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mardi, 14 septembre 2010

La plaie de l'Idéal

Je pense que, du fait que l’enfant se rêve comme surpuissance sur le monde par cela-même que sa pensée se voudrait d'une surpuissance du même ordre, il se forme comme une structure de pensée à partir de laquelle il voudrait se retrouver face à l'impuissance – qui n'est que relative à ses ambitions irréfléchies – ; et il s'avoue ainsi indirectement dans une disposition, que je n’hésite pas à nommer « Idéal »... et cet idéal est un plaie.

J'ai longtemps cru que l'Homme est bon, mais c'est l'humain qui est bon : l'homme ou la femme sont bons individuellement, assez souvent, mais collectivement, ils sont très loin de mon Idéal. Ce sera donc mon Idéal qui devra perdre sa majuscule ! D'ailleurs, la grande majorité de ses oeuvres d'art sont des Idéals : corps parfait de Michel Ange, détermination optimale dans les sculptures soviétiques, maoïstes ou coréennes, le stakanoviste moderne qu'incarne le cadre, etc. toutes les allégories veulent montrer et montrent un Idéal, qui du poète, qui du dirigeant gouvernemental, qui du « père » d'une pensée, qui du sexe le plus performant (dont il est fait un usage irréfrénément stakanoviste), qui de la voiture la plus belle (qui cherchera à correspondre le plus exactement possible à un caractère adaptatif singulier et donc, dans la mesure de ce caractère, à une fortune, une manière de l'acquérir – qui est toujours d’appauvrir ses congénères ), qui de la nana la plus belle, la plus attractive sexuellement, la plus séduisante, la plus sexy-bandante-suceuse-baiseuse, etc. L'Idéal est la plaie de l'humain.

Ainsi, j'organise ma vie selon cet Idéal, qui n'a rien à voir avec la réalité. C'est peut-être une idée que je me fais de moi d'après la perception que j'ai de moi et qui doit par ailleurs correspondre à ma manière de vivre, tout en étant persuadé que  j'en suis loin, personnellement, que c'est quelque chose que je voudrais atteindre... et corrélativement où je ne suis pas présentement. Non pas que je n'essaie pas d'y parvenir, ou que je ne sache pas que je ne pourrai jamais L'atteindre, mais que je refuse de penser que je ne pourrai jamais y arriver, que je n'en suis pas capable... et les autres tout autant. Je ne suis pas assez idiot pour penser que je doive demander aux autres ce que je ne suis pas capable de réaliser moi-même, pourtant, cette image filigranique macule le fond de ma manière de voir le monde. Penser que l'Homme (je dis bien homme, pas avec un « F » majuscule), lui qui a massacré, violé, pillé, et le reste, est bon, n'est plus un filigrane, mais un voile d'une opacité d'au moins 25 % porté devant ma vision de ce monde et de la perception que j'en ai. L'humain est bon, sans doute, mais individuellement ; dès qu'il est en meute, il devient délirant, il lui faut un Idéal qui focalise ses actions  pour les rendre communes et, généralement, c'est assez loin de cet Idéal, affectivement aimant, socialement agissant, sexuellement parlant et intellectuellement pensant. Il arrive parfois, hélas, que cette opacité obstrue de ses 75 % la vision de certains de mes congénères, au moins, et pas obligatoirement des plus religieux.

Pour peu que cet Idéal soit appliqué dans les préceptes que reçoit l’enfance dans son grandissement, et nous, chez lui, voilà face à trois problèmes :
- l’enfant sait qu'il ne pourra jamais l'atteindre (il a raison) ;
- l'enfant veut l'atteindre (il a raison) ;
- l'enfant n'en a rien à faire (et il a raison) ;
avec pour chacune de ces trois manières d'y réagir, des conséquences très particulières. Car pour chacune de ces trois manières de réagir face à une mise en demeure devant l'Idéal, l’enseignement, lui, va réagir d'une manière qu'il trouvera toujours opportune, suivant la période d'une époque et de cette époque dans son évolution ; manière à laquelle l'enfant va lui-même réagir suivant son caractère, son être adaptatif.  Sans prendre en compte l'influence des différents Idéals de chaque personne qui le côtoie sur lui, l’enfant doit s'adapter à ce qu'on lui demande, c'est une loi biologique immédiatement liée à l'enfance, et, à mon avis, on devrait faire beaucoup plus attention à l'application des modalités de cette loi, à certains de ses critères d'application et principalement pour ce qui regarde le petit humain. (En fait, de cette loi, il n'en est rien su et ce qu'on veut en savoir l'est d'aussi loin que la galaxie Andromède, car elle détruit l'Idéal).

L'enseignement contient et l'Idéal et la manière de mettre face à lui l'enfant, c'est à dire le but à atteindre et la manière de l'atteindre, par ordre chronologique. Il est possible d'imaginer un Idéal qui laisse à l'enfance le soin de se comprendre soi-même, avec l'aide de l'adulte puisque cette loi qui remarque pour la spécifier la relation de l’enfant à l'adulte dans le cours de son grandissement, n'a pas du tout exclu la présence de cet adulte comme support vital. Ce support vital n'est pas suffisant pour certains, il faut aussi y adjoindre un Idéal dans lequel il puisse se reconnaître et justifier affectivement cette présence avec l'enfant. Ici, cet Idéal est une transformation (pour le moins) de l'amour de l'adulte pour l'enfant, ce sentiment qui le lie à lui biologiquement, du fait de sa dépendance biologique à l'adulte ; et par « dépendance biologique » j'entends l'amour, le bon soin, la protection, la nourriture et la réponse aux questions. 

C'est comme si l'Homme et la Femme avait quelque chose à justifier de son existence et qu'on veuille le faire comprendre à l'enfant qui n'en a rien à faire, par la persuasion invasive et le plus souvent par les coups et les blessures physiques (circoncision, infibulation, scarification, tatouage, coups de fibules, tortures diverses, etc.), le chantage affectif et les interdits relatifs à la sexuation (le seul fait d'être pourvu d'un des deux sexes).

Mais l'Idéal ne vient pas seulement de l'enseignement, enfin... toujours directement. Suivant le cas d'un des trois que j'ai dénombrés, l’enfant va réagir suivant ce qu'il, lui, consent de ce qui serait parfait pour lui, c’est-à-dire, au mieux de cette adaptation qu'il voudrait la plus aisée possible, la moins pourvue en anicroches, souffrances, douleurs, obstructions, buttes, interdits, etc. auxquels il doit se confronter.  Sans se mettre immédiatement en butte, comme chez l'adulte, au paradoxe de l'Idéal qui se trouve être dépourvu du perfectible puisqu'il est LE parfait, comme fait de conscience et d'infériorité que son détenteur supplante avec plus ou moins de malheurs et d'impuissance, l’enfant n'en ressent pas moins dans son fors intérieur, ce qui lui coûterait le moins des peines qu'il y a à vivre... lorsqu'elles se présentent à lui.  C'est l'Idéal qui transforme les avanies en coups du sort et résout ces avanies selon ce qu'elles ne sont pas : des coups du sort.

Et l'éducation, au lieu de bien montrer, tranquillement, que l'Idéal est une solution d'impuissant, en ce sens qu'Il manifeste un retrait quant à des solutions, des options, des choix, des positions qui ne font pas parti de Ses positions, choix, options, solutions, loin de suivre le chemin évolutif (assez semblable à sa compréhension de la mort) par l'enfant, module cette impuissance manifeste de l'Idéal à appréhender le monde selon ce qu'il ou Il est, par une autre forme d'Idéal : religion ou mécanisme, principalement. Cette éducation s 'appuie pour cela, on le sait bien, sur la satisfaction sexuelle emprisonnée dans cet Idéal. De sorte que l'on peut comprendre que son énergie, l'énergie qui lui est nécessaire pour exister et manifester son existence en pratique, provient de cette satisfaction sexué de la vie qu'Il a emprisonnée.

Arrivé à un tel stade de dépassement de la vie individuelle, personnelle comme simple élément de la vie intégré dans la vie comme général à la vie, l'amour devient un Idéal, au même titre que la haine ou la poursuite du travail, de la richesse argenteuse ou la recherche d'une énergie supra-efficiente comme le nucléaire qui n'a jamais fait ses preuves depuis tant d'années qu'il cherche à vous en remontrer sinon, précisément que dans les formes de cet emprisonnement enracinées dans le futur et dans le présent, dans ce qu'il est, ce présent futur et sa consommation de travail dont l'unité est de l'ordre, maintenant, du millier de tera-watt avec une rentabilité minimale de 70 % pour ce qui est de son gaspillage, de sa pollution, de son excédentaire, en tant que mesure d'économie, l'idéalisation de l’interdépendance de chacun de nous avec le nous, ayant pour base de mesure la mesquinerie de chacun pour le malheur de tous, l'argent.

La raideur de l'Idéal est telle que, même lorsqu'Il se spécifie comme un laisser-aller, ce laisser-aller devient une obligation. Il déforme les relations entre amoureux à tel point que des séparations sont inutiles ou d'autres absolument nécessaire et immédiates sans qu'elles s'opèrent. L'Idéal a son mot à dire sur la liberté alors qu'Il est une prison et ne voit la liberté que selon Ses critères et ne l'admet que selon Eux. L'Idéal est la plaie de l'humain, plaie affective, sociale, intellectuelle.

Je pourrais dire, à la manière d'un livre qui parle de la position sociale de la femme dans les quelques variations d'organisations humaines, qui remarquait que la femme n'a jamais été plus libre que dans les société où son frère (matriarcat) comme son mari (patriarcat) ont les mêmes pouvoirs sur elle : ne pouvant jamais s'entendre entre eux de ce qu'elle doit faire, elle fait ce qu'elle veut ; hé  bé, c'est parce qu'il y a tant d'Idéals que je puis trouver un semblant de liberté, car chacun d'eux trouve en moi une part qu'il chérit alors que je ne suis rien de tout ce qu'Il désire. Les mailles de chacun de Leur filet m'ont ici ou là rarement emprisonné – et je me débats parfois avec tant d'énergie que je préfère, comme le renard, y perdre une patte que de me voir entre Leurs mains – : il suffit de se montrer simplement sous les couleurs de la porte de sortie qu'Ils voilent, qu'Ils auto-voilent chacun à sa manière, pour qu'Ils ne vous aperçoivent plus. Car la frayeur que soulève la vue de la porte de leur liberté est telle qu'Ils trouveraient tous les moyens possibles et imaginaires pour vous tuer cette liberté et la vie qui va avec.

Je redois à Frédéric Wolff, dans son livre « Qu'est-ce que la démocratie ? » une porte de sortie formulée dans les interlignes de son ouvrage : pour nous extraire de ce marasme, il y a finalement une solution qu'il est aisé de formuler : « Nous devons organiser notre monde dans le savoir abrupte que l'humain est certes bon, individuellement, mais mauvais, collectivement ». Autrement dit, nous devons nous organiser de sorte que l'Idéal ne nous gouverne pas, ni celui-ci ni celui-là.  Nous devons nous organiser de sorte qu'il nous soit indispensable de diviser le pouvoir que le pouvoir délégué octroie dans l'accomplissement d'une tâche, à tel point que l'humain, détenteur de ce pouvoir, ne devienne jamais nocif : nous n'avons QUE cela à faire !

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