à travers les lignes de ce livre que j’ai épluché aujourd’hui, si le rapport à la réalité qu’implique cette organisation de l’abrutissement des gens ne tenait pas aux gens eux-mêmes ; je veux dire, si ce n’est pas inhérent au genre humain d’être si con et que j’en serais alors, sine qua non mon désarroi, un extra-terrestre, une erreur de la nature dont la conformité n’a plus rien à voir avec mes frères et mes sœurs. Et je comprends ainsi que je sois seul, cela expliquant ceci. Car il est bien vrai que j’ai parfois beaucoup de mal à supporter mes frères et sœurs : ils m’agacent proprement dans une mesure difficilement quantifiable tant le volume, pourtant sec, de son existence, n’équivaut pas à celui du cœur d’un ivrogne (c’est la même, mais la signification change) plein de gras autour et proche de la rupture à celui de ma détresse personnelle.

L’incohérence, cette forme de la formulation mal formulée, ne cache pas obligatoirement quelque chose, elle ne sait souvent pas dire ce qu’elle voudrait dire plus simplement. Et lorsqu’on la détecte, on peut aussi détecter ce qu’elle essaye de dire, en le lui demandant, souvent. Mais ce monde est cohérent et bien cimenté. De sorte qu’on doive possiblement revenir sur son jugement et dire que je suis identique aux autres et qu’il me faut, moi, comprendre, en prenant tout sur moi, que je ne puisse m’y intégrer. Et ça demande quelques explications qui ne sont pas toujours possibles !

Le plaisir n’est pas facile, dans ces conditions mal comprises, à trouver. On ne peut, dit le proverbe, être au four et au moulin. Faut choisir : ou l’un ou l’autre. « Une cervelle, deux muscles, dit-il, en se claquant des deux mains les biceps et le front, successivement ». Et non, ce n’est pas facile et j’ai toujours, dans la plus grande mesure de mon possible, opté pour la facilité : travail ? Ciao ! Je me souviens du matin du sur-lendemain de notre rencontre avec Isabelle : je devais aller au travail, le matin, ou bien rester avec elle. Je suis resté avec elle, bien sûr et je me suis fait viré, pour absentéisme, mais contre la douceur de sa peau, quel bonheur !

Il y a donc toute une organisation autour du travail. Des gens ont râlé suffisamment pour que son bruit reçoive une légère réglementation, mais elle n’est pas aisée à faire appliquée : le travail reçoit un prestige que le reste des choses n’a pas et que malgré leur nombre (dont on peut trouver une proportion logique dans la comparaison de la fortune cumulée des 155 personnes les plus riches à celle cumulée à ce milliard et demi de personnes les plus pauvres) ce reste incommensurable n’en a rien reçu, ne serait-ce qu’une équivalence. Le prestige est parcimonieux, il est très radin et sélectionne ses attributions avec préciosité, intérêt et capital.

La question que je me pose est : comment les gens peuvent-ils être si soustraits de la réalité, de la leur, par des images ; quel est le processus de ce processus qui les immunisent contre leur réalité ? Pense-vous que c’est par modestie que je ne propose pas d’en partager les connaissances, du fait de me croire seul suffisamment intelligent pour résoudre une telle équation ? Non : je pense sincèrement que le partage, entre nous, de cette question pour en tenter de résoudre l’énigme, est très important, crucial et indispensable. S’agit d’en causer les modalités. Faut passer un contrat, une convention et une charte entre nous pour que cela puisse être possible, sinon se réaliser.

Si l’humain contient en soi, comme don, l’hypnotisme de l’image, il doit faire avec et cesser de se faire des morales qu’il ne pourra jamais atteindre, car elles ne font tout simplement pas partie de ses possibles. Il faut reconsidérer les religions, toutes les religions dans cette direction, sinon elles sont un cul-de-sac, pour rester propre. Tout ce que veulent atteindre les religions est hors-propos, hors nous : pas la peine de se mettre en peine pour l’atteindre. Et il faut l’ADMETTRE ! Je crois que c’est là le plus difficile. Admettre que l’on est pas ce qu’on se voit d’idéal est du genre à coincer aux entournures. Pourtant c’est logique : comment un idéal peut-il n’être pas une hypnose ? Ou alors, bien que nous puissions avoir une définition assez proche de l’hypnose, nous n’avons pas la même définition de l’idéal. Et c’est quoi un « idéal » ? Humm ? Un idéal c’est une idée, une pensée repensée, un « concept » dirait Hegel, « l’idée d’une idée », c’est une idée, dis-je, de ce qu’on voudrait pouvoir être (le « pouvoir vouloir être » - ce que je pourrais vouloir être - est plus terre à terre et n’entre pas en ligne de compte). Un idéal est quelque chose qu’on ne peut pas atteindre, soi. Alors on va le chercher chez un/e autre. Et comme, de toutes façons, il ne peut pas vivre chez un autre, cet idéal va chercher à gommer ce qui empêcherait qu’il se manifeste. L’hypnose, c’est ce coup de gomme, pour moi.

Revenir à l’état de grâce du présent procure de l’ivresse que d’aucuns n’hésitent à nommer plaisir. Alors, parfois, lorsque j’utilisais ce don dont je parlais précédemment, je me faisais figure de manipulateur : « les gens avaient du plaisir contre leur gré » me disais-je, « tu n’as pas le droit de faire cela ! » Et je me mettais à avoir peur. Mais il faut du temps pour se l’apercevoir et se l’admettre, le monde humain est continuellement de cet ordre : la manipulation de l’autre et de soi, dans les cas plus avancés. Il y a un mot pour dire le contraire de « manipulation » qui est « sincérité », mais je n’ai pas eu beaucoup l’occasion de l’utiliser : il doit être bien noir, encore, dans les pages du dictionnaire : peu de doigts l’ont caressé.

Le problème de la sincérité est qu’elle est sans détour, alors que le différé et l’indirect qui sont propres à l’humain demandent immanquablement ce détour qui déqualifie la sincérité. C’est quelque chose, là, qui m’échappe : c’est pour moi un grave problème. C’est un grave problème car, si il existe, ce problème pour moi, j’ai tout faux : tout s’écroule à la fois, les temps et les lieux, les joies et les peines, les pierres et les tuiles. Je me joue de vous, n’est-ce pas ? Tendez la seconde. Le différé et l’indirect qui caractérise l’action de l’humain sur le monde, en tout et partout, n’est pas dissociable de la sincérité : ils peuvent contenir la sincérité, c’est un choix ou plutôt la décision que cela n’en soit pas autrement. Sinon ça ne marche pas ! Les uns perdent de leur sens et l’autre est bafouée !

Et mon système tient car il invente, voyez la perversité, le concept de « Spectacle » qu’un autre a défini très bien, mais sans notoire référence à l’existence de la sexuation et de ses implications dans le monde en général, global… enfin.. comme moteur énergétique, bien sûr, comme pompe à pouvoir, comme bulldozer dont le conducteur répond à la loi hébraïque en outrepassant son dissentiment affectif personnel, comme étincelle donnant naissance à tout, donc au spectacle, sans que je veuille donner plus d’importance à mon idée que les gens vivent sans sa perception, à cette sexuation, sans elle et que l’on peut trouver ici une « raison » de cette énergie qui les fait quand même agir. Compliqué, tout ça.

Le renversement de la vie en non-vie ; l’organisation de la marchandise et de sa gestion ; le lien social et le travail. Rien ne fait défaut dans la théorie du spectacle de Guy Debord qui a affirmé avoir beaucoup bu, plus qu’il n’a lu, et je le crois. L’organisation de la frustration. Dixit un spectacleux : « notre métier est d’organiser le désir » et non pas le plaisir : c’est là, dans le désir pour le désir, que la sincérité est dissociée du différé et de l’indirect : un monde où il faut payer de sa vie pour voir et perdre le moment historique et la mémoire de ce que l'on est. Et, pour revenir à ce don, dont je parlais précédemment, une de ses caractéristiques était qu’il remettait là ce qui est là. Qu’est-ce que les gens ont peur du ! Combien ils en sont effrayés ! L’idéal et le … ils le vivent pourtant, ce .

Donc, de loin, dans ce livre que j’ai haché cet après midi, j’ai entrevu que l’hypnose des masses est tributaire de l’absence de leur sens de l’être-là, l’absence de l’intime, indispensable pour devenir. Une pédagogie qui s’est faite peut être défaite. La solution est immanquable : il faut arrêter de travailler pour la découvrir. Arrangeons-nous ! car je ne pourrai le faire seul.