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dimanche, 31 octobre 2010

Mal de pieds

Pour se rencontrer il faut d’abord se croiser ; pour se croiser il faut se trouver au même endroit, à la même heure et sensiblement dans deux directions opposées. Ce n'est que de cet instant-là que la rencontre est possible en brisant le sens du mouvement inducteur pour en faire un mouvement déducteur à la mesure de la grandeur d’un étonnement ou d’une surprise qu’il faut avoir perçue, sinon c’est lettre indifférente ou morte. Ainsi, on croise une multitude de gens sans qu’il y ait pour autant de rencontre.

Depuis un bon bout de temps, j’ai remarqué qu’il y a un rythme dans le croisement des gens (pas la rencontre : le croisement des gens) et cela m’intrigue. Il arrive souvent de croiser des personnes alors qu’on se rend quelque part pour une course ou un rendez-vous et que lorsqu’on revient de cette course ou ce rendez-vous, on croise, en sens inverse, la même personne qui, elle, a eu aussi sa course ou son rendez-vous, et sensiblement -- à quelques dizaines de mètres près -- au même endroit. Cela arrive assez souvent, dès lors, bien sûr, où on n’a pas le nez dans le guidon de la vie quotidienne ou les yeux au-dessus de grosses poches de fatigue pour pouvoir le remarquer. Le temps, l’espace de temps entre les deux événements n’a pas de règle précise : il peut être de l’ordre de la vingtaine de minutes aux deux heures bien tassées. Mais pendant tout ce temps, il s’est passé deux choses de totalement différentes, dont un des résultats est ce re-croisement furtif. Amusant, non ?

Si je ne me suis pas encore arrêté, c’est que je ne sais pas trop ce que je pourrais faire avec précisément ces personnes, sinon que leur poser des questions qu’elles ne comprendraient pas, je suppose. Je suis un peu bête, parfois, je l’avoue, ou pas assez courageux. Et pour ce qui est d'aborder une femme, dans de telles conditions, c’est comme si vous alliez, pour elle, directement lui demander de lui monter dessus, en ces temps de liberté chérie, ou plus simplement vous porter au devant de recevoir un dédain, un mépris ou une moquerie à vous cacher sous terre pour une simple affirmation : « je vous ai croisée tout à l'heure et croyez bien que cela m'intrigue ».

Bien sûr que cela m’intrigue de l'avoir remarquée ! Si je réfléchis « prédestination », je ne vois pas où elle me mènerait dans l'impasse que j'ai dite tout à l'heure ; si je réfléchis « hasard », ce croisement n’a aucun intérêt en soi : il se passe, sans plus et sa fréquence est de l’ordre de la courbe de Gauss matérialisée par l’aboutissement de plusieurs billes tombant d’une hauteur et retardées par des obstacles régulièrement disposés ; si je réfléchis « humain », je n’ai pas de réponse sinon que de dire : « ça arrive ! » à quoi je  réponds : « Oui, mais, à une telle fréquence ? » car il arrive certains jours où on croise trois fois la même personne qui vous était auparavant inconnue.

Les croisements sont donc nombreux, repérables et fréquents, mais, bien que tributaires de ces croisements, les rencontres sont d’un autre ordre. Et là aussi, il y a des choses à remarquer. Il y a des périodes où on croise telle ou telle personne et on se doute bien qu’il y a comme une politique derrière tout ça dont on est le sujet, parfois bénéficiaire ou maléficiaire, ou bien elle de quelque chose de vous. C’est très lol !  Il y a comme un message à transmettre de l’un à l’autre, à un moment donné dont on ne doute pas, lorsqu’il est bénéfique, qu’il est tout à fait opportun et le contraire dans le cas contraire… mais qui est pourtant ! En y songeant un peu, on se dit qu'il est évident que, dès ce moment où l’on est un sujet de l’humanité, l’humanité se manifeste à vous en tant qu’objet intégrant. Mais pour autant, on ne rencontre pas n’importe qui n’importe quand !

Très lol, comme je disais tout à l’heure. Je ne vois pas cela comme un fortuit, bien que j’y sois obligé par la nature du hasard (billes-chemin-obstacles) ; disons que j’aimerais bien que cela ne soit pas fortuit pour me sentir comme intégré dans une immense toile de relations dont je ne suis pas toujours à même de percevoir l’enchevêtrement ou les relations causales, car ça me fait comme du bien de ne pas me sentir seul dans ce grand tout, ce grand chaudron qui contient une soupe si bigarrée, polyglotte et multiculturelle, où je le suis pourtant, affectivement. C’est se placer comme centre du monde en sachant qu’on ne l’est pas, et supposer que tout le monde se pose en centre du monde en sachant qu’il ne l’est pas ; simplement pour tenter de répondre à une question qui pourrait très bien ne pas être formulée puisqu’elle ne tient que sur l’hypothèse que l’on est le centre du monde alors qu’on sait très bien qu’on ne l’est pas tant !

Et pourtant, s’il n’y avait pas ces croisements, il n’y aurait pas de rencontre possible. La rencontre comme résultat d’un croisement particulier mène à penser que le croisement a pour but la rencontre, parfois ; selon des critères que je cherche à percer ! Imaginons que je réussisse à rendre translucide ce phénomène du croisement, combien de croisements ne provoquerai-je pas pour que les gens se rencontrent ! Les journaux titreraient, en gras : « Le maniaque de la rencontre a encore frappé » comme chapô d’article qui contiendrait en gros ceci : « Encore une fois, le maniaque de la rencontre a frappé : muni de sa théorie qu’il pense, ce fou, infaillible, il a encore poussé deux personnes à se rencontrer. Hélas, ne maîtrisant qu’à moitié son sujet, cette rencontre s’est encore soldée par une rupture : les deux personnes, initialement bien disposées l'une à l'autre, les yeux en larmes, le cœur blessé, ont dû se séparer pour partir dans des directions opposées, l’une au couchant, l’autre au levant, une main tenant un mouchoir et l’autre le vague à l’âme comme le couteau damassé des émotions fortes dont elles ont fait usage, tâché de sang cordial. Pourquoi donc, tel de piètres journalistes ou les politiques à l'âme morte, ne retient-il pas de la rencontre que le but, le peu qu'ils savent vivre ne leur permettant pas d'y percevoir davantage que les fins, pour que, comme eux, avant la fin, il n'y ai rien ? Ni la découverte, ni l'aventure du vécu, celle des approches, l'évolution et les changements, l'adaptation volontaire et celle, curieuse, involontaire dont on retire parfois des délices insoupçonnés ou des erreurs qui se retournent à vous comme des claques cinglantes, les imaginations fausses et les intuitions géniales, les déductions faramineuses et les totaux abruptement brutaux, les tentatives de solutions, leur échec comme leur réussite, les bonheurs fugaces et leur tenace persistance, ces douloureuses expériences qui s'effacent comme la brume au soleil qui se décide enfin à apparaitre, en bref la masse — dont on ne pourrait se dispenser de vivre sinon que mort — de l'histoire de ces personnes, qui se trouve à leur yeux dépourvue d'existence compréhensible ou plus simplement, plausible ou envisageable, si fatigués qu'ils sont d'avoir si peu vécu tant de petitesses ! Quand allons-nous arrêter cette folie qui crée tant de malheur dans nos foules de solitude ! Que fait la police des solitaires ! Pourquoi amener les gens à vivre vraiment ce qu'ils ont dans le cœur et qui peut avec tant d'aisance apporter accessoirement le bonheur autant que le malheur ? Combien devrons-nous subir de ses lacunes que ce démoniaque nous montre, acerbe, dans la gouverne communication mentale, dans les brochures et les sites ad hoc, dans la presse et la télévision qui n’en parlent pourtant quasiment jamais ou de manière si vicieuse ! Elles en parlent déjà trop, de cette tendance qu’ont les gens à se laisser emporter par la moindre des poésies malhabilement placardée sur les murs léchés par l’ombre sombre de nos villes. Nos efforts pour rendre malade la rencontre, en réussissant que les gens ne se croisent que toujours, sans fin occupés à une occupation inexorable et futile, resteront-ils vains tant de temps ? Que cesse cette infamie, que l’on passe à l’autodafé cette théorie mortifère pour notre morale ! Que cela cesse ! Que l’on nous protège de la rencontre ! ».

Hélas, croyez bien que si je pouvais être un tel bandit, je me donnerai avec plaisir à une telle vergogne, d’autant que je serais moins seul… encore qu’on affirme souvent que le cordonnier est le plus mal chaussé.

mardi, 26 octobre 2010

En faim, le baiser qui tut parle

Outre ses cheveux fins et blonds comme les rayons du soleil, son sourire, les battements éclectiques de son cœur, sa malice et son angoisse féminine, Annie était tout simplement la femme la plus baisable que j’ai rencontrée de ma vie… et qui me le rendait bien ! Elle est aussi grande que moi, blondinette, un agréable visage et sourire, pas grosse, les fesses juste ce qu’il faut pour être très jolie : ni garçonne ni popotin, et ses seins ont grossi assez fortement lors de notre fréquentation. Et c’est là que se pose le problème : la satisfaction sexuée. Car, cette satisfaction et ses conséquences la gênaient beaucoup : de voir ses seins devenir si beaux la dérangeait, de même que de voir son visage s’adoucir, d’avoir envie de laisser pousser ses cheveux, de porter des robes ! et peut-être même des jupes : de devenir un peu plus féminine, en somme.

Je me pose la question souvent de savoir ce qu’une femme a besoin de guérir en moi qui lui fait me fréquenter : il me semble que, pour cette fois-ci, la guérison venait de moi et qu’elle a été refusée pour ses conséquences. Car la féminisation de la femme conduit à plus de féminin encore, c’est-à-dire à devenir amoureuse à cause de ce féminin et non plus seulement à cause d’une idée directrice, si je puis dire, morale. Si Annie a reconnu en moi une part de son « masculin » qu’elle pouvait exprimer, elle a reconnu que ce masculin implique SON féminin pour s’exulter et cela l’a gênée. Je me souviens d’un rendez-vous à la campagne où nous devions passer une semaine ensemble. Je dois préciser qu’elle était mariée mais que son mari ne l’avait pas touchée depuis les deux ans, au moins, précédant notre rencontre… alors qu’ils dormaient dans le même lit. J’ai un peu tiqué, intérieurement, sur ce fait, car, généralement, la disposition d’un tel refus vient de la femme (un homme quitte le lit lorsqu’il ne veut plus de sa compagne) et j’ai trouvé comme un trait de sadisme à se refuser de si près puisque déductivement, son homme, toujours dans ce lit, attendait d’elle son ouverture. Mais enfin… lorsqu’on trouve une telle femme, il est bien difficile de ne lui  pas laisser comme des flous volontairement entretenus pour profiter de ce que l’on a, sur le champ et qui vous donne tant de plaisir partagé. Cette fois-là, donc, à la campagne, Annie a été complètement sèche, tant des lèvres du haut que celles du bas et les baisers impossibles à poser : la culpabilité était si forte de pouvoir prendre tant de liberté sexuelle – aller avec un amant pour profiter de son amour – aussi bien vis-à-vis de son mari que de ses enfants (qui devaient, dans cette tournure d’esprit, prendre un soupçon d'illégitimité) – tout cela lui a été insupportable. La liberté du vivre est insupportable pour la culpabilité.

Et puis, j’avais remarqué que plus nous avions de plaisir au lit (ou ailleurs, comme couple) et plus une forme pernicieuse de distanciation s’opérait. Je l’avais prévenue du fait que l’orgasme, lorsqu’on n’y est pas trop habitué, fait peur, que l’on doit absolument le savoir pour pouvoir remarquer les réponses négatives que l’on peut avoir vis-à-vis de l’amour qu’on éprouve et qui se trouve dégradé pour des raisons ; et par des réactions ambiguës d’acceptation, de pleurs et de dénégation alternativement qui sont le pendant de la bataille qui se mène en vous de l’acceptation pleine de ce que vous vivez de bon, d’adapté à vous et vos besoins, opportun. Mais, quoi qu’on dise, il faut un sacré caractère déjà porté sur le plaisir pour réagir favorablement à de telles recommandations parce que, généralement, suivant les dispositions de cette société vis-à-vis du plaisir (genre ce qu’entend wikipédia de l’orgasme, de l’hétérosexualité, de la pornographie) le départ est faussé, et de loin pour une arrivée plus heureuse. Ainsi, on ne remarque pas qu’on adopte des attitudes sensiblement « hystériques » sur des points de détails qui ont, certes, une base légitime, mais dont on ne perçoit pas immédiatement que l’adoption est négativante, comme un ballon (le détail) trop gonflé qui éclate au moindre contact (le baiser) et vous fait refuser la sensation du don et de sa perception. Attention ! je ne suis pas bête : cet argument ne cache pas mes propres incapacités à donner de l’amour, à comprendre les besoins de mon amante et à m’y adapter ! Il s’agit du laisser-aller confiant, comme un don de soi au plaisir que l’on éprouve et que l’on doit mettre bien plus haut que bien des contingences qui jouxtent souvent des rejets de ce que l’on vit, ici & maintenant, comme quasiment inacceptables du point de vue de la morale que l’on n’oublie pas comme étant celle du sacrifice (dont l’Économie marchande est la démonstration parfaite). D’ailleurs, dans le cadre de cette morale, tant que la femme reste dans ce sacrifice, elle y trouve raison et autorisation de plaisir : cette société ne lui laisse que cette forme de légitimité (mais à la fois, lorsqu’elle regimbe à cette obligation, elle oublie aussi que tous les hommes ne sont pas totalement en faveur d’une telle morale et qu’ils éprouvent, eux aussi, des difficultés à s’y soustraire !).

J’avais, pour moi, rencontré en Annie, LA femme. Il n’est pas aisé de comprendre qu’un homme est un être entier, qu’on a cela parce qu’il est ceci à côté, en bon ou en moins bon et que l’amour vécu relie entre elles ces parties que l’on croyait éparses et que c’est avec grand plaisir que cela se passe. Il en est de même de la femme, bien évidemment, mais avec SA spécificité sociale. Ce n’est que tout dernièrement que j’ai compris pourquoi je l’aime tant et qu’elle me reste tant en mémoire (qui est chez moi physique) : parce que Annie est la femme la plus baisable que j’ai jamais rencontrée de ma vie (ce qui signifie, pour les obtus : celle que je peux le mieux aimer et dont j’éprouve le plus de plaisir à aimer et vivre AVECsi le plaisir est une cause, il est aussi une conséquence) ; et je comprends aussi pourquoi j’en ai tant de nostalgie jusqu’à me dire que cette séparation est une bien grande punition que m’inflige la vie, punition que je ne comprends évidemment pas, mais qui est là quand même. Je ne nie pas que je suis moi-même un peu compliqué et que mes calculs sont assez souvent nébuleux, encore qu’avec Annie, j’ai adopté comme ligne de conduite de toujours peser le bon que j’en recevais, de tout ce que je pouvais trouver de séparateur, et il y en avait : l’un surpassant l’autre, je n’ai eu aucun choix à faire. Je ne peux pas dire que ce genre de sacrifice (ceci contre cela) à l’amour a été trop loin en balance de ce plaisir et qu’en conséquence, il ne tient qu’à moi d’en pâtir, effectivement. Mais je sais aussi que celui-ci qu’elle a fait en pleurant à chaudes larmes de renier le plaisir que nous avions ensemble, sacrifice basé sur le contradictoire de devoir choisir entre une « fidélité » à son mariage (dont elle exclut sa sexualité) et le bonheur d’un homme (illégitime puisque non socialisé) et ce paraître femme débauchée car tant versée sur l’amour dit « physique », en préférant, aujourd’hui encore (ce me semble) vivre seule plutôt que bouleversée, me spolie d’un présent de la vie dont j’aurais pu parfaitement profiter.

Et je vais vous dire pourquoi : quand LA femme en arrive à un tel point de participation à l’acte d’amour qu’importe le moment ou le lieu qu’il en est très généralement réuni de la satisfaction car le commun ne se pose plus comme question mais se manifeste comme certitude, il y est perçu comme une humiliation d’être moralement tombée si BAS ; et c’est faire faute, corrélativement, à ce que son homme perçoit de soi qui ne correspond pas à ce qu'on attendait de si haut et qu'il vous arrive de partager pourtant. Pareillement du rire, de la cuisine, de la beauté des choses ou d’autre ; et qu’à la compréhension que le défaut de satisfaction provient d’un entêtement à dire un muet « Non ! » et de ses conséquences qui vous suspendent à une incompréhension qui vous dépasse, on s’aperçoit tout à coup du LIEN qui vous retient et qui peut facilement devenir une chaîne au bout de laquelle, non pas allégé par une plume, mais balourdisé par un boulet, comme ce muet « Non ! » qui vous oblige à la traîne… on a peur que cela soit. Ce « Non ! » muet n'est que rarement relatif à l'amour des corps ou des âmes, mais toujours à des choses du quotidien : c'est là qu'est le paradoxal : l'attente du désir confronté au besoin, des représentations devant lesquelles on ne sait quoi faire, auxquelles on ne s'attendait pas et qui ne correspondent pas à ce qu'on attendait de soi dans la vie. C’est un manque flagrant de confiance en la vie, en soi, en l’autre (le contexte social y est pour énormément). Et c’est pourtant cette fragilité qui vous a permis cette ouverture à propos de laquelle on ne reste toutefois que sur le seuil.

On retombe alors dans cette faculté du pardon face à la perte irrémédiable, à la façon de la réparation qui vous laisse désappointé souvent, que l’on égare pour ne plus savoir les réaliser et vous donne ce sentiment d’impuissance devant cet amour que vous éprouvez comme un claudiquant… que vous ne voulez plus être par amour-propre. Soupire. Pour moi, tout cela est une erreur, bien sûr, car fondé sur des dispositions relatives à sa position sociale que l'on ne veut pas perdre, alors qu'on ne perd rien, sinon qu'une image, un paraître qui semble, je dis bien semble, d'une importance telle qu'elle vaut toutes les autres pertes ; comme le cinéma 3D n'est que la colorisation de l'ombre.

samedi, 16 octobre 2010

Gnoséologie et quadrilectique

Henri Lefebvre a écrit des choses très intéressantes. Je me souviens d’un livre sur la pensée de Karl Marx (Pour connaître la pensée de Marx, Éditions Bordas, Paris, 1948) qu’on ne trouve plus, hélas. Il a aussi écrit un truc sur la cybernétique, très rigolo. Et, page 122 de « Problèmes actuels du marxisme » chez PUF (1958) : … la « gnoséologie » distingue plusieurs lois : celle de l’interaction entre les « choses » et les processus déjà distingués par une analyse concrète ; celle des rapports entre quantité et qualité ; celle du bond qualitatif à un moment donné ; celle enfin des contradictions comme raison du devenir. Il en oublie une, que votre serviteur a proposé : celle de l’hystérésis -- qui complète merveilleusement celle de changement de quantité en qualité et du saut qualitatif : le temps nécessaire pour qu’un état passe de son état à un autre : le moment du saut qualitatif.

Mais ce qui m’intéresse ici, c’est la confusion entre contradictions et devenir. « Les contradictions comme raison du devenir » signifie que pour devenir, le devenir a besoin des contradictions. Or, pour devenir, seul le temps qui ne passe pas l’empêche de ne pas devenir. On parlera plutôt du devenir de la (ou des) contradiction(s), comme raison des contradictions. L’inverse n’est pas juste : le devenir n’a pas besoin des contradictions pour devenir (ni être), sinon que comme prédestination et le devenir n’ayant pour prédestination que lui-même, ce ne peut être une contradiction, sinon que lui, et rien de plus. C’est comme une réflexion qu’on m’a faite hier soir : je disais que mon jardin (associatif) était un endroit d’expérimentation de modes de culture (et de moindre effort, bien évidemment) et on me recommandait d’écouter les idées des autres plus expérimentés et plus conventionnels ; ce à quoi j’ai répondu : « et qui me donneras les idées que j'ai dans la tête... ? » ; à quoi on me dit : « pas besoin puisqu'elles y sont déjà » sans comprendre qu’elles ne sont pas dans la tête des autres et que ces autres ne peuvent donc pas, parce qu’elles n’y apparaissent pas, me proposer celles que j’ai dans ma tête. J’ai réussi tout de même à garder mon jardin encore une année.

Le terme « gnoséologie » me plait beaucoup. La philosophie est l’énoncé d’une perception du monde et elle montre du même mouvement le monde selon une manière de le percevoir. C’est ce qui m’intéresse. L’interrelation entre les choses revient à reconnaître l’interrelation entre ces pensées énoncées et le monde, aussi bien ; donc entre les gens, entre les gens entre eux. Selon ce que pensent les gens de eux, ils le pensent du monde et de ses relations. La philo élargit, ou  tente d’élargir cet entendement. Seulement, le plus souvent, elle n’est qu’une énonciation de ce qui est, de ce que les gens sont et de ce qu’est leur perception du monde. Lorsqu’on découvre une « contradiction » dans la philosophie, on découvre en même temps la contradiction d’un moment du temps humain et de sa perception. Et je trouve amusant qu’on pense que le devenir trouve sa raison dans la contradiction, puisqu’il ne peut qu’être. Ce que veut dire Henri Lefebvre est qu’il est possible, en comprenant les contradictions du présent, de peut-être influencer les conclusions du présent dans l’avenir – ce qui est correct. Le monde du secret est de déni de la sexualité comme réalité ; le secret du monde est la fuite devant la satisfaction sexuée. Dire que les contradictions sont la raison du devenir revient au même : ce qui est empêche le saut qualitatif et il faut le triturer (le devenir) pour qu’il advienne.

Ce n’est pas très clair. Parce qu’on perçoit en soi le désir, il est supposé que sa solution est dans son devenir : c’est faux, enfin… non : c’est juste dans le faux. Le désir est contradictoire : il se formule comme déjà réalisé et il n’est pas ; à la différence du besoin qui demande à ne plus être, à se supprimer. Le désir contient ses propres contradictions : être ET ne pas être encore. Le besoin sait qu’il n’est pas ; le désir refuse de ne pas être. Ainsi, dans la règle du saut qualitatif, le désir ne se réalise pas, tandis que le besoin, oui, et comme satisfaction. Le devenir a donc pour raison les contradictions du présent dans la mesure où son devenir est prédestiné au présent, comme le désir ; mais pas comme le besoin. On va me dire alors que le désir est naturel chez l’humain car humain et le besoin est plus « bestial », si je puis dire, moins « humain ». C’est mal comprendre ce qu’est le besoin, c’est le comprendre comme contradictoire à son devenir : la satisfaction.

En étant moins brutal, je dirais que le désir est l’image d’un besoin, qu’elle serait donc inévitable. J’ai bien des images qui me passent par la tête, de viol, de meurtre, et de choses pires ou presque, sans que j’en veuille manifester une réalisation, car je sais que je n’en aurai pas de satisfaction : j’ai déjà vérifié et plus que vérifié. Je pense qu’il faut être dérangé affectivement, avoir en conséquence des modalités de satisfactions étranges, pour en trouver une dans la maltraitance, l’irrespect, la fin de l’autre ; ou de se mettre dans des circonstances extrêmes évitables. Et c’est là que vient s’immiscer la loi de l’hystérésis : le repu ou la pré-détente. Affirmer que le devenir a besoin de contradictions pour se manifester est donner au désir la place qui revient au besoin qui échappe à son devenir. Et de même qu’on fait fi de la satisfaction sexuée, on fait fi du contenu du besoin, car vil, terre-à-terre, bassement matérialiste : comme l’une est inatteignable, on la pose en image de sorte à ne pas pouvoir l’atteindre, comme ça c’est plus facile : elle reste un désir, une contradiction du besoin : d’une part : j’existe, d’autre part, mais jamais pas encore. Les modalités du repu ou de la pré-détente s’en trouvent fortement influencées : du fait que tout est éloigné en images (en « représentations » disait Guy Debord, un pote à Henri Lefebvre dans sa jeunesse jusqu’à ce que Henri Lefebvre fasse un très mauvais usage d’un texte de l’International situationniste sur la Commune de Paris) le besoin, pour se satisfaire, demande à se contredire, à se nier lui-même comme nécessité et à revendiquer sa réalisation ; et ce mouvement est celui typique du désir à ceci près que le désir peut ne pas être réalisé, que son porteur (pour le dire à la J.-P. Voyer) en soit sans fin le porteur, c’est-à-dire, séparé de son besoin qu’il ne sait plus reconnaître puisqu’il ne le perçoit pas même comme charge.

Or, si je mets mon grain de sel dans la gnoséologie (que j’avais, avant d’en connaître le mot, nommé quadrilectique), ce sera pour dire que le devenir se réalise dans les complémentaires du présent ; et les complémentaires des désirs, bien évidemment (les désirs ne correspondant qu’à des images de devenir) tendent à ne faire appréhender le présent que sous forme d’images : un monde de désir ne comprend rien aux besoins du monde et encore moins au monde des besoins qu'il met en images.

La quadrilectique (qui prend en compte la simultanéité de quatre éléments, comme la gnoséologie, avec la précision de l’hystérésis) se penche sur ce fait toujours mystérieux (encore qu’on en a une bonne approche lorsque l’on y est attentif) du moment déclanchant du saut qualitatif, l’orgasme, et la nature du repu, du repos ; et antérieurement, la nature de la tension et la force de la charge, la pré-détente comme détermination. Ce moment n’est pas contradictoire, il est l’addition de deux entités qui sont complémentaires, jusqu’à n’en faire qu’une qui se divise alors, car SON moment est devenu. Selon la dialectique, antérieurement à leur addition, les deux entités sont contradictoires à leur précédence en vue de donner ce résultat : cette addition qui aboutit à leur fin et à leur renouveau sous une nouvelle forme, synthèse d’une thèse et d’une antithèse : c’est un peu faible puisque ce qui paraît contradictoire dans la dialectique est qu’il faut trouver la contradiction qui sera le moment déclencheur par l’adéquation optimale d’un complémentaire et de sa raison d’être. La raison d’être des complémentaires est le devenir qu’ils vivent au présent.

Néanmoins, on va me faire remarquer que la dialectique est la recherche de l’antithèse, de ce qui empêche le devenir de devenir : là encore il y a prédestination, donc plantage. Le devenir est labile, il se manifeste tel qu’il se manifeste, avec ou sans recherche de solution : il est là au fur et à mesure qu’il se présente. On va insister en disant qu'on rend le devenir plus humain. Certes oui, il est possible de le prédire, de l’anticiper : si je mets du feu sous ma casserole, l’eau va bouillir. Mais selon cette méthode, il ne s’agira toujours que de recherches autour d’une cause et d’un effet ou vice-versa. Il ne s’agit pas encore de transformation en tant que saut qualitatif qui inclut la perception de la charge-décharge et de l’hystérésis. La dialectique ne s’intéresse pas à et ne veut rien connaître de l’énergie. La gnoséologie commence à s’y intéresser. En entrant dans la baignoire de la quadrilectique pour s’y immerger, on commence à prendre son temps. car il ne s’agit que d’addition d’énergies vitales dont la somme comme entité nouvelle se divise. Guy Debord parlait de tension sociale affective… et c’est bien de cela qu’il s’agit.

Parce que ce mouvement de charge-décharge passant par l’addition et se réalisant dans la division, implique obligatoirement une perte quelque part d’un excédentaire – excédentaire qui a provoqué cette addition et qui procure précisément le repu par sa disparition --, autrement dit un retour au don dans le mouvement même du processus de devenir, ce mouvement d’addition et ensuite de division ne plait pas à tout le monde et principalement au monde rigide des affaires. Cet excédentaire est l’objet-même de ce processus et je lui donne nom de « don » car c’est ce qui résulte de son usage où à la fois cet excédant, comme résidu de cette division qualitative, ne peut pas ne pas se trouver. Ainsi, il est don et pas don : l’eau que l’on trouve est-elle un don ? Oui, lorsqu’on a soif, sinon elle est là, tout simplement.

Par exemple, c’est là où ce processus est le plus manifeste, ce qui est nommé la « procréation » avec sa visée spéculative et intéressée de la multiplication, et que l’on comprend comme une re-production de l’espèce, qu’il est le plus malmené : l’amour (addition), le coït (division), la gestation après que se soient additionnées les deux gamètes qui donnent un œuf qui se met alors lui aussi à se diviser, et la gestation (don organique et échange de dons affectifs entre tous) et l’accouchement-allaitement jusque la séparation : tout cela va de guingois et est superbement bien capitalisé, rigidifié, multiplicatif. La quadrilectique permet de comprendre que le monde ne se multiplie pas, il se divise, et cherche à saisir pourquoi on comprend qu’il se multiplie et pour ce faire, qu'on cherche à prix de mort à le multiplier.

vendredi, 01 octobre 2010

Les messes qui ne rient s'tournent niaises et l'étalent

S'il y a bien quelque chose, plus qu'une chose ! une attitude face à la vie, un comportement, une cuirasse caractérielle, une conception et une praxis de la vie qui domine ce monde, c'est bien la mesquinerie. On la trouve partout, partout, partout. Ses prétextes sont multiples à la mesure excédentaire de ses résolutions, solutions, résultats et c'est ce qui la fait se reproduire. En fait, je sais très bien qu'elle n'a pas de solution à très cours ou cours terme : son ancrage dans les âmes se manifeste en tout lieu, tout temps, toute fonction, et jusque dans ce logiciel qui me sert à écrire ces lignes et qui est pourtant « gratuit » et qui, sous ce prétexte de « liberté », vous impose ceci ou cela, car cette mesquinerie obnibulant la tête de ses programmateurs, leur fait ne laisser aucune place de liberté à l'autre et donc, trouve incidemment à l'obliger à quelque acte dont il ne peut se départir.

C'est par erreur que ce monde est généreux et pour en profiter il faut être soi-même une erreur de ce monde, encore que, un film comme « Brasil » tente de montrer que de telles erreurs peuvent être pirement fatales pour les hasards de l'amour et pour cette liberté dont je parlais il y a un instant, à qui il ne reste plus d'être vécue que dans la folie. La majeure partie des déboires que subit l'humanité est due à la mesquinerie de chacun ou presque de ses membres qui y opère et y laisse sa trace, de la plus insignifiante à la plus importante, si tant il y en est, vu l'égale « importance » de tous dans ce vaste système. Et si la mesquinerie s’estompe parfois ici ou là, c'est par perfectionnement, car la générosité n'est pas dans la conception des choses produites par ce système social, mais qu'il se rétablit, par revirement d'un excès de cette mesquinerie, en revoyant ce qui l'empêche de pas trop mal fonctionner. Les choses s'améliorent, le sens des mots y participe mais par une orientation vers une perfection qui n'est qu'une des faces les plus cachées de la mesquinerie. La perfection n'est pas un plus pour l'humanité, est elle un moins pire, et encore ! Car très généralement, cette perfection est un pire dont on se passerait parfaitement bien.

D'ailleurs, que vous n'ayez pas la mesquinerie de penser que je tente de ne pas penser mesquinement, c'est gentil. Mais je suis moi-même mesquin, pas toujours mais trop s'en faut. C'est ce qui me perd avec mes amours, notamment ce qui m'a perdu avec Annie.

A-t-on caressé que la relation à Dieu ou aux dieux de l'humain est de cette forme ? On peut dire du Christ que, comme Fils de dieu et Dieu lui-même, sa mise à mort, fut-elle postérieurement imaginaire, est un avilissement de son dieu par l'humain : sa générosité est telle qu'elle ne peut supporter pour le salut de son âme que son dieu soit PLUS généreux qu'elle. Ce n'est qu'à la constatation du contexte historique – qui n'a plus lieu d'être plus tard – que l'on suppose que dans cette démarche de ressuscitation, l’humanité ait fait preuve de moins de mesquinerie car auparavant ce dieu était encore plus radin, espiègle même. La mesquinerie humaine est telle qu'elle doit amoindrir de ses pouvoirs-attributions-idéalisations-etc. tout ce qu'est pour elle un dieu et cela, après avoir attribué à ce dieu toutes ces bonnes choses, à postériori de sa « générosité ». Qu'elle ait ressuscité son dieu après l'avoir tué le souligne d'autant plus. Pour les mahométans, que dieu s'adresse à des hommes montre encore son avilissement : comme si un dieu avait à s'adresser à un ou deux hommes en particulier. Que dieu s'adresse aux hommes (je dis bien « hommes » et pas « femmes » : dieu a beau s’avilir, mais quand même...) c'est le corrompre du pécher que ce dieu est sensé montrer, c'est Le salir, c'est un rapetissement de ce qu'Il est, Son rabougrissement à l'état d'homme, réduire Sa grandeur à celle de l'homme qui a ainsi la possibilité de pouvoir Le piétiner. Le leurre est d'admettre que l'« appel de dieu » est une forme de courage alors qu'il est la manifestation d'une lâcheté de la part de la personne qui se dit en être le récipiendaire, c'est une lâcheté devant la sexuation et ses responsabilités dont il a dit de ce dieu qu'Il n'a qu'une forme comportementale : la négation sans compromis. L'appel de dieu est un tripatouillage qui permet de se sortir du problème de l'amour entre humains sans l'aborder, en le noyant dans la boue de ses propres rétentions, de sa mesquinerie et en le moralisant de sorte à justifier cette mesquinerie : il existe dans cette morale, bien distinctement, le cul, le coeur, l'esprit et l'Autre, chacun dans une case bien à lui, avec sa propre scolastique, ses propres circonvolutions tautologiques, à la rigueur pouvant fricoter avec le contenu de la case d'à côté, mais guère plus loin, car dans ce système, tout est plat, en deux dimensions et rien de spacieux, en trois dimensions qui redonneraient à ce quadriptique la consistance et l'aisance de se mouvoir qui lui convient.

On retrouve encore de la mesquinerie dans la dialectique : la mise en opposition extrême de deux éléments issus d'un seul, de sorte à les confronter afin qu'ils fusionnent ensuite pour donner un nouvel élément neuf. Le bien & le mal, le chaud et le froid, le mâle et le femelle, tout est en opposition, rien n'est complémentaire, c'est-à-dire que les seuls éléments qui joignent ces deux extrêmes sont le fil FUTUR de leur anéantissement, pas leur présent. Il n'y a pas d'étages, de gradation entre ces deux extrêmes, car c'est précisément leur opposition qui forme leur être destiné à se supprimer dans une forme « supérieure ». Je ne dis pas qu'il n'est pas possible de procéder ainsi, que les PURES oppositions n'existent pas en ESPRIT, qu'elles ne sont pas des Idéals qu'il faille trouver dans la réalité vivante ; je dis que cette manière de faire est mesquine est ceci qu'elle ne voit en rien ce qui complait la vie, la complète = être plus car avec. Je ne dis pas non plus que le Bien et le Mal n'existe pas : je sais quand j'ai Bien et je sais aussi quand j'ai Mal et je ne dis pas qu'il faut se dispenser de faire avec, puisque nous sommes humain : ne soyons pas si mesquins. Je dis que cette opposition n'a de construction qu’ailleurs de l'ici & maintenant et ne permet la résolution du problème posé que dans cette opposition de PURES IDÉALITÉS.

Je démontre très aisément qu'entre le chaud et le froid se situe le tiède ; pour autant, du fait que je ne trouve rien entre le mâle et la femelle, il n'existerait pas de milieu qui joigne ces deux extrémités de la vie ? Ne serait-ce pas plutôt le système que manie ma pensée qui faillirait dans sa compréhension du monde en ne trouvant point de point milieu entre l'homme et la femme qui me fait certifier que ce sont là deux extrêmes de la vie en opposition ? C'est mesquin. D'ailleurs (ça y est : je cause comme un philosophe !), d'ailleurs, dis-je, cela ne plait pas à tout le monde, et l'on en vient à affirmer qu'il y a une part de féminin chez le masculin et inversement. Là encore c'est mesquin, c'est vouloir scissionner les deux sexes : c'est sur un tronc commun formé d'un nombre d'os et d'organes semblables, mêmes ceux qui caractérisent le sexe, que sont formés les corps et vient se spécifier un sexe. C'est la sexuation qui fonde le monde et elle se distingue en deux sexes qui ne sont pas des oppositions. Le simple fait d'être pourvu d'un des deux sexes ne signifie pas que je sois différent de l'autre, mais que je suis détenteur d'une spécificité sexuée. C'est une curiosité qui cherche à se satisfaire que de chercher dans et où se situent les spécificités sexuelles et de quelles manières elles se manifestent corporellement pour en justifier, éventuellement, un comportement social dérivé d'un comportement lié à la sexualité, une manière de faire avec ce que l'on a de ce que l'on est. Quel malheur de voir tant de filles et tant de garçons si distants de ce qu'ils/elles sont ! Que peuvent elles/ils faire de ce qu'ils ont ? Un peu moins de mesquinerie, de chipoterie dans la compréhension de la sexuation règlerait CE problème de la mesquinerie.

C'est pourtant simple : la sexuation est le fait d'être pourvu d'un des deux sexes où le féminin se distingue en ce qu'il assure le résultat de la fusion des deux gamètes dont elle détient pour part la moitié et le masculin en son apport pour part de l'autre moitié à cette fusion ; les modalités ressortent de ce que nous nommons « sexualité ». Dans le règne animal, se distinguent les ceux-ce dont la sexualité est liée au rut et les autres, dont nous faisons partie, où le plaisir se situe plus précisément dans l'usage de la sexuation ; la reproduction ne relevant plus que de la relation sociale des impétrants. Rien ici n'autorise le viol ni du fonds ni de la forme.

Car la mesquinerie a une raison, au sens mathématique comme au sens morale qu'au sens de principe pensant. Le fait de ne pas pouvoir penser plus généreusement, de ne pas pouvoir laisser la liberté se manifester dans le général et de s'y retrouver, où elle – cette liberté – se retrouve, a une raison qui se dissimule derrière sa rigidité. Je vais donner un exemple. Certains pensent qu'il ne faut pas chercher à spécifier les sexes car cela les réduira à des comportements rigidifiés (ce qui donne exactement le contraire de ce qu'ils escomptent, idéalement, et assurent ce qu'ils veulent pratiquement : la séparation des sexes) ; c'est oublier que la multitude implique une multitude des formes, donc de variétés : un pommier va vous donner un million de fleurs odorantes et pourtant elles seront toutes différentes les unes des autres et chacune ne va pas recevoir la même abeille (s'il en reste) de la même manière au même moment. La peur de variance fige et la raison de cette fixation de l'émotion soulevée par la variance se situe dans cette peur de ne pas être partie de cette variance qui englobe tout de son universalité. Du point de vue moral, la variance n'implique pas – selon moi – le Mal, mais selon la morale de ces invariants, le Mal est la variance. Typique de la cuirasse caractérielle.

Le salariat, le biberon précoce, le nucléaire, la dispendieuse dépense d'énergie de la société humaine, la thésaurisation immatérielle d'équivalences attribuées au résultat de l'activité humaine et la gestion de cette immatérialité, la méthode facebook qui consiste à récupérer sans votre assentiment les adresses courrielles situées sur le serveur de votre boîte aux lettres pour s'en servir et faire croire à vos correspondants, sans votre assentiment, que vous les invitez à les joindre sur leur page d’accueil alors qu'il faut impérativement que vous y créiez la vôtre, la retenue des enfants assis pendant des heures durant sur les bancs des écoles, cette bataille de surface autour du partage des fichiers commerciaux sur l'Internet, l'esprit militaire ou religieux, la politique et le politicien, le Juge pour ceci ou cela, celui qui protège ses ouvrages comme celui qui les pirate, l'un parce qu'il a peur de perdre le fruit de ses entrailles cérébrales, l'autre parce qu'il ne respecte pas autrui en détruisant l'âme de son créateur pour ne pas le vouloir reconnaître, le tarissement de l'eau comme celui de la terre arabe ou leur pourrissement par des produits composés chimiquement issus d'esprits mercantiles qui donnent du travail à d'autres qui l'exécutent poussés par le dénuement véritable ou sollicité, l'usure préprogrammée de tout ce qui est vendu, vouloir échapper aux réponses cohérentes demandées par le questionnement de l'enfance, l'épuisement de la terre autour de tout ce qui en est retiré en minéraux de toutes sortes, déjà aux temps préhistoriques sans le discernement, l’empuantissement de l'air si généreux pourtant qu'il emplit sans faillir un jour, une nuit, tous les poumons qu'on n'étouffe pas par la peur ou les coups ou la noyade, et nourrit les plantes qui vous nourrissent ensuite, le travail, tout, la CRÉATION du MANQUE bien loin de le résoudre, sinon qu'en image, et encore ! est le sujet du monde. Et je craints fort que ce soit là une des caractéristiques spécifiques de l'être qui se nomme humain, qui induit toutes les autres !

Hé oui, cette mouture du Verbe torréfié à la chaleur de la bienveillance pour le passer au percolateur des idées déçues afin d'en extraire une déliquescente amertume adoucie du sucre de l'espoir non raffiné, ne nous donnera aucune solution qui nous sorte de cette impasse de nous-mêmes ; hé oui, je ne peux dire qu'hélas ! Ce n'est pas pour autant que ce moteur du sujet du monde doit se voir dispenser de discussion à laquelle je contribue de ce moulage du même Verbe en bandelettes sur les formes rodomontrices de la langue de bois pour l'agrémenter par dissimulation, de mes couleurs, aujourd'hui.

 

mercredi, 22 septembre 2010

L'aveugle point du lisse

Bien des idées passent et s’évadent dans les éthers, comme des âmes perdues se dissolvent sans plus qu’une trace, pas même une odeur ou une couleur camaïeuse se distingue dans l’azur, subsiste. Lorsque rien ne les renouvelle, comme un air frais que respire la cervelle, une pluie qui abreuve celles qui y sont restées, les bras vous en tombent. Et lorsque les zébrures de l’éclair rageur ne sillonnent plus l’équilibre des cieux et des terres, rien ne les retient plus et elles s’évaporent comme l’eau des flaques au soleil ou sont bues par le temps comme le lapement du chat le lait.

Le vécu antécédent y est pour beaucoup, dans son foisonnement qui se presse à la mesure des asticots sur le rai du présent fermentant, et se bouscule sans pouvoir s’ordonner des tours ou des mots de passage, des distributions et des catégories pouvant en rendre le tri plus facile. Mais trier pour quoi ? puisque que cette fatigue qui vous donne tant de mal à la retenue du folâtre des pensées ne vous permet plus d’y porter votre intérêt ! On met en ordre pour le plaisir de l’autre, pour rendre agréable un énoncé dans lequel il se doit d’y pouvoir être distingué une trame ou un fils, un tissu bariolé dont l’ensemble forme un dessin par l’entrelacs des traits qui s’étalent devant vous et qui aiguise une curiosité dans les surfaces laissées à la vue intérieure à l’aune du déroulement du dessein.

Dans les pires moments de l’adolescence, certains ont reçu comme punition de devoir décrire une boule de billard blanche sur quatre pages sans parler de sa forme ni de sa couleur ; il n’y a pas pire moment que de se retrancher dans la description d’une âme vide pour tenter de lui redonner du plein. L’écriture remplit, mais à une telle lenteur qu’elle laisse à la traîne toute une kyrielle de pas informulés, à la cadence hachée de l’énoncé hésitant du fait qu’il faille extraire du fond du puits profond de ce qui veut perdurer à être, la torture de la formulation. C’est qu’on se trouve, comme devant cette boule blanche, ronde ou sphérique, qui se tourne autour de soi-même sans qu’on en perçoive un seul mouvement sinon que linéaire, au devant de ne rien avoir à dire que sa solitude affective, face au froid du glissant et de l’insaisissable, le geste maladroit où vous trouez le tapis qui vous le rend en croche-pied, une trébuche qu’aucun geste des bras vous fait rattraper et qui vous étale dans votre fatigue, encore, de vous relever. Pour peu que le sol soit jonché des gravillons des arguties et votre peine s’augmente des déchirures périphériques dont la poisse sanguine englue mieux dans le marasme des écorchures de l’âme.

Parler du vide comme de la surface lisse de l’imitation de l’ivoire, verra pour une part sa pénibilité s’évanouir dans la publication qui en sera tout à l’heure faite : communiquer est correspondre, même dans le vide de la toile et donne le sentiment peu éloigné de la sensation d’exister en un endroit situé là où quelqu’un vous lit, sans savoir ni le lieu, ni l’heure de cette situation. Ecrire coûte, surtout quand on en arrache des lambeaux de plaisir de l’outil de la satisfaction par gestes brusques, saccadés, à la manière de la mauvaise humeur où vous noient vos réprobations devenues quasi-sempiternelles devant ce sort terrible qui vous reflète votre impuissance d’un sourire déploré ne signifiant rien d’autre que cette débilité : des chaînes si étroites qu’elles vous scient les chairs du ressenti et si solides qu’on s’y sent suspendu, les membres cordiaux enceints dans ses tours resserrés par le poids de cette âme que vous supportez seul et le bout aussi fin que le cheveu de la déesse de l’amour que vous tenez entre l’index et le pouce et dont la présence est si faible qu’il ne reste que la sensation qu’il va vous échapper sans aucune certitude de sa réalité toujours.

La force de telles illusions indésirées, contrebalancée par le simple fait que la vie tient à vivre, étire le fil et, vous le savez, qu’elle perdure et cela va rompre. On chutera inévitablement en arrière avec un gouffre sous les fesses pour ne plus vous retenir et la vie s’en ira dans cet effondrement de vous là où plus rien ne vous reconnaîtra, où plus rien ne discernera qui vous êtes, plus même vous. Quoi faire ? Ne tient-il qu’à vous seul d’être seul ? Lorsque la boule de billard s’est tournée, pouvez-vous toujours situer son ancien point de repos ?

Pour autant, cet amer qui nage dans votre bouche déteint sur l’ensemble de votre vécu et les distractions que vous vous accordiez pour le plaisir issu d’une petite communauté qu’elles vous apportaient, vous lassent, elles aussi, pour vous enfoncer plus dans ce fouillis désertique. L’isolement se renforce et renforce davantage le sentiment d’impuissance devant les petites misères de la vie quotidienne à qui vous ne pouvez à personne parler pour les diluer dans le temps. Cette page-ci, n’y suffit pas, car personne ne veut lire que le briquet est cassé, que l’adsl fonctionne mal, qu’on a de plus en plus froid aux pieds et aux bouts des doigts et que l’appétit ne vous donne plus l’imagination culinaire à laquelle vous êtes coutumier et qui vous faisait passer le temps du dîner moins dépourvu de nouveauté. C’est pourtant de vie quotidienne dont vous manquez, de partage d’affects, d’effets, de reflets. Le lisse lisse tout faute d’aspérités.

C’est sans secours, on ne peut pas se demander, à soi, du secours, car c’est le manque de l’autre qui vous fait défaut ; cela ne tient qu’à l’autre que vous ne soyez plus seul. Cela tient à vous, bien sûr, mais moitié à l’autre, aussi. C’est-à-dire que vous ne voyez pas où vous pourriez vous porter secours : d’abord les forces commencent sérieusement à vous manquer, ensuite vous ne voyez pas comment vous pourriez vous changer pour rencontrer l’autre. Et quel autre ? Il est où qui vous satisfasse ? En quoi ? On le sait : le bonheur de l’amour est composé du trépied du corps, du cœur et de l’esprit. On sait que cela intéresse encore… mais comment ? Et où ? Dites-le moi ! J’y cours ! même en claudiquant. Quel extrême que de penser que le secours que vous implorez s’enfuira dans la rencontre de l’autre !

vendredi, 17 septembre 2010

Éloge du chiotte à compost

On fait souvent usage des mots « toilettes sèches » pour insister sur le non-usage de l’eau dans l’évacuation des excréments par le tout-à-l’égout, à la place de ceux de « toilettes à compost » qui, eux, sous-entendent la participation à un cycle, la transformation de ces déchets sans l’usage de l’eau, certes, mais principalement avec celui du temps qui passe qui, lui, est le summum de la gratuité et agrémenté d’un ensemble de dispositions qui favorise cet usage. Dire qu’il n’est pas utilisé d’eau dans les « toilettes à compost » est beaucoup plus impliquant que de ne seulement pas utiliser d’eau comme dans les toilettes dites « sèches » : c’est une manière de penser la gestion de l’ensemble des déchets et ceux que vous produisez vous-même, chaque jour du simple fait de vivre. La séparation des « eaux grises » (eaux de lavages essentiellement) de manière à supprimer les « eaux noires » (eaux souillées par les excréments) est un ENTENDEMENT du monde.

Il est évident que les consortiums de l’eau ont tout intérêt à empêcher que cet entendement, cette compréhension des possibles, ne se fasse pas, car c’est leur gagne-pognon. Pourtant des immeubles sont déjà équipés de toilettes "sèches" et la gestion de leur compostage ne présente pas de difficulté ; et individuellement, ce n’est qu’une question d’organisation, au mieux, collective.

L’humanité aura bien changé en bien le jour où il y aura un ramassage municipal des sacs des toilettes à compost. Il s’agit de comprendre que la pollution de l’eau qui ne se pas fera de cette manière, mènera à comprendre qu’une autre pollution, l’industrielle, est étrange par sa balourdise et son obstination, car l’effort qui sera fait par les gens pour protéger, par les toilettes à compost, LEUR usage de l’eau, ne sera plus aussi tolérant pour ce qui est des autres manières de polluer l’eau, ce sang de la terre.

Faire la « promotion » des toilettes à compost n’est pas un truc de bobo ou de baba, c’est LA solution qui englobe une multitude d’autres résolutions qui mettront fin à l'emploi qui est fait des excréments par les firmes de dépollution de l’eau à usage ménager afin de gagner de l’argent lorsqu’ils favorisent la pollution des eaux par celles, noires, des WC... jusqu’aux résidus des médicaments qui servent à vous « guérir » des maladies engendrées par cette société. Il y a un lobbying contre les toilettes à compost qui fait passer des lois par nos chers délégués, nos députés parle-et-menteurs, qui en réfrènent l’expansion.

C’est parce que, dans ce contexte social, compréhension bien étrange et ambiguë est faite avec les organes génitaux, à la sexualité, que nos déchets corporels doivent cesser de rester anodins, ignorés, comme on veut cacher les fonctions liées à la sexuation (le fait d’être doté d’un des deux sexes) et incidemment la pollution générale qui inonde tout ici. Car c’est sans doute dans cette étrange et ambiguë relation entre les excréments et la sexualité, la confusion entre un organe sexuel et une fonction excrétrice que l’affaire achoppe et que réside cette résistance à tant de simplicité. L’usage des toilettes à compost facile cette discrimination qui, par conséquent, discriminera davantage leur différence et leurs spécificités et consécutivement ce qu’il faut faire et ne pas faire en matière de « pollution ».

J’insiste sur le mot « compost » vu que, à la différence du mot « sèches », il montre mieux ce que deviennent nos excréments : des éléments d’un recyclage, une intégration des déchets humains dans le cours du temps et son usage, ce que ne montre pas le mot « sèches » qui conserve encore un aspect séparé, donc séparable de ses propres productions. D’autant que, pratiquement, les toilettes sèches demanderaient une disposition qui sépare les urines des fèces qu’un particulier n’est pas toujours à même, dans un premier temps, de faire. On ignore souvent que les urines sont stériles, chez la personne saine ; elles peuvent contenir des résidus de médicamentation, comme les fèces, mais elles sont stériles à moins de provenir d’un être très malade. Elles peuvent donc, elles aussi, être considérées comme des eaux de lavage, des « eaux grises ». Un dispositif dans la cuvette des WC peut faire cette séparation. Mais si on utilise un seau qui réceptionne aussi les urines, ces toilettes ne sont plus sèches du tout. D’un point de vue plus collectif, le seau est protégé par un sac à compost (c’est-à-dire, lui-même compostable) d’une trentaine de litres que l’on referme à peine plein et place dans un dispositif ad hoc, et il est ramassé par des municipaux selon des critères hygiéniques correspondant et sans gêne pour eux.

Le principe des toilettes à compost est simple : les matières fécales sont composées principalement d’azote qui empêchent leur décomposition rapide. En y adjoignant une matière carbonée (« on recouvre ses déchets de sorte à ce que l’usager à venir n’en soit pas importuné ») tels que sciure ou copeaux de bois, feuilles sèches ou broyat de paille, la décomposition des matières azotées qui donne cette odeur si particulière, est stoppée et commence aussitôt une décomposition de type compost. Cette décomposition, suivant qu’on retourne ou non le fumier qui perd vite ses aspects repoussants, tous les trois à quatre mois environ, demande un temps de compostage de deux ans, maximum ; au mieux il demande, avec des soins, six mois. De sorte que l’on peut confectionner deux réceptacles de un mètre cube qui seront alternativement utilisés tous les deux ans et le terreau servira pour les jardins. Ce procédé est, bien évidemment, industrialisable par une accélération du processus, l’usage de la lombri-culture, etc. à l’échelle communale. L’hygiène liée au procédé est connue et sûre. Les résidus médicamenteux eux-mêmes disparaissent dans le processus de compostage.

La différence de traitement des eaux grises des eaux noires est considérable. Les eaux noires (la chasse d’eau des affaires) qui contiennent les excréments humains sont réellement pathogènes, nocives et délétères, mais seulement parce qu’elles contiennent ces excréments. Dès lors que les eaux domestiques sont exemptes de matières fécales, elles peuvent être considérablement mieux traitées par lagunage, sans aucun problème, qui est moins coûteux en énergie (c’est le soleil et les plantes qui travaillent pour nous). C’est une des raisons pour lesquelles les consortiums de traitement des eaux veulent conserver le tout-à-l’égout actuel qui ne fait pas cette discrimination, car c’est dans ces « eaux noires » qu’ils trouvent leur légitimité ; et la propagande qui va avec.

C’est donc l’approche que l’on a des déchets en général et de ceux qui vous sont les plus intimes et dont vous voulez vous débarrasser au plus vite (vade retro, satanas !) qui résoudra un des aspects les plus immédiats de la pollution et, pouvant déteindre sur une compréhension plus générale de la pollution générée par cette société qui n’a que faire de ses déchets, sinon, encore le même déchet, dès lors qu’elle y trouve son compte, l’argent qui est, lui, incompostable, ces toilettes à compost permettront de saisir une autre organisation sociale qui saura générer moins de travail pour moins de déchets !

Note d'avril 2017 : la difficulté, en ville, est de trouver de la sciure ou autre matière carbonée de bonne qualité. J'ai remarqué qu'en utilisant du pellet de bois (ou granulé de bois) légèrement humidifié et auquel on a jeté une dizaine de gouttes d'huile essentielle de cèdre ou autre résineux, fait très bien l'affaire, car la cohésion de ce granulé tient sur sa déshydratation. Un sac de 15 kg (4 €) doit pouvoir tenir un couple de mois...

mercredi, 15 septembre 2010

Le remue-lemming

Je me souviens de la première fois où j’ai comme douté de la manière de penser de cette société alors que je lisais un article sur les lemmings : ces petites bêtes se « suicideraient » lorsqu’elles « se » savent en surnombre. Que j’ai trouvé cela étrange ! C’est étrange que des bêtes, pleines de vie, faites pour la vie, vivantes, « se » suicident. Et puis j’ai constaté que c’est lors (c’est dans l’article) d’une transhumance qu’elles veulent traverser un détroit et qu’elles s’y noient. Autrement dit, du fait de ce surnombre indiscutable, le besoin d’aller voir ailleurs leur fait traverser un détroit où elles pensent, estiment, subodorent trouver de quoi satisfaire ce surnombre. En conséquence, elles ont déjà l’habitude de traverser des cours d’eau ou des étendues d’eau et que le désir d’alors, leur fait entamer une traversée qui leur sera fatale, à celles qui s’y engagent. Celles qui restent, voyant leur nombre diminuer, peuvent penser qu’il ne leur est plus nécessaire d’entamer cette traversée. Aussi, je me suis mis à penser, moi, qu’elles ne se suicident pas, mais vont sur des chemins qui s’avèrent mortels pour elles, ce qui n’est pas du tout pareil.

Dans de tels cas, je remonte l’histoire à l’envers : pourquoi donc, veut-on absolument penser que le suicide est possible chez le vivant ? puisque c’est de cela qu’il s’agit, comme d’une fatalité humanisée, devant laquelle il ne resterait qu’à baisser les bras, à la subir, à s’y soumettre. Je suis simplet, je veux bien, mais là, ça fait beaucoup à avaler, comme grosse couleuvre : il faudrait se résigner à un fait dont on est, soi, responsable ?

On veut faire penser que le surnombre doit faire l’objet de sacrifice. Premièrement : pourquoi ce surnombre, chez nous, les humains, nous qui sommes sensés être sensés ? Et secondement, pourquoi un tel surnombre chez d’autres mammifères ou autres animaux ? Cela fait parti du cours de leur vie : l’abondance dont profite une génération qui se reproduit alors en fonction de ce qui lui est proposé, ne convient pas obligatoirement à la génération suivante, car cette abondance n’est plus si abondante en raison de ce nombre supérieur, soit de ce nombre même soit de la moindre abondance. Ce que je veux dire est : penser que nous sommes des animaux qui ne savent que profiter du moment de l’abondance du moment sans penser au lendemain, ne laisse dubitatif quant à notre maîtrise de CETTE abondance dont nous pourvoit la vie. De fait, si l’humain établit un équilibre entre son TRAVAIL et les FRUITS de ce travail de sorte à ne pas se reproduire en fonction de l’abondance que ce travail apporte ici et maintenant, il devrait être à même de ne jamais manquer de rien, ou de très peu. La question subsidiaire devient donc : mais c’est quoi cette misère ? Ne serait-ce pas cette manière d’interpréter le monde de sorte à penser que les lemmings « se » suicident dès lors qu’ils « se » sentiraient en surnombre ?

Et puis cela sous-entend surtout qu’une partie d’une population doit se sacrifier pour la survie de l’autre ; quant au choix qui doit être fait des uns et des autres, certains seront de toutes évidences plus égaux que d’autres. Ainsi, en résolvant l’énigme du lemming, je me suis fait apparaître quelques facteurs pour le moins improbables, d’une part et d’autre part, le fait que je n’étais plus tout à fait d’accord avec les interprétations que ces scientifiques sociaux, nés de cette société, qui ont tété son lait sur les bancs de ses universités et autres laboratoires, et qui ne pensent que pour corroborer par cette interprétation sa manière de fonctionner. Ça jette un doute aussi vivant qu’un asticot dans une pomme malade : les explications que cette société donne des faits issus de la « nature » sont sensiblement orientés et cela me gêne, car ce que j’aime, c’est de trouver une explication la plus vivante possible pour clarifier un fonctionnement vivant. Or, ici, selon elle, il s’agit de mort « volontaire ».

La trace qu’une telle constatation laisse, outre le doute dont je parlais tout à l’heure, est qu’on va chercher ailleurs les explications qui vous manque du monde, en lâchant celles qu’on veut bien vous donner. Comme on doit, en quelque sorte, tout refaire, trouver de nouvelles références, établir de nouvelles fondations, au début c’est assez long et pénible, incertain et vague, tâtonnant et hésitant. Puis on se fait ses marques, comme on dit. Il y plusieurs choses qui ne peuvent mentir : on respire, on mange, on boit, etc. Si les organes génitaux se situent près de l’anus, c’est tout simplement parce qu’ils servent eux aussi à la décharge, mais cette fois-ci, de l’énergie excédentaire accumulée de par le fait de vivre ; et la fonction de la décharge n’a rien de sale, sinon que pour une personne qui trouve les organes génitaux entachés de souillure, ce qui est moral et non pas vital. La charge se fait par l’apex des corps, par la bouche, les yeux, l’ouïe, la chevelure, la cervelle et la décharge par la racine, la base de sur quoi tout ceci est bâti, les pattes arrières, ce qui donne l’élan. Si la jonction supérieure des pattes avant s’en séparée de l’axe osseux du corps en se scindant en deux omoplates pour acquérir une mobilité extraordinaire, celle des pattes arrières est toujours et encore soudée à cet axe.

S’il ne s’agissait que d’une confusion passagère, je ne serais pas si coupant : c’est l’ensemble des interprétations du monde qui cherche à se correspondre à un fait global d’organisation sociale. C’est ce que je nomme un « état d’esprit d’un moment » dans le cours du temps.

Cette pensée est fondue tant à partir de celle que l’on nomme « dominante » que de celle qui ingère cette domination. C’est LE drame humain : le fait que le battu fait sien le fait d’être battu, et son « état d’esprit » aussi bien. Si les gens ne se révoltent pas, c’est qu’ils n’en n’ont pas « l’état d’esprit » et cet état d’esprit est tributaire du fait qu’ils sont battus, dans tous les sens du terme. Les victoires de ses idoles qui jouent encore à la balle répondent à ses désirs inassouvissables et pour une fois, encore, réalisés… par d’autres ! Ses renoms militaires sont encore des victoires pour d’autres que eux ; ses conquêtes commerciales accomplissent la pauvreté de leurs existences amoureuses. Et la ruée matinale qui les mène au travail restera stérilisatrice semblablement à cette cheminée d’usine ou la tonne de papier qui échoit dans ses poubelles bureaucratiques.

C’est cet « état d’esprit » qui limite l’ensemble des possibles d’une société donnée dans l’acquisition comme vécu immédiat du bonheur : certaines sociétés refusent le « progrès » parce que celui-ci détruit cet équilibre entre ce que la nature pourvoit et le bonheur implicite de l’organisation sociale qui le permet. Un état d’esprit si emprunt de lui-même qu’il en oublie totalement, même contraint par la nécessité et l’évidence, son intégration indubitable à la vie qui le porte, sur laquelle il pose érigé ses pieds ou repose son dos quand il dort, ne peut survivre à son idéologie, à son Idéal. Il sait, comme dans son interprétation du « suicide » des lemmings, qu’il va à la mort, mais refuse de la voir : un état d’esprit est comme une âme qui ne veut pas mourir alors que son corps périt ; elle laisse sans cesse penser le contraire de ce qu’elle est : un souffle qui disparaît lorsqu’elle quitte le corps mort, un rien d’autre.

C’est donc un fait de morale qui maintient ce monde et cette morale tient sur une interprétation qui retourne à elle-même, une tautologie, une maladie. Le remède est à la fois simple et compliqué. Simple, car il suffit de s’en défaire, compliqué, car il n’est pas si facile de s’en défaire… et pour quoi ? Elle ne laisse de place à rien d’autre qu’à elle-même ! Enfin… c’est ce qu’elle n’est plus si sûr de pouvoir croire.

mardi, 14 septembre 2010

La plaie de l'Idéal

Je pense que, du fait que l’enfant se rêve comme surpuissance sur le monde par cela-même que sa pensée se voudrait d'une surpuissance du même ordre, il se forme comme une structure de pensée à partir de laquelle il voudrait se retrouver face à l'impuissance – qui n'est que relative à ses ambitions irréfléchies – ; et il s'avoue ainsi indirectement dans une disposition, que je n’hésite pas à nommer « Idéal »... et cet idéal est un plaie.

J'ai longtemps cru que l'Homme est bon, mais c'est l'humain qui est bon : l'homme ou la femme sont bons individuellement, assez souvent, mais collectivement, ils sont très loin de mon Idéal. Ce sera donc mon Idéal qui devra perdre sa majuscule ! D'ailleurs, la grande majorité de ses oeuvres d'art sont des Idéals : corps parfait de Michel Ange, détermination optimale dans les sculptures soviétiques, maoïstes ou coréennes, le stakanoviste moderne qu'incarne le cadre, etc. toutes les allégories veulent montrer et montrent un Idéal, qui du poète, qui du dirigeant gouvernemental, qui du « père » d'une pensée, qui du sexe le plus performant (dont il est fait un usage irréfrénément stakanoviste), qui de la voiture la plus belle (qui cherchera à correspondre le plus exactement possible à un caractère adaptatif singulier et donc, dans la mesure de ce caractère, à une fortune, une manière de l'acquérir – qui est toujours d’appauvrir ses congénères ), qui de la nana la plus belle, la plus attractive sexuellement, la plus séduisante, la plus sexy-bandante-suceuse-baiseuse, etc. L'Idéal est la plaie de l'humain.

Ainsi, j'organise ma vie selon cet Idéal, qui n'a rien à voir avec la réalité. C'est peut-être une idée que je me fais de moi d'après la perception que j'ai de moi et qui doit par ailleurs correspondre à ma manière de vivre, tout en étant persuadé que  j'en suis loin, personnellement, que c'est quelque chose que je voudrais atteindre... et corrélativement où je ne suis pas présentement. Non pas que je n'essaie pas d'y parvenir, ou que je ne sache pas que je ne pourrai jamais L'atteindre, mais que je refuse de penser que je ne pourrai jamais y arriver, que je n'en suis pas capable... et les autres tout autant. Je ne suis pas assez idiot pour penser que je doive demander aux autres ce que je ne suis pas capable de réaliser moi-même, pourtant, cette image filigranique macule le fond de ma manière de voir le monde. Penser que l'Homme (je dis bien homme, pas avec un « F » majuscule), lui qui a massacré, violé, pillé, et le reste, est bon, n'est plus un filigrane, mais un voile d'une opacité d'au moins 25 % porté devant ma vision de ce monde et de la perception que j'en ai. L'humain est bon, sans doute, mais individuellement ; dès qu'il est en meute, il devient délirant, il lui faut un Idéal qui focalise ses actions  pour les rendre communes et, généralement, c'est assez loin de cet Idéal, affectivement aimant, socialement agissant, sexuellement parlant et intellectuellement pensant. Il arrive parfois, hélas, que cette opacité obstrue de ses 75 % la vision de certains de mes congénères, au moins, et pas obligatoirement des plus religieux.

Pour peu que cet Idéal soit appliqué dans les préceptes que reçoit l’enfance dans son grandissement, et nous, chez lui, voilà face à trois problèmes :
- l’enfant sait qu'il ne pourra jamais l'atteindre (il a raison) ;
- l'enfant veut l'atteindre (il a raison) ;
- l'enfant n'en a rien à faire (et il a raison) ;
avec pour chacune de ces trois manières d'y réagir, des conséquences très particulières. Car pour chacune de ces trois manières de réagir face à une mise en demeure devant l'Idéal, l’enseignement, lui, va réagir d'une manière qu'il trouvera toujours opportune, suivant la période d'une époque et de cette époque dans son évolution ; manière à laquelle l'enfant va lui-même réagir suivant son caractère, son être adaptatif.  Sans prendre en compte l'influence des différents Idéals de chaque personne qui le côtoie sur lui, l’enfant doit s'adapter à ce qu'on lui demande, c'est une loi biologique immédiatement liée à l'enfance, et, à mon avis, on devrait faire beaucoup plus attention à l'application des modalités de cette loi, à certains de ses critères d'application et principalement pour ce qui regarde le petit humain. (En fait, de cette loi, il n'en est rien su et ce qu'on veut en savoir l'est d'aussi loin que la galaxie Andromède, car elle détruit l'Idéal).

L'enseignement contient et l'Idéal et la manière de mettre face à lui l'enfant, c'est à dire le but à atteindre et la manière de l'atteindre, par ordre chronologique. Il est possible d'imaginer un Idéal qui laisse à l'enfance le soin de se comprendre soi-même, avec l'aide de l'adulte puisque cette loi qui remarque pour la spécifier la relation de l’enfant à l'adulte dans le cours de son grandissement, n'a pas du tout exclu la présence de cet adulte comme support vital. Ce support vital n'est pas suffisant pour certains, il faut aussi y adjoindre un Idéal dans lequel il puisse se reconnaître et justifier affectivement cette présence avec l'enfant. Ici, cet Idéal est une transformation (pour le moins) de l'amour de l'adulte pour l'enfant, ce sentiment qui le lie à lui biologiquement, du fait de sa dépendance biologique à l'adulte ; et par « dépendance biologique » j'entends l'amour, le bon soin, la protection, la nourriture et la réponse aux questions. 

C'est comme si l'Homme et la Femme avait quelque chose à justifier de son existence et qu'on veuille le faire comprendre à l'enfant qui n'en a rien à faire, par la persuasion invasive et le plus souvent par les coups et les blessures physiques (circoncision, infibulation, scarification, tatouage, coups de fibules, tortures diverses, etc.), le chantage affectif et les interdits relatifs à la sexuation (le seul fait d'être pourvu d'un des deux sexes).

Mais l'Idéal ne vient pas seulement de l'enseignement, enfin... toujours directement. Suivant le cas d'un des trois que j'ai dénombrés, l’enfant va réagir suivant ce qu'il, lui, consent de ce qui serait parfait pour lui, c’est-à-dire, au mieux de cette adaptation qu'il voudrait la plus aisée possible, la moins pourvue en anicroches, souffrances, douleurs, obstructions, buttes, interdits, etc. auxquels il doit se confronter.  Sans se mettre immédiatement en butte, comme chez l'adulte, au paradoxe de l'Idéal qui se trouve être dépourvu du perfectible puisqu'il est LE parfait, comme fait de conscience et d'infériorité que son détenteur supplante avec plus ou moins de malheurs et d'impuissance, l’enfant n'en ressent pas moins dans son fors intérieur, ce qui lui coûterait le moins des peines qu'il y a à vivre... lorsqu'elles se présentent à lui.  C'est l'Idéal qui transforme les avanies en coups du sort et résout ces avanies selon ce qu'elles ne sont pas : des coups du sort.

Et l'éducation, au lieu de bien montrer, tranquillement, que l'Idéal est une solution d'impuissant, en ce sens qu'Il manifeste un retrait quant à des solutions, des options, des choix, des positions qui ne font pas parti de Ses positions, choix, options, solutions, loin de suivre le chemin évolutif (assez semblable à sa compréhension de la mort) par l'enfant, module cette impuissance manifeste de l'Idéal à appréhender le monde selon ce qu'il ou Il est, par une autre forme d'Idéal : religion ou mécanisme, principalement. Cette éducation s 'appuie pour cela, on le sait bien, sur la satisfaction sexuelle emprisonnée dans cet Idéal. De sorte que l'on peut comprendre que son énergie, l'énergie qui lui est nécessaire pour exister et manifester son existence en pratique, provient de cette satisfaction sexué de la vie qu'Il a emprisonnée.

Arrivé à un tel stade de dépassement de la vie individuelle, personnelle comme simple élément de la vie intégré dans la vie comme général à la vie, l'amour devient un Idéal, au même titre que la haine ou la poursuite du travail, de la richesse argenteuse ou la recherche d'une énergie supra-efficiente comme le nucléaire qui n'a jamais fait ses preuves depuis tant d'années qu'il cherche à vous en remontrer sinon, précisément que dans les formes de cet emprisonnement enracinées dans le futur et dans le présent, dans ce qu'il est, ce présent futur et sa consommation de travail dont l'unité est de l'ordre, maintenant, du millier de tera-watt avec une rentabilité minimale de 70 % pour ce qui est de son gaspillage, de sa pollution, de son excédentaire, en tant que mesure d'économie, l'idéalisation de l’interdépendance de chacun de nous avec le nous, ayant pour base de mesure la mesquinerie de chacun pour le malheur de tous, l'argent.

La raideur de l'Idéal est telle que, même lorsqu'Il se spécifie comme un laisser-aller, ce laisser-aller devient une obligation. Il déforme les relations entre amoureux à tel point que des séparations sont inutiles ou d'autres absolument nécessaire et immédiates sans qu'elles s'opèrent. L'Idéal a son mot à dire sur la liberté alors qu'Il est une prison et ne voit la liberté que selon Ses critères et ne l'admet que selon Eux. L'Idéal est la plaie de l'humain, plaie affective, sociale, intellectuelle.

Je pourrais dire, à la manière d'un livre qui parle de la position sociale de la femme dans les quelques variations d'organisations humaines, qui remarquait que la femme n'a jamais été plus libre que dans les société où son frère (matriarcat) comme son mari (patriarcat) ont les mêmes pouvoirs sur elle : ne pouvant jamais s'entendre entre eux de ce qu'elle doit faire, elle fait ce qu'elle veut ; hé  bé, c'est parce qu'il y a tant d'Idéals que je puis trouver un semblant de liberté, car chacun d'eux trouve en moi une part qu'il chérit alors que je ne suis rien de tout ce qu'Il désire. Les mailles de chacun de Leur filet m'ont ici ou là rarement emprisonné – et je me débats parfois avec tant d'énergie que je préfère, comme le renard, y perdre une patte que de me voir entre Leurs mains – : il suffit de se montrer simplement sous les couleurs de la porte de sortie qu'Ils voilent, qu'Ils auto-voilent chacun à sa manière, pour qu'Ils ne vous aperçoivent plus. Car la frayeur que soulève la vue de la porte de leur liberté est telle qu'Ils trouveraient tous les moyens possibles et imaginaires pour vous tuer cette liberté et la vie qui va avec.

Je redois à Frédéric Wolff, dans son livre « Qu'est-ce que la démocratie ? » une porte de sortie formulée dans les interlignes de son ouvrage : pour nous extraire de ce marasme, il y a finalement une solution qu'il est aisé de formuler : « Nous devons organiser notre monde dans le savoir abrupte que l'humain est certes bon, individuellement, mais mauvais, collectivement ». Autrement dit, nous devons nous organiser de sorte que l'Idéal ne nous gouverne pas, ni celui-ci ni celui-là.  Nous devons nous organiser de sorte qu'il nous soit indispensable de diviser le pouvoir que le pouvoir délégué octroie dans l'accomplissement d'une tâche, à tel point que l'humain, détenteur de ce pouvoir, ne devienne jamais nocif : nous n'avons QUE cela à faire !

mercredi, 01 septembre 2010

Et qui vaut taille

Ces films de guerre sont vraiment là pour spécifier que le peuple et ceux qui le composent, c’est de la vale-taille, bon à être sacrifié pour une cause dont il ne soupçonne pas la grandeur, tant il est petit et à laquelle on demande pourtant d’immoler de la vie. C’est de bonne guerre lorsqu’on veut que ceux qu’on voudrait qui se contemplent dans de telles images, restent sans critique, cois, et supporters ; et aussi un bon apprentissage à acquiescer la vue du sang d’un autre, étranger à cette cause qui le dépasse, mais dont il a fait sienne comme un pomme dans une bauge, prêt à en découdre pour fendre la peau, percer les cuirs et trancher les trucs qui peuvent saillir qu’on a eu le malheur de laisser dépasser au mauvais moment et au mauvais endroit. Le seul fait que ce peuple va se porter devant de telles images, montre son approbation à un tel projet d’endoctrinement qui signifie, ma foi, qu’il ne sait pas faire autre chose de son temps.

Bon, j’exagère : il est possible que ces films où il faut sauver une fille ou un soldat, ou encore où un héros doit démontrer la justesse de ses vues quant à la justice, l’équité relatives des classes et leur maintien, soient comme une purge du pire et comme un médicament préventif, à ceci près que la dose est assez brutale, pesante, congrue et rouge. Je ne sais. Et puis il y a du rustique dans ces évocations, des barbes, du muscle et des regards furibonds. C’est, dis-je, peut-être une distraction, je ne sais car ce sont là des mœurs que je découvre soudain.

N’empêche, la pédagogie consistant à montrer par l’exemple des possibles aussi violents laisse songeur. Tous ces efforts, tous ces cris, toutes ces tourmentes, ces abattements, ces trucs d’hommes, en gros (deux muscles, un cerveau) qui en veulent dur à cette tâche qui consiste à se défaire d’un autre homme, dénommé « ennemi » alors qu’on ne le connaît pas… il y a comme un goût de revenu, de vomi qui rend amère la bouche. Je suppose qu’on attribut à cet ennemi la même alacrité à défendre la cause de ceux qui le commandent et qui lui disent qu’il est bon, non pas pour lui-même, mais pour un ensemble dans lequel sa présence future restera dans l’aléa des conjonctures au regard de la manière dont il s’en sortira plus ou moins sauf, avec la même hargne, finalement, à défendre, dans cette attaque viscérale les pensées qui donnent une direction guerrière à ses gestes. D’ailleurs, il a subit un entraînement, le gars de l’image, propre à précisément l’obnubiler dans l’exécution de cette entreprise propice à lui donner du cœur à l’ouvrage, une sorte de conditionnement où le sujet de sa propre personne passera sans penser outre à son accomplissement. Décerveler un humain, finalement, ce n’est pas bien difficile : il suffit de lui crier dessus, de le forcer à faire ce qu’il n’a pas envie de faire et de le confronter à une mort sociale s’il n’est pas d’accord de n’avoir pas envie ou même, pour de plus rétifs, à l’enfermer dans un espace exigu en le nourrissant de pain sec et d’eau. Ca s’est vu, ne croyez pas que j’exagère ! D’autres, pour moins encore, se sont vu brûlés, décapités, empalés, écartelés, boursouflés d’eau, les os broyés aux coins, les yeux crevés et d’autres organes encore totalement et soigneusement maltraités pour ne plus fonctionner correctement.

C’est pourtant ce que montrent ces films et par le menu. Il faut bien admettre, du bout d’un regard comme un long bâton dérange un cadavre de chat assez avancé, qu’il doit y résider un plaisir ou un autre à tant d’exposition. Ces charges pleines de fureur, de cris et d’explosions, de projectiles, surtout, propulsés à bras d’humain suite au déclenchement volontaire que stimule la gâchette (un relent de puissance : « ha ! je l’ai eu ! » dans son désir bouffi d’orgueil) ou encore à l’aide d’une poudre noire, dite « à canon », lancés dans une seule direction en escomptant que le hasard, aidé du nombre, portera une efficacité des plus rentables en blessures mortelles, que l’on distingue comme dans un brouillard tant est dense la hargne qui fourmille l’air de la quantité mise en œuvre, abasourdissent par leur ampleur. A nouveau, c’est précisément l’objectif de telles images : le nombre. Pour faire une guerre, il faut du nombre et beaucoup et de tout.

C’est le nombre qui fait l’armée et si Napoléon a gagné ses premières guerres en s’appuyant sur une technique inédite, celle du tirailleur en ligne - individu qui prend sur lui seul la victoire, en beaucoup - plus tard il a admis que c’est le nombre qui la provoque ; à peu près correspondant à celui du succès en nombre de ce spectateur de ces films, spectateur qui retrouve fidèlement ses mêmes figures de figue sous des déguisements différents qui le rassure quant à ce succès dont il veut avoir la certitude ferme. C’est pour cette raison que je doute de sa sincérité lorsqu’il m’affirme qu’il va visionner ces films comme moyen cathartique ou préventif. Ce serait plutôt libérateur, à mon sens. De tels films le libère de cette agressivité qu’il a accumulé ailleurs et dont il n’a pas pu, d’une part se défendre et d’autre part se défaire. Ces atrocités le libèrent de son manque de liberté qu’il ne sait pas entretenir, caresser, choyer, conserver, aggraver, déployer. Outre la rencontre amoureuse, c’est la conquête de la liberté qui sert d’appui à cette constitution affective qu’il veut retrouver en images et qui lui fait débourser ses menus sous à l’entrée du cinéma. La conquête de la liberté, vue au cinéma, est paradoxale, puisqu’en images, alors qu’elle est un fait social, individuel, une relation en partage et une réalité qui trouve sa description dans et à travers ses mots. Or, au cinéma, en images, elle n’a que la consistance de l’image, une vision et une vision qui se déroule dans un accomplissement qui restera en images puisque les lumières revenues, rien n’a changé, tout est comme avant, peut-être une sensation de rêve persiste comme l’absence d’un temps mort, une mi-temps, un entracte, mais rien de plus, matériellement, socialement ou collectivement responsable de ce qui arrive.

Suivant ce schéma simplissime de la conquête de la liberté mise à mal, les gens se satisfont de ce qui est, car, même en image, cette liberté chérie a trouvé à se manifester et cela peut satisfaire celui qui l’a perdue. Et pour cela, les armes détonantes de toutes leurs pétarades, de leurs estafilades sanguinolentes, de leurs entailles béantes, de leurs coups bas, traîtres, vicelards, pervers et maudits, que des trucages méticuleux s’efforcent de rendre les plus vraisemblables possibles, les déplacements de forces et de force, les subtiles moqueries d’un hasard ourdi, les précautions rendues dérisoires d’accéder à cette liberté comme les espoirs tendus à l’extrême de l’acceptable toujours repoussé dans les limites de l’improbable, loin de le faire jouir de cette conquête de la liberté parce que réellement vécue, le pose plutôt dans des stades d’angoisse dont il se sent sécuritairement protégé par l’image qu’il contemple et dont il connaît la consistance, et lui montre un aveu : son peu de puissance qu’il puise en lui de la comprendre, de comprendre ses modalités – qui sont souvent à une distance astronomique de ce qui lui est montré car beaucoup plus proche de la réalité – ses entournures et sa multiplicité de formes, et désagrège son appétence à l’accomplissement d’un tel projet en le comblant d’ersatz, d’images d’icelle.

Non, ce n’est pas moi qui suis moral, ce soir, ce sont ces films : par rapport à eux, j’en suis dépourvu.

lundi, 30 août 2010

La rencontre : trois mots

Il n'y a pas d'articles "trialectique" sur l'encyclopédie Wikipédia, la police qui y règne en maîtresse est trop peu apte à admettre une telle liberté, à moins de la serrer de très près pour la rendre indigente. Il y gît cependant discrètement un unique article qui l'évoque indirectement : celui sur la rencontre.

La rencontre est un évènement : c'est la conjonction de trois facteurs dont deux sont dynamiques et un statique, ou bien le plus souvent deux de ces facteurs sont statiques (ils ne bougent pas dans leur être-soi) tandis que le troisième est dynamique et vient bouleverser leur immobilité pour les fondre ensemble.

La rencontre est le résultat de cette conjonction comme nouvel élément, un fruit du temps.

Par éléments statiques, il est entendu que ces éléments sont dans la continuité de leur être, de leur état d'être, et par conjonction dynamique, il est entendu que l'élément en question n'est pas dans la continuité de son être : il se présente dans la rencontre comme un élément fortuit (temporel, social, conjoncturel), peu maîtrisable bien que pouvant être un objet prédictible ; il propose une altération à ce qui est et cette altération, acceptée par les deux éléments statiques, est intégrée comme jonction à ces deux éléments qui se fusionnent dans un ensemble nouveau.

Ce facteur dynamique peut se trouver dans des moments sociaux prévus à cet effet (fêtes, vacances, manifestations diverses : bals, manifs, colloques, conférences, festivals, etc.) propices à son expression. Son caractère fortuit, cependant, ne pourra pas être à proprement parler provoqué, car c'est toujours la conjonction intime des trois éléments disparates de la définition qui produit la rencontre.

On peut parler de rencontre pour deux personnes, incitée par la sympathie, l'humour, la gentillesse, le respect (le fruit peut être un amour, une amitié, ou en cas de contraire, une haine), pour deux idées (le fruit peut alors être une invention), d'évènements sociaux qui sont la conjonction d'une disposition sociale et d'un contexte social : ici l'évènement détonateur ou détonnant, permettra à la société de s'ébrouer pour accoucher d'une forme plus moderne de la liberté de la rencontre.

Il y a encore rencontre entre la graine et le sol qui l'accueille auxquels vient s'ajouter l'eau de la pluie en permettant à cette graine de monter en température et de croître.

Une découverte est toujours le fruit d'une rencontre, de la conjonction intime de trois éléments. Et à propos de la découverte, chose remarquable, elle est toujours deux événements, au moins deux conjonctions au même moment en deux endroits différents de notre planète, sous une forme similaire d'une même rencontre, d'un même fruit : on ne se rencontre jamais seul.

Du point de vue de la philosophie, la rencontre est une nécessité sujette à une contingence : la rencontre est le paradoxe en soi (car le contingent qui règne sur le nécessaire n'est plus du contingent et, inversement, le nécessaire assujetti au contingent ne peut être nécessaire, car ce nécessaire peut ne jamais se réaliser, trouver son effectivité à travers la contingence où il perd son aspect obligatoire). Le paradoxe réside particulièrement en ceci que pourtant, la rencontre se réalise et réalise à la fois sa nécessité et la contingence qui l'a créée : c'est ce qui en fait son côté merveilleux qui se renouvelle toujours.

Certains la cherche sans fin dans le jeu, d'autres la trouve fortuitement chez les autres. La rencontre est la négation et le parachèvement du hasard.

mardi, 10 août 2010

Le corps de l'os

Je viens de visionner, pour la quatrième fois, le dernier tube de Eminem et de Rihanna. D’abord, la manière de chacun des deux sexes est très bien défini : respect des proportions physiques et des conventions sociales, ressenti d’une cage que jouent les rôles conventionnels dans la relation entre les sexes et de vouloir faire autre chose, les acteurs sont beaux et la relation semble normale.

J’ai trouvé les paroles sur le web.

Ca commence par la fille, mais pas celle du film, celle du texte, la chanteuse. Elle part sur une mélodie au tempo de 90 à la noire, avec deux ou trois croches par-ci par-là et appuyée par un piano quasi-arpège et discret. C’est une mélodie qui part bien dans les aigus sur le temps fort (2 et 4) et c’est super entraînant et très féminin. Puis vient le mec en marcel : même tempo (c’est de l’à-peu-près car la musique a du rubato) mais à la double croche, scandé par le rythme des mots en mélopée et avec le temps fort sur la levée des temps (le propre du rap, quoi). Ce qui fait que lorsque revient à nouveau en refrain la mélodie féminine et qu’on garde les mêmes temps forts du mec sur le même rythme, un frisson vous prend la tête et le cou et peut même descendre dans le dos. J’adore tant ça se complémente.

On voit très bien la diction de la chanteuse et, à la prononciation du mot « hurts » (blesser), le mouvement de la lèvre qui se redresse pour montrer des dents signifiant « ce bousculement que tu m’obliges sans douceur alors que tu voudrais que je l’approuve totalement, me heurte, je suis bien marrie de devoir le supporter » et elle répète la mimique au dernier refrain. Ca n’a pas l’air facile entre tous les deux.

On comprend vite au ton du gars qu’il y a quelque chose qui cloche pas. Le gars est au lit avec la fille, en position ventre contre dos. Ils dorment. On voit ensuite la fille assise en tailleur, jouer du regard avec le feu qu’elle porte dans ses mains. La fille se réveille et remarque sa main dans la main du gars (tatouage). Hic. Geste de colère (« Je me suis faite encore avoir ! Zut ! ») Le garc pige pas. Il chante dans un champ d’herbes sèches, l’air déterminé à vouloir s’expliquer coûte que coûte, à vouloir se faire comprendre. Et d’ailleurs, dans le texte, il semble bien qu’il s’agisse d’une explication. Il est fou amoureux de la fille qui ne veut pas de ses manières. Mais lui, ne sait pas comment faire autrement, il a pas appris et la chanteuse d’admettre alors :

Just gonna stand there and watch me burn
Well that’s allright because I like the way it hurts
Just gonna stand there and hear me cry
Well that’s allright because I love the way you lie
I love the way you lie

(en mauvais modern français, ça donnerait un truc dans le genre :
Je te demande de rester là où tu es et de me regarder embrasée
Rien d’autre, parce que c’est la manière dont j’affectionne cette brûlure
Je te demande de rester là où tu es et de m’écouter crier
Il en est ainsi parce que j’aime la manière dont tu mens
J’aime comme tu mens.)

La pilule qui contient le fait de se faire berner et d’aimer cela, a du mal à passer ! « Oui, mais… tu comprends, je ne peux pas m’expliquer autrement, c’est ma manière de faire, le comment je vis et même l’unique voie que j’ai de vivre. » dit le gars en frappant dans les murs. Bien sûr, des moments heureux existent, pour la fille, dans de telles conditions, mais est-ce pérenne ou même vivable en dehors de ces moments agréables ?

La fille doit supporter le mec… et finit par le faire, faute de mieux. La violence masculine qui n’est en rien et nulle part obligatoire, due à sa force physique accompagnée d’un volume musculaire plus importante que celle féminine, trouverait une justification dans sa propre violence et non pas dans sa tendresse. Ici, précisément, il s’agit d’affirmer que la tendresse est violente chez l’homme et qu’il n’y a rien à faire : il a ça dans le sang. C’est l’adrénaline inhérente aux androgènes, à la testostérone, aux couilles. Ce n’est pas que la violence ne doit pas exister quelque part, mais ici elle est présentée comme indispensable à la relation pour que le masculin puisse y trouver son compte. Il faut être raide si on veut pénétrer et cette raideur est encore et toujours ressentie comme une raideur musculaire alors que le corps caverneux et le corps spongieux ne sont en rien des muscles : il n’y a rien de musculaire dans le pénis, sa raideur n’est en rien due à de la musculature : pas besoin de faire de l’haltérophilie pour bander, mon pote ! C’est un mythe. Même les filles s’y trompent.

La naissance physique de ce mythe de la musculature comme seule source de raideur est la violence. C’est la violence qui excite et cette excitation est une ouverture du système artériel du bassin réagissant par la mise en fonction du système nerveux para-sympathique dominant le système nerveux sympathique. Il n’y a de musculaire que l’expression de la violence dans le reste du corps, mais dans le pénis, du muscle que tchique : que du SANG et du nerf à la pression artérielle augmentée par la violence, l’adrénaline de la violence.

Ainsi, si la copulation est liée à la violence, ce n’est, dans ce cas, que parce que le masculin, du fait de cette violence augmentant substantiellement la pression artérielle de l’ensemble du corps par le rapetissement du système veineux, peut, alors, bander… du fait d’avoir égaré la tendresse. Car, la tendresse, elle aussi, agit sur le système nerveux para-sympathique, avec une montée de tension plus douce et une coordination à l’autre plus concordante et sans violence remarquable aux deux personnes en présence.

Cette conformation du pénis sans muscle aucun est si universelle dans les formes que dans les temps, se trouve confirmée dans ce fait que certains animaux (les poissons et les reptiles, par exemple) ont besoin d’un os spécial à la place d’un muscle que l’on trouve chez les mammifère, à la base du pénis, destiné à faciliter l’intromission ; mais, d’expérience, ce muscle serait-il absent que rien n’empêcherait pour autant cette intromission : le muscle n’a rien à voir avec la force sexuelle attribuée au pénis, c’est un leurre, les filles !

D’ailleurs on le voit bien dans ce clip : la seule mélodie est du féminin, la mélopée masculine est martelée, incisée, puissante, musculaire autant que son comportement et notre héros se sent bien diminué de ne pouvoir plus s’exprimer hors de sa musculation. Les relations dans nos banlieues sont de cet ordre : la force masculine avec les grosses chaînes et les autres gros trucs, contre la douceur de la féminité perchée, la raie des fesses moulées, sur des talons qui l’empêche de courir, prisonnière de son rôle. Pour la femme, la force masculine est un jeu, un jeu sérieux. Elle en est réduite à l’objet : voilée ou dévoilée.

Dans les civilisations où son rôle social, à la femme, est prédominant, le masculin qui a le plus de succès est celui qui est pourvu du plus d’humour, et non pas de muscle. La force masculine sert, normalement, de défense ; elle a peu d’usage autrement : la chasse, c’est affaire de ruse et de finesse. Elle est devenue nécessaire avec l’arrivée du labourage. Auparavant, c’était la femme qui s’occupait du jardin. Puis est venu l’observation du retour du grain à l’endroit où on l’a trouvé l’année précédente pour comprendre qu’on pouvait provoquer, comme dans le jardinage, ce retour en un endroit choisi. Là où la seule force féminine suffisait, ici la force masculine est devenue nécessaire, car semer c’est bien, mais il faut protéger la graine des autres animaux et donc l’enfouir, la cacher. Et retourner la terre ce n’est pas facile. Ce n’est qu’au fur et à mesure que la technique culturale s’est améliorée que ce travail a été laissé aux moins violents, car les plus musculeux pouvait s’en dispenser d’une part du fait du rendement nouveau apporté par cette technique et d’autre part en l’imposant aux plus faibles. Et comme l'importance alimentaire de l'apport de l'agriculture se faisait de plus en plus sentir, de même qu'on parle de "chasseurs-cueilleuses" par ordre d'importance (alors qu'en réalité, l'apport de nourriture animale a toujours été nettement moindre que l'apport féminin de la cueuillette), on parle de prépondérance du cultivateur et plus des jardineuses.

D’autant que les plus rusés avaient profité de la « faiblesse » féminine pour usurper ses pouvoirs « de fécondité » en devenant son intermédiaire dans la prêtrise et ainsi dominer, par la violence, cette femme. C’est que les hommes avaient la vie menée dure, dans cet intercalaire entre le paléo- et le néo-lithique. Ils étaient sacrifiés à la vie (on ne savait encore rien de leur « utilité » dans la reproduction) pour le retour du foisonnement de la vie. Mais enfin, ils réussirent à supplanter le féminin et ainsi est né le patriarcat.

A ce sujet, j’ai un petit mot sur l’énigme soulevée par Sigmund Freud à propos du « meurtre du père ». Cette expression n’est valable que dans la société patriarcale, car ça ne s’est pas tout à fait passé comme il l’a compris, avec Œdipe. Il faut se replonger dans le contexte où le père est un père social et en rien un père géniteur, car ce n’est que tardivement que l’on remonte à cette connaissance de la relation entre le coït et la reproduction de l’espèce, avec ses aberrations qui n’ont été remises en cause qu’au xixème siècle. Il ne s’agira donc pas du meurtre du « père » mais de celui du mari de la mère. Et cette constatation ouvre un peu la fenêtre du passé. Pourquoi donc, le fils tuerait-il le mari de sa mère ?

Il n’a pas le droit de copuler avec elle, ni avec ses sœurs (même si les légendes relatives à la naissance du monde le montrent : sans doute que par logique, le fait d’être alors frère et sœur parce que sortis tous deux de la matrice du temps, autorise, cette fois-là, cet « inceste » encore pratiqué par les reines dans la société égyptienne assez tardivement) car il est de son sang, du sang de la même lignée de ses ancêtres : ses ancêtres sont ceux de sa mère et tous ses ancêtres sont féminins, bien sûr. Faut bien piger ça, sinon, ça va grincer.

La femme est la détentrice de la lignée d’un groupe humain, l’homme en est le soutien, rien de plus. Il n’était pas concevable, à l’époque, de se défaire de l’homme, du sexe masculin (comment baiser sinon, comment pratiquer l’amour si bon ?) à la différence des rancœurs d’aujourd’hui. Mais pour autant, l’utilité de l’homme était le plaisir d’être ENSEMBLE, chacun dans ses attributions. C’est de ce lointain que descendent encore nos attributions sexuelles. Le patriarcat voudrait bien l’ignorer, mais je suis là, avec d’autres, qui veille à ce que cette lumière, avec d’autres, reste bien brillante, hors de l’obturant champ wikipédien. Il est probable que ce « meurtre » ne soit perpétré qu’uniquement vis-à-vis du roi, du mari de la reine. La reine ne peut avoir qu’un seul homme et l’homme n’a d’utilité que pratique, avec son éjaculation humectante et sa détumescence. De plus, ce con, il éjacule à n’importe quoi : on le pend, il éjacule ; on le dépèce, il éjacule ; on le bat, il éjacule ; etc. Ce cycle d’érection et de détumescence n’est pas toujours bien en adéquation avec son moment.

Le fils n’a pas pour objet de remplacer le mari de sa mère, tel que l’énonce Freud : ici le mari de sa mère n’est pas son père génétique, mais son père social. C’est loin d’être identique. Pour exemple : l’inceste, chez nous tabou, du père et de la fille, n’a pas lieu d’être entre la fille de sa femme, au mari, puisqu’il n’est pas de sa lignée, à elle, à la fille. Et, effectivement, s’il n’est pas toléré, il est admis, dans les sociétés à filiation matrilinéaire. Par contre, chez nous où le père est le « chef » de lignée, cet inceste est absolument tabou, mais pas vis-à-vis de sa nièce : la fille de sa sœur, comme deux-trois mariages de rois en France, car elle n’est pas de sa lignée mais de celle du mari de sa sœur. J’avais trouvé un livre qui établissait ainsi une gradation du tabou de l’inceste en fonction de la forme de la lignée – et je l’ai établi en fonction de l’héritage : on hérite pas des mêmes choses ici que là ! Et la constatation de cette auteure a été de dire que là où la femme est le plus libre, c’est dans une société où le frère et le mari ont exactement le même pouvoir social sur elle et comme ils sont incapables de s’entendre, elle y fait ce qu’elle veut !

C'est que face à ce sentiment d'inutilité, lorsque le masculin est en-dehors de la relation amoureuse profonde, l'homme a besoin de se sentir comme indispensable: il émet le désir de protéger et il se met à protéger. L'amour de la femme n'est pourtant pas si compliqué, du moment où il se donne. Elle garde ce qui lui semble opportun et n'hésite pas à rejeter ce qui lui empêche d'accéder à cet opportun avec la satisfaction de la confiance... même si le résultat n'est pas toujours à la hauteur de ses attentes. Cette protection du masculin ne correspond donc pas tout à fait à ses attentes, sinon que la confiance sans faille en elle, au moment opportun. Mais, en dehors de l'amour profond, il y a là encore une faille dambigüité que toutes les confiances du monde ne pourront pas dissoudre. Et, finalement, la paternité répond à cette incertitude par des chaînes en voulant se donner l'importance d'une possession qu'il pourra donner en héritage. Si l'enfant appartient encore à ses parents, c'est que chez ces parents, un est propriétaire de l'autre, par ordre hiérarchique : ce désir de détenir ne correspond en rien au plaisir de donner.

Ce plaisir (pas désir : plaisir) de son contact de chair, cette gigantesque et savoureuse douceur, la grâce qui y répond et l'attente que l'on vit d'y correspondre, de sentir le proche de la chaleur et de la sensation qui vient, attentives et perdues de soi : le baiser d'amour ! qui unit si fort les corps à l'âme et cheville deux âmes à un corps ; l'intime contact intime et sa force profonde. Il n'y a pas de technique pour aimer, il n'y a que la sensation d'aimer qui se vérifie en elle, en soi, en nous. C'est le ciment de la confiance en soi et en la vie, en l'autre. C'est précisément ce que ne peut supporter la violence et qu'elle détruit par tous ses moyens de malade. Elle nomme l'amour de loin, le nez et les lèvres pincés pour n'en être pas submergée par la vague.

Nous ne sommes pas encore sortis de ce truc selon lequel la femme devait être protégée par un homme, frère ou mari. Et je pense, hélas, que nous sommes loin d’en être sortis ! Mais poursuivons l’Histoire, la nôtre. Pour ce que j’en sais, c’est que le mari de la reine devait renaître chaque printemps, après avoir été enfoui dans la terre, avoir traversé les Enfers, goûté à la pomme d’or et réapparaître avec l’étoile du printemps : suivant la latitude ce sera Vénus ou Sirius. Et pour revenir des Enfers de la froidure de l’hivers, il faut y être enterré. A mon avis, c’est le Fils de la Reine qui devait s’en charger : le Fils tuait le Mari de sa Mère pour que celui-ci ressuscite au printemps, donnant matérialité et visibilité au désir de la vie jaillissante. Bien évidemment, sera choisi pour donner réalité à ce phénomène, un autre beau jeune-homme qui deviendra le Mari de la Reine, le roi. Légitimement, dans une société à filiation matrilinéaire, le fils n'a fait que protéger la mère et sa lignée en tuant son mari violent.

Le complexe d'Œdipe interprété par S. Freud demandait cette précision. Ce n'est que dans le contexte présent, et sans doute pour une raison sensiblement identique, que le fils veut se "substituer" au père-mari dont l'autorité est une violence socialisée, car ce fils est détenteur d'un amour incommensurablement plus fort que celui de son père pour sa mère, selon lui, car vécu. Régler ce problème est facile : dire à l'enfant qu'il peut aller voir ailleurs s'il en est de même et pour se faire, de l'exprimer, cet amour, aussi ailleurs. C'est ce qu'autorise une société à filiation matrilinéaire (où le père-mari est rarement violent) mais interdit de nos jours, car l'expression sexuée est dissociée de l'amour et inversement. J'en parlerai ailleurs, sans doute.

Le différé et l’indirect, le propre de l’humain comparé à l’ensemble des autres animaux et qui est le seul élément en quoi il diffère, se manifestent premièrement dans la mémoire et sa coagulation : les mots ou images verbales. Le siège de la mémoire n’est pas la cervelle, enfin… uniquement la cervelle, la mémoire se situe dans l’ensemble du corps et de ses organes, muscles, nerfs, sang, lymphe, etc. Souvenez-vous de cette fois-ci où vous êtes piqué avec cette aiguille, ou bien de cette peur effroyable que vous avez ressenti à la vue de cette scène terrible : la mémoire est dans le corps, le cerveau lui donne la substance du mot, de l’image verbale et cette image verbale devient à son tour motrice de mots, d’autres images verbales : c’est le différé et l’indirect. Il lui arrive aussi de créer des mots, des images de mémoire pour se cacher à elle-même, cacher ses hontes ou des douleurs trop fortes.

De même que l’invention de l’agriculture repose sur une série de constatations naturelles ayant trouvé une logique applicable par une technologie évolutive, de même l’emprise du monde sur l’esprit humain, avec ses craintes reposant sur des images verbales, intérieures, des ombres et la peur pour sa vie, a besoin de lumière, d’autres mots, pour se rassurer en « s’accaparant » le monde, comme le disent les philosophes et les capitalos, par les mots. Ainsi s’instaure une autorité sur le monde dont la manipulation est plus ou moins adroitement socialisée et où la force musculaire n’a plus le répondant qu’on en attendrait. C’est compliqué tout ça.

La violence contre la femme est née lorsque ce mâle s’est rebellé contre ce « sacrifice » du mâle. Cette rebellion, cette violence a été aussi une violence sexuelle. C’est la femme qui a fait l’immédiate relation entre la grossesse et cette violence de l’homme sur elle, car elle y perd sa régulation des naissances. De nos jours, c’est encore la femme qui s’occupe de ses affaires contre l’homme qui veut l’asservir par la grossesse. C’est de cette manière qu’est née, en Mésopotamie, peu avant la naissance de l’écriture, du Verbe, la conscience de la relation entre la grossesse et la paternité ; et guère plus longtemps après, celle de la religion monodéiste, dans une région un peu plus au sud. A notre niveau, s’il faut quarante générations pour faire une nouvelle « race » stable, je crois qu’il en faudra encore quelques-unes de la notre pour qu’une telle empreinte disparaisse définitivement… si notre bêtise nous en laisse le temps, bien sûr.

S’il y a mensonge, on le voit bien, il est bipartite. Le féminin et le masculin ont toutes les occasions de se mentir et la femme d’en faire, en CE moment, les frais. C’est bien que ce clip de Rihanna et de Eminem se soit fait à eux deux. Elle reste seulement la Femme au cheveux rouge et aux lèvres pulpeuses, au corps de déesse et lui, l’homme qui se bat contre l’ombre d’elle, blanche et fluette. Ca fleure bon !

dimanche, 08 août 2010

Intime solitude

Pas d’idée, c’est la cague. Tant de choses à dire, pourtant, mais radio : nada. Le sexe, les femmes, le travail, le pouvoir : pfeu ! Rien que de l’ennui, finalement. En fait, tout le monde se moque de tout le monde, d’en dire plus serait rajouter à l’ennui l’ennui, sans plus. Et il n’est vraiment pas facile de sortir de l’ordinaire où on trouve de tout pour vous en soustraire. Des films, des romans, des histoires, des malheurs à la télé et le petit qui chope la varicelle ; d’autant qu’il n’y a plus de pain et que c’est dimanche soir et que le congélo est en dégivrage.

Sortir de l’ennui est un problème qui va jusqu’à l’ennui quelque fois. C’est ennuyant, les problèmes : ça apporte souvent des ennuis. Mais je me trompe : ce n’est pas de celui-là dont je voulais parlé, je voulais de l’autre ennui-là, celui où on ne trouve rien à faire, pas même à respirer tant il vous ennuie. Passion : que tchique ! Pas de sang mouvant et brûlant qui circule dans les veines et le cœur est sans cœur, lui-aussi : il vous lâche, le lâche, dans un moment si prégnant où vous auriez tant besoin de sa pulsation, de son tonus, de son don. Ha ! donner son cœur ! et la vie s’allège comme une plume sèche sur un gazon ras à cette caresse aérienne qui passait par-là. Et il y a pire, peut-être, que le don du cœur : c’est l’absence de l’intime. Rien que d’y penser la peur me saisit dans un mouvement descendant où le sang qui réchauffe mes mains s’en va vers je ne sais où des pieds. La présence de l’intime. Voilà un sujet intéressant, mais de discuter de son absence, c’est beaucoup plus flippant ! Il n’y a rien de palpable, de tangible, de chaud, de son, d’odeur et de goût : il n’y a rien. Et ce rien est terrible, car rien ne le peut définir que sa constatation qui passe immanquablement par la résonance de l’intellect branché, dans ce cas, en direct sur l’émetteur de la crainte qui trouve, précisément, sa justification dans cette absence. Terrible, non ? La raisonnance de l’intime absent.

Glurp.

Quand j’étais jeune, vers 20 ans, j’avais un don : je savais ne pas flipper, j’avais acquis, je ne sais comment, le pouvoir de ne pas craindre et de ne pas craindre, non plus, la peur. C’est un don magnifique et je l’aimais beaucoup. Même si je ne puis retrouver précisément les circonstance de sa perte, j’en reconnais encore, dans une ou deux de mes réactions, des traces qui, pour aussi infimes qu’elles transparaissent dans le cours du mouvement du temps (et conséquemment par son côté éphémère) sa présence ne se laisse pas de se faire reconnaître. Et j’adore. Isidore veut dire « cadeau d’Isis ». Isis est cette déesse égyptienne qui, avant de copuler avec son frère, l’a retrouvé en douze morceaux, je crois et le treizième étant son pénis (ce qui signifie que nous sommes dans une société matriarcale : 13 mois de 28 jours + un jour ou deux) pour la féconder (ce qui signifie que nous sommes alors dans une société patriarcale). Je me demande bien quel pourrait être ce « cadeau d’Isis ». Et à destination de qui. Isis en fait est déjà le résultat d’une deuxième transformation du monde : il n’était pas, ensuite il a été et Isis en est la conséquence. Comme dans toutes les société à filiation matrilinéaire, le garçon vient après. Du fait qu’on ne sait d’où il provient, sinon que de ce qui a produit Isis, il vient de la même matrice, il devient inévitablement le frère d’Isis… et en conséquence, elle, sa sœur. La société patriarcale retient qu’elle a été sa sœur et beaucoup moins que lui est son frère. Je dis cela, juste pour situer d’où est le plaisir : c’est toujours intéressant de décrire la topologie affective d’un lieu, afin de mieux le saisir dans un conte qui relate l’origine de l’univers et de l’humain.

Mais pour autant que je possède ce don, dont je parlais précédemment, je me demande parfois comment je fais pour survivre avec si peu d’intime. Et il y a tant de bruits autour de moi ! Et essentiellement des bruits de gens qui travaillent. Les gens qui travaillent sont toujours bruyants, ils font toujours du bruit. Je n’ai jamais compris pourquoi, enfin… l’intérêt qu’ils y trouvent, à être bruyant au travail. Il faut qu’ils se fassent remarquer, ils ne peuvent pas laisser les autres tranquilles : ils travaillent ! Le travail c’est légitime, et oui ! Et quand on travaille, on travaille : rien d’autre que du travail, le reste, macache. L’environnement : walou – vous savez, les PCB, la dioxine, l’agent orange, le Roundup, la radio-activité, les nitrates, les produits issus du pétrole relativement à la quantité extraite, traitée et non-traitée (pollution directe : pipelines, marée noire, etc.) que je ne saurait calculer ce soir, à moins d’y vouloir passer 364 autres ; et de fait, tout est permis ! Le travail tue tout : l’amour, la joie, la vie, le rire, la paresse, l’intelligence en la rapetissant tant que la cervelle d’un alcoolique est encore plus volumineuse, et l’intimité, bien sûr. Le premier meurtrier de l’intime, c’est l’travail. Tout le monde le sait et tout le monde l’oublie pour aller au travail. On le sait, mais on le fait. L’intime ça rapporte pas un rond, n’est-ce pas ? C’est pas lui qui va nous faire bouffer ! Et qui va s’occuper des enfants, qui va les nourrir, les habiller, les protéger ? L’argent ! Et l’argent va s’acquérir en vendant sa force de travail contre la perte de l’intime. Le cercle est bouclé.

J’ai lu, enfin, tourné des pages parce que c’était un peu longuet et vide de sens, d'un bouquin qui parle, entre les lignes, des moyens de l’aliénation de masse de l’aliénation des masses : cinoch, zique, bouquins. C’est tout un monde, bien ficelé avec de l’argent, bien relié avec des histoires à dormir debout dans une ambiance de boîte. Et une opiniâtre détermination qui emporte tout et dont on ne sait d’où elle sort : il faut faire de l’argent. Et la question que je me posais était de savoir comment j’allais bien pouvoir comprendre l’agencement de la trame et du fil de ce baise-gueule de façon à pouvoir le décrire de sorte que mes contemporains s’en rendent suffisamment compte pour que, non pas que mon action soit efficace – ce dont je me contrefous dès le moment où ça marche –, mais que, finalement, ils se déterminent à y mettre fin. J’avoue que j’ai tant l’esprit un peu confus, en ce moment – et j’admettais que c’était là un prétexte à revivigoration – que je m’ai pas réussi dans ce projet. Je pose cela, avec la conscience qui tire la langue après avoir humecté mon crayon, sur l’ardoise de l’absence d’intime… au cas où ! Mais, je ne suis peut-être pas aussi intelligent que je le voudrais, alors que demande pardon.

Ce don, dont je parlais tout à l’heure, je l’aime beaucoup : on peut jouer avec. Pas tous les jours bien sûr ; non : de temps à autre. Son usage est, pour moi, un plaisir des dieux. Le hic, c’est que je trouve très peu de personnes pour jouer avec. Beaucoup très peu, même. Le plaisir de soulever le plaisir. Vous savez… vous voyez un plaisir, par terre. Alors vous vous penchez et faisant un coupe d’accueil de vos deux mains, vous soulevez ce plaisir. On l’entend le plaisir dans une voix, on le voit le vrai plaisir sur un visage : il rayonne, il pétille dans les yeux de l’autre : c’est une merveille. Bien sûr, pour le voir, il faut l’avoir face à soi, du regard. Mais on peut le saisir dans une musique différée, aussi. Je me demande parfois, faute de n’en percevoir pas d’autres sensibles qui peuvent être limités par moi, si ce n’est pas le seul plaisir qui puisse de saisir différé. Non… il y a les images, aussi.

Alors je me demandais, toujours à travers les lignes de ce livre que j’ai épluché aujourd’hui, si le rapport à la réalité qu’implique cette organisation de l’abrutissement des gens ne tenait pas aux gens eux-mêmes ; je veux dire, si ce n’est pas inhérent au genre humain d’être si con et que j’en serais alors, sine qua non mon désarroi, un extra-terrestre, une erreur de la nature dont la conformité n’a plus rien à voir avec mes frères et mes sœurs. Et je comprends ainsi que je sois seul, cela expliquant ceci. Car il est bien vrai que j’ai parfois beaucoup de mal à supporter mes frères et sœurs : ils m’agacent proprement dans une mesure difficilement quantifiable tant le volume, pourtant sec, de son existence, n’équivaut pas à celui du cœur d’un ivrogne (c’est la même, mais la signification change) plein de gras autour et proche de la rupture à celui de ma détresse personnelle.

L’incohérence, cette forme de la formulation mal formulée, ne cache pas obligatoirement quelque chose, elle ne sait souvent pas dire ce qu’elle voudrait dire plus simplement. Et lorsqu’on la détecte, on peut aussi détecter ce qu’elle essaye de dire, en le lui demandant, souvent. Mais ce monde est cohérent et bien cimenté. De sorte qu’on doive possiblement revenir sur son jugement et dire que je suis identique aux autres et qu’il me faut, moi, comprendre, en prenant tout sur moi, que je ne puisse m’y intégrer. Et ça demande quelques explications qui ne sont pas toujours possibles !

Le plaisir n’est pas facile, dans ces conditions mal comprises, à trouver. On ne peut, dit le proverbe, être au four et au moulin. Faut choisir : ou l’un ou l’autre. « Une cervelle, deux muscles, dit-il, en se claquant des deux mains les biceps et le front, successivement ». Et non, ce n’est pas facile et j’ai toujours, dans la plus grande mesure de mon possible, opté pour la facilité : travail ? Ciao ! Je me souviens du matin du sur-lendemain de notre rencontre avec Isabelle : je devais aller au travail, le matin, ou bien rester avec elle. Je suis resté avec elle, bien sûr et je me suis fait viré, pour absentéisme, mais contre la douceur de sa peau, quel bonheur !

Il y a donc toute une organisation autour du travail. Des gens ont râlé suffisamment pour que son bruit reçoive une légère réglementation, mais elle n’est pas aisée à faire appliquée : le travail reçoit un prestige que le reste des choses n’a pas et que malgré leur nombre (dont on peut trouver une proportion logique dans la comparaison de la fortune cumulée des 155 personnes les plus riches à celle cumulée à ce milliard et demi de personnes les plus pauvres) ce reste incommensurable n’en a rien reçu, ne serait-ce qu’une équivalence. Le prestige est parcimonieux, il est très radin et sélectionne ses attributions avec préciosité, intérêt et capital.

La question que je me pose est : comment les gens peuvent-ils être si soustraits de la réalité, de la leur, par des images ; quel est le processus de ce processus qui les immunisent contre leur réalité ? Pense-vous que c’est par modestie que je ne propose pas d’en partager les connaissances, du fait de me croire seul suffisamment intelligent pour résoudre une telle équation ? Non : je pense sincèrement que le partage, entre nous, de cette question pour en tenter de résoudre l’énigme, est très important, crucial et indispensable. S’agit d’en causer les modalités. Faut passer un contrat, une convention et une charte entre nous pour que cela puisse être possible, sinon se réaliser.

Si l’humain contient en soi, comme don, l’hypnotisme de l’image, il doit faire avec et cesser de se faire des morales qu’il ne pourra jamais atteindre, car elles ne font tout simplement pas partie de ses possibles. Il faut reconsidérer les religions, toutes les religions dans cette direction, sinon elles sont un cul-de-sac, pour rester propre. Tout ce que veulent atteindre les religions est hors-propos, hors nous : pas la peine de se mettre en peine pour l’atteindre. Et il faut l’ADMETTRE ! Je crois que c’est là le plus difficile. Admettre que l’on est pas ce qu’on se voit d’idéal est du genre à coincer aux entournures. Pourtant c’est logique : comment un idéal peut-il n’être pas une hypnose ? Ou alors, bien que nous puissions avoir une définition assez proche de l’hypnose, nous n’avons pas la même définition de l’idéal. Et c’est quoi un « idéal » ? Humm ? Un idéal c’est une idée, une pensée repensée, un « concept » dirait Hegel, « l’idée d’une idée », c’est une idée, dis-je, de ce qu’on voudrait pouvoir être (le « pouvoir vouloir être » - ce que je pourrais vouloir être - est plus terre à terre et n’entre pas en ligne de compte). Un idéal est quelque chose qu’on ne peut pas atteindre, soi. Alors on va le chercher chez un/e autre. Et comme, de toutes façons, il ne peut pas vivre chez un autre, cet idéal va chercher à gommer ce qui empêcherait qu’il se manifeste. L’hypnose, c’est ce coup de gomme, pour moi.

Revenir à l’état de grâce du présent procure de l’ivresse que d’aucuns n’hésitent à nommer plaisir. Alors, parfois, lorsque j’utilisais ce don dont je parlais précédemment, je me faisais figure de manipulateur : « les gens avaient du plaisir contre leur gré » me disais-je, « tu n’as pas le droit de faire cela ! » Et je me mettais à avoir peur. Mais il faut du temps pour se l’apercevoir et se l’admettre, le monde humain est continuellement de cet ordre : la manipulation de l’autre et de soi, dans les cas plus avancés. Il y a un mot pour dire le contraire de « manipulation » qui est « sincérité », mais je n’ai pas eu beaucoup l’occasion de l’utiliser : il doit être bien noir, encore, dans les pages du dictionnaire : peu de doigts l’ont caressé.

Le problème de la sincérité est qu’elle est sans détour, alors que le différé et l’indirect qui sont propres à l’humain demandent immanquablement ce détour qui déqualifie la sincérité. C’est quelque chose, là, qui m’échappe : c’est pour moi un grave problème. C’est un grave problème car, si il existe, ce problème pour moi, j’ai tout faux : tout s’écroule à la fois, les temps et les lieux, les joies et les peines, les pierres et les tuiles. Je me joue de vous, n’est-ce pas ? Tendez la seconde. Le différé et l’indirect qui caractérise l’action de l’humain sur le monde, en tout et partout, n’est pas dissociable de la sincérité : ils peuvent contenir la sincérité, c’est un choix ou plutôt la décision que cela n’en soit pas autrement. Sinon ça ne marche pas ! Les uns perdent de leur sens et l’autre est bafouée !

Et mon système tient car il invente, voyez la perversité, le concept de « Spectacle » qu’un autre a défini très bien, mais sans notoire référence à l’existence de la sexuation et de ses implications dans le monde en général, global… enfin.. comme moteur énergétique, bien sûr, comme pompe à pouvoir, comme bulldozer dont le conducteur répond à la loi hébraïque en outrepassant son dissentiment affectif personnel, comme étincelle donnant naissance à tout, donc au spectacle, sans que je veuille donner plus d’importance à mon idée que les gens vivent sans sa perception, à cette sexuation, sans elle et que l’on peut trouver ici une « raison » de cette énergie qui les fait quand même agir. Compliqué, tout ça.

Le renversement de la vie en non-vie ; l’organisation de la marchandise et de sa gestion ; le lien social et le travail. Rien ne fait défaut dans la théorie du spectacle de Guy Debord qui a affirmé avoir beaucoup bu, plus qu’il n’a lu, et je le crois. L’organisation de la frustration. Dixit un spectacleux : « notre métier est d’organiser le désir » et non pas le plaisir : c’est là, dans le désir pour le désir, que la sincérité est dissociée du différé et de l’indirect : un monde où il faut payer de sa vie pour voir et perdre le moment historique et la mémoire de ce que l'on est. Et, pour revenir à ce don, dont je parlais précédemment, une de ses caractéristiques était qu’il remettait là ce qui est là. Qu’est-ce que les gens ont peur du ! Combien ils en sont effrayés ! L’idéal et le … ils le vivent pourtant, ce .

Donc, de loin, dans ce livre que j’ai haché cet après midi, j’ai entrevu que l’hypnose des masses est tributaire de l’absence de leur sens de l’être-là, l’absence de l’intime, indispensable pour devenir. Une pédagogie qui s’est faite peut être défaite. La solution est immanquable : il faut arrêter de travailler pour la découvrir. Arrangeons-nous ! car je ne pourrai le faire seul.

samedi, 07 août 2010

Etat des lieux pendant déménagement

Le destin est combinatoire. Une partie de la combinaison est la marche de l’humanité, comme ensemble organique ; située dans un environnement duquel elle ne peut se séparer : elle y est donc intégrée en respectant ou non cette intégration, car l’humanité peut se séparer de ses bénéfices, de ses avantages, en les matérialisant bêtement et en les coagulant sous formes de richesses extérieures à elle-même et générant, par ailleurs et sur une plus grande surface, une pauvreté. Je fais parti de cette combinaison, à ma mesure, bien sûr. Mais, je suis seul : je ne peux pas dire que cette combinaison me sied et pour défaire cette solitude, il faudrait que je sois un autre qui ne le suis : que je modifie des paramètres dans ces combinaisons, en restant ce que je suis. Mais comment ? « Être ou ne pas être » c'est ne pas être encore et n'être toujours pas !

Pour l’heure, je tente de me débarrasser de ce qui me gène, des aspects matériels d’une certaine existence. Il reste le problème du stockage de mes affaires ; et tel que je suis parti, je ne sais si je pourrai passer un contrat avec quelqu’un pour ce stockage qui ne me soit pas trop désavantageux… si j’en trouve un !

En fait, le premier, si je pouvais, truc dont je voudrais me défaire, est cette solitude. Je ne vois personne, je n’ai pas d’intime, d’intimité, de correspondance et j’ai l’impression que je ne peux pas en avoir, que je ne pourrai plus en avoir.

Mais c’est pareil ! Etant qui et ce que je suis, je m’attends à autant d’ennuis que je causerai de par mon caractère, que ce soit de moi ou des « autres » (et de moi, principalement). J’ai la sensation que je ne pourrai jamais faire en sorte que quelque chose fonctionne sans anicroche, simplement. J’ai le sentiment d’être entacher de cette tare : les emmerdes, je cherche inconsciemment les emmerdes ; et s’il n’y en a pas, j’en crée !

Je pense que le problème combinatoire se situe là : ma propension à créer des emmerdes.

Cette création d’emmerdes peut simplement venir des « autres », mais provient essentiellement de ne savoir pas faire avec les « autres ». En fait, je n’aime pas les « autres », je suis misanthrope, profondément misanthrope. Sous des couverts d’humaniste universel, je hais les gens et je ne peux pas les supporter tels qu’ils sont.

La combinaison est tordue de ne pas apprécier la compagnie des gens : je préfère rester seul que de les fréquenter. Je ne les comprends pas, je ne saisi pas comment ils fonctionnent, comme ils marchent. Je devrais peut-être l’ignorer, encore qu'il faille penser que c’est ici plutôt une attitude défensive à leur égard.

Et lorsque je pense cela, je pense à ma mère et aux coups qu’elle m’a donnés. Une sorte de nostalgie des coups de ma part ? Quelle misère que l’être humain ! Il (je) a (ai) tant de problèmes à résoudre, sinon qu’à vivre en misérable, soit qu’il y persiste soit qu’il ne les résolve pas ! Mais peut-être que les « autres », les gens ne sont pas moins misérables que moi de SE fréquenter : ils y retrouvent une affectivité qui, pour être ce qu’elle est, les satisfait et d’autant plus que moi qui n’en ai aucune expression ! Je n’aime pas la forme de cette affectivité comme je n’aimais pas la forme de l’affectivité de ma mère envers moi. J’ai cherché d’autres formes sans parvenir à trouver une forme qui, non seulement me convienne, mais convienne aussi à plus que moi, puisque l’affectivité est au moins binaire, l’intimité ne peut être que par soi : elle nécessite l’« autre », le tiers, l’altérité !

En fait, c’est cela : j’ai orienté ma vie dans la recherche d’une autre affectivité en gardant les tares de l’ancienne. Et je suis coincé. J’ai bien trouvé des moyens affectifs différents, mais je suis seul à pouvoir les appliquer selon les seules modalités (qui contiennent ces tares) que j’ai trouvées à établir. Tout ce que j’ai fait de ma vie est un ensemble de coups d’essai qui ont abouti de toute évidence à des échecs qui n’ont de sensible que d’avoir été vécus comme coups d’essai.

Mais, finalement, c’est le résumé de cette existence, comme d’un coup d’essai, qui est un échec affectif. Je ne regrette pas ce que j’ai vécu, sinon que ce résultat, ce vide conclusif. Je pensais pouvoir accéder de cette manière au bonheur, à une rencontre, à des rencontres, sans que cela se produise. J’ai bon espoir que l’amour existe pour les autres, sans que j’y accède personnellement, pour n’en rien reconnaître. Je suis obtus, belliqueux et interdit à l’amour. Les modalités que je peux sincèrement entrevoir d’une cessation de cette solitude, ce que je peux, à partir de mon expérience qui est indéniable, entrevoir d’un futur de possibles, ne me montre que la vision d’un impossible matériel du fait de ces tares dont je parlais précédemment. Tel que je suis, je ne peux rencontrer personne, à moins d’un miracle ! Le miracle est une partie de ce combinatoire, du destin, mais autant ne pas trop compter dessus tant il est rare et précisément octroyé.

Comment donc changer ? Paresseux, je suis bien en peine de répondre à cette question et les efforts déjà déployés dans mes précédentes tentatives d’adaptation à l’« autre » n’ont passagèrement éreinté. Car mon intelligence est comme voilée à entrevoir d’autres manières aussi passionnantes (et qui vaudraient ainsi le « coup » d’essai affectif) : à la fois à cause de ces tares et à la fois du fait d’un manque d’énergie patent, de fatigue. Impasse.

Ce que j’ai pour le présent entrepris est de cesser de m'abreuver de boissons alcoolisées et de maigrir pour m’alléger le corps, le poids, la pondération physique de mon appui sur la planète. Il me faut un peu de patience, encore. Dans ces conditions de traverses, la cervelle doit reprendre un autre volume, la graisse doit s’épurer, le muscle doit se raffermir. Cela prend du temps. Cette solitude peut ne pas durer.

Ce qui augmente encore l’état d’impuissance dans lequel je me trouve est cette impuissance où je me trouve de ne pas trouver de solution à cette impuissance.

Seulement, je suis la solution de ma rencontre avec l’autre, au moins en partie. La richesse dont je me dis dépositaire n’intéresse que moi : c’est un puits d’eau fraîche, je suppose, dans une contrée déserte et très peu fréquentée car peu fréquentable. Car, encore une fois, je serais capable de chercher des poux sur la surface d'une boule de billard pour avoir le plaisir de provoquer l'excitation d'une dissension douloureuse pour une réconciliation heureuse. Si je suis si « intelligent » pourquoi donc ai-je perdu Annie ? Intelligent, mais con. Cicatrices. Se défaire d’une telle connerie n’est pas facile… Faut vraiment être con pour être à ce point con !

J’ai peut-être trouvé le désagrément du monde et son origine – et que je veuille aider à s’en défaire est on ne peut plus légitime – mais les modalités d’applications de ce désagrément sont si diverses, si multiples, si variables, si labiles et se manifestent sous tant de formes différentes pour un même fond, que je ne vois comment, collectivement, il pourrait être possible de s’en défaire – même en le sachant et peut-être moins encore à travers ce que je dis. Ainsi, l’échec est là, et il me dépasse de ses moyens. Apprendre à faire avec, à en jouer, je ne sais si je puis le pouvoir et… si j’en ai le temps !

C’est qu’il me faudrait d’abord me confondre à l’érotisme du féminin, et parfois dans son aspect porno, son adaptation à ces conditions, que je ne suis pas capable d’assumer, sinon que ivre ; et encore : c’est alors elle qui en a peur à moins de le provoquer, ce qui n’est pas loin de me faire peur par sa violence. Blablabla...... Le marchandage n'est pas équitable, car ce ne sont pas les mêmes mesures de poids que pèsent les plateaux de la balance. La chair.

jeudi, 05 août 2010

L'angoisse et moi

Une caractéristique dans la démarche des "grandes personnes" vis-à-vis de moi est assez fréquente : au début, je suis sympa et tout et tout, et puis, mon côté "enfant" leur fait penser que je suis UN enfant, c'est-à-dire, à leur yeux, quelqu'un qui n'est pas encore responsable. Un enfant est une personne qui est toujours et encore dépendante des adultes de par la protection d'une agressivité qui provient principalement des autres adultes.

Mais il ne s'agit pas de ce genre de protection, dans mon cas, car ce sont eux qui se protègent d'un enfant que leur adulte a renié pour être et rester adulte, le paraître aux yeux de tous et s'y faire reconnaître. Leur bienveillance initiale à mon égard, émane de cette légèreté, de cette sorte d'insouciance, d'extrême parfois qu'ils perçoivent dans ma fréquentation comme une nouveauté, une fraîcheur peut-être, au moins un exemple d'allant confiant au monde qui les charment par cet aspect "enfant". Puis, ils transforment ceci en enfantillage, autrement dit, ils dégradent cette attitude qui leur devient insupportable, non pas par un comportement d'enfant, mais par un comportement d'adulte qu'ils ne comprennent plus, sinon que comme enfantillage.

Car ce qui caractérise le monde des adultes, de ces adultes, est la maîtrise d'une angoisse qui ne doit pas SE montrer : l'adulte est adulte parce qu'il est adulte et non plus enfant et le social présent de cet adulte est précisément une vision de l'enfant et de ses angoisses, alors que les angoisses de l'enfant n'ont rien à voir avec celles de l'adulte. Ce qui distingue l'enfant de l'adulte est que ce dernier a traversé la période de la puberté, on le sait bien ! Mais comment ? Le souvenir que cet adulte en a, reste entâché d'enfance inachevée de sorte à penser l'enfant comme un adulte inachevé et l'adulte comme une absence d'enfant.

Si, pour eux, j'étais responsable, ils me revaudraient convenablement de mes participations au monde, mais cette vision fait que je ne vaux pas le prix normal du fait de cette angoisse que je soulève et que eux ne sont pas capable d'assumer ; angoisse à l'aide de laquelle ils me rendent rendre responsable en me transformant en irresponsable.

Ma manière de vivre, qui prend ce qui vient comme il vient et opte pour le meilleur plaisir (qui est un choix responsable), se heurte à la leur qui est de se confronter à ce qui vient, de craindre ce qui va venir. Ainsi, leur responsabilité d'adultes de rémunérer ou de compenser les dépenses d'un autre adulte pour le travail qu'il va accomplir, est-il réduit à une activité d'enfant et ils payent en conséquence de cette manière de le concidérer.

J'aiguillonne leur angoisse, malgré moi, par ma manière de voir le monde et d'y vivre. Ils ne connaissent pas le plaisir qu'il y a de vivre de se défaire de la crainte par l'intelligence de l'angoisse.

Car, à leurs yeux, mon attitude exempte de cette agressivité qui est, pour eux, le répondant naturel à cette angoisse, revient à tout admettre et tout prendre, sans distinction. J'en suis loin, bien évidemment.  Il y a quelques années, j'ai été étonné de reconnaître le monde du secret (la dissimulation de la satisfaction de la sexuation) et quelques années plus tard de découvrir le secret du monde (l'angoisse humanisée de la sexuation) ; aujourd'hui, je découvre que le monde n'a pas même le courage de se découvrir à l'intelligence de l'angoisse qui lui dissimule le monde, c'est-à-dire : lui.

Et, en tant que "grandes personnes", ils profitent de cet aspect "enfant" pour assoir un pouvoir sur cet "enfant". L'enfant a besoin de l'angoisse comme moteur de croissance et de compréhension du monde ; l'adulte devrait en avoir l'intelligence : il ne l'a pas suffisamment comprise de sorte qu'elle s'est transformée en un voile qui lui voile la compréhension du monde et de lui-même, surtout. C'est un adulte qui voit le monde dépassé par les angoisses de l'enfance, à travers les yeux de l'angoisse de l'enfant passé dépassé par l'adulte présent.

De plus, ce qui est triste, c'est que si l'enfant râle, si je râle, si je dis que je ne suis pas content de leur attitude, ils se redressent alors sur l'estrade qu'ils ont montée pour étaler leur pouvoir et me rejettent comme "agressif" en me pointant du doigt à la vindicte de cette angoisse dont ils n'ont pas l'intelligence. Et ceux qui en sont le moins pourvus, qu'ils rassurent par cette exhibition, sont prompts à exécuter les oeuvres de cette angoisse dérangée dans son manque d'intelligence alors qu'ils tentent d'y mettre bon ordre.

Les travaux d'un Freud et d'un Wilhelm Reich ont tous été orientés convenablement vers l'intelligence de l'angoisse : c'est QUOI cette angoisse, en QUOI m'aide-t-elle à vivre en me protégeant, de QUELLE manière se manifeste-t-elle et QUAND, COMMENT est-elle intelligente et Où. De ne saisir l'angoisse que comme source de craintes et peurs et châtiments ne donne aucune réponse à ces questions. Au pire, je peux poser cette question : "qu'est-ce que cette angoisse-émoi ?" qui renvoie à la notion de "plaisir-angoisse" soulevée par Wilhelm Reich restée jusqu'à présent avec si peu de résolution, sinon que comme angoisse-plaisir qui résonne dans tous les bruits que génère cette société.

C'est quoi l'autorité que se donnent les plus angoissés de cette société coroborée par ceux qui s'en savent le moins exprimer que la muscularité ou un bulletin de vote, qui veut absolument l'inoculer à l'ensemble de la vie et comment, de sorte à emprisonner cette vie dans le carcan de cette angoisse sans intelligence, sans compréhension d'elle-même par son sujet ?

12:27 Publié dans Pharmacos | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poésie, politique

dimanche, 01 août 2010

Succès damné du futur passé

J’ai visionné deux films dernièrement, dont on ne doute pas de la trame comme transparence d’une problématique sociale présente. Il s’agit du Schrek 4 et de Prince of Persia :

- dans le Schrek, le héros se retrouve à vivre dans un monde où son existence sociale a disparue et réussit à annuler cette absence ;
- dans le PoP, le héros se retrouve à défaire un vécu qui a été une erreur grave.

Dans les deux cas, le héros se retrouve dans un présent qui, après une expérience douloureuse et un zest de magie, obère ce passé malheureux.

Je pourrais seulement jouer avec les temps que ces transpositions d’une personnalité nous montre et, donc, relever une conception du temps un peu étrange, mais ce qui m’a le plus interrogé est cette idée de défaire un passé : chez Schrek, son pacte avec le diablotin, chez PoP, l’usage de la poudre à Temps, du sable qui remonte le sablier.

S’il ici remarquable que deux films d’une même période d’une époque soulignent simultanément, chacun à sa manière, la possibilité de vivre l’intolérable et de n’en garder qu’un souvenir absolument secret, il est aussi pendable que l’on puisse faire vivre à deux héros si différents le regret d’un choix dont ils se refusent à assumer les conséquences désastreuses d’une part et d’autre part que le présent, devenu une partie du futur, est rétractable et pour finir, que ce retrait se pose comme une solution au présent, à la fois dans l’ennui que ce présent possède en masse et à la fois dans ses inconvénients divers comme conséquence des décisions du passé ; à ceci près que ces héros ont été, chacun, les seuls à avoir eu ce vécu qui n’est donc historique que pour eux seul et pour eux seul sans partage possible. On désire vivre le pire de manière anodine.

C’est un bon signe : le pire commence à être fatiguant à vivre. A mon avis, le mieux, pour l’éviter, est de ne pas le faire vivre et de le penser avant de le vivre. Et c’est là que pèche ces deux films : pour anticiper le pire, il ne faut pas seulement intégrer le présent comme simple succession d’événements et comme conclusion du passé, il faut comprendre ce fait historique comme résultat de l’Histoire qui, elle est irréversible quel qu’en soit le désir du vivant de sorte à le vivre sans doute avec la tentation de l’excitation du pire, mais aussi l’intelligence de s’en passer.

On ne peut revenir sur la pollution chimique, radio-active et électromagnétique, par exemple, déjà produite, même et seulement par désir et un peu de magie, d’images ; ou bien il faudra un bon bout de temps qui est irréversible et qui est déjà perdu pour cette cause. Il est encore possible de se demander quelle aurait été la nature du progrès sans l’exploitation de la femme et de l’enfant par l’homme ; je veux dire : quelles auraient été les relations entre nous dans de telles conditions de sorte à rendre désirable un retour irréversible à des dispositions prenant en compte un tel arrangement de la vie humaine. Le pire qui serait évité serait le présent présent, bien sûr, qui ne tient pas compte de ce fait désolant mais réel que l’humain est peut-être bon, individuellement, mais déplorable, collectivement et qu’il ne sait pas encore – sans doute pour ne l’avoir pas admis et qu’il croit à la magie de ses images – comment s’arranger d’un tel pire qui sera, de par sa nature, toujours présent comme moteur d'une excitation à détourner !

vendredi, 30 juillet 2010

Les transports du sort

La transformation d’un des aspects de l’animal en humain s’est opéré lorsque, pour lui, les avanies sont devenues des coups du sort : c’est dès lors qu’il a commencé à se raconter des histoires. Il fallait, c’est entendu, un fond pour une telle transsubstantiation, une réalité comprenant les rudiments nécessaires du langage, c’est-à-dire, déjà, cette aptitude à reposer en image ce que dispose la réalité et, ensuite, la transmission de ces images à un congénère ayant une charge affective sensiblement identique sur un objet identique.

On peut ergoter sur le fait de savoir si cette transformation de l’avanie en sort correspond à l’émergence de la pensée spéculative sans pour autant ôter sa validité à son concept : il s’agit d’une relation au monde quelle qu’en puisse être la relation interprétative, ce qui est dit et la manière de le dire.

L’expression « se raconter des histoires » contient deux sens, en français :

- raconter, de personne à autre, une histoire qui est toujours une interprétation, que ce soit de l’émetteur ou du récepteur ou des deux ;
- se réinterpréter un fait, en meilleur ou en pire, rarement en juste.

Il s’agit toujours de se réapproprier la réalité comme une réalité, d’un refus de ce qui arrive par un revirement où, de moteur que l’on était, on devient objet subissant alors que le destin est une simplicité combinatoire (où le hasard et la détermination se manifestent comme des éléments puissants) dont on est un élément sinon actif, du moins présent, inévitablement (j’évoquerai le différé plus tard). Que cela arrive et cela est versus ce qui est advenu contre moi.

Ce sera donc cette constatation que l’humain fuit constamment ce qu’il est, son action sur le monde et les conséquences de cette action sur le monde, que je voudrais modifier en la rendant plus immédiate : jusqu’au peut aller le spectacle comme refus de la réalité de l’être en tant qu’élément déterminant de son devenir dans CE refus de la réalité de l’être en tant qu’élément déterminant de son devenir ? Car cette manière d’être etc. est pour le moins inadaptée par les malheurs, comme à-cotés, qu’elle génère.

Pour cela, il va me falloir ratisser assez vaste. Au risque de ne pouvoir pas faire saisir la démarche ou le cheminement de cette démarche, il me serait extrêmement simple, en effet, puisqu’il s’agit d’une relation érotique à la réalité, d’aborder immédiatement cette constatation au regard de la sexuation (le simple fait d’être pourvu d’un des deux sexes) particularisée par les images que s’en donne spécifiquement l’humain ; de sorte à ne pas heurter mon lecteur ou ma lectrice et les rebuter dans leur curiosité à vouloir poursuivre ma démonstration, car cette propension à la fuite est si forte et si vive, si exclusive, qu’il leur est aussi très facile de sauter dans le train de la facilité, comme ils le font habituellement, sans doute par lassitude intellectuelle (c’est dur de se vouloir comprendre !) ou bien d’en sauter dès que c’est un peu compliqué, à l’exacte mesure de la complication humaine de cette sexuation et de son être au monde, qui est pourtant assez évidente.

lundi, 26 juillet 2010

la poésie et ses neuf filles

La poésie et ses neuf filles (la musique ou le charme des sons ; l’histoire ou la mémoire des faits, du vécu ; la géométrie ou l’espace et la reproduction picturale ; la géographie ou la science du voyage et des lieux ; le chant et la danse du chant ; la méditation comme préalable de l’amour du cœur et du corps ; la syntaxe ou la cohérence et le charme de l’éloquence ; l’humour ou la comédie et le tour d’esprit) : devant tant de charmes, l’humain se sent ridicule alors qu’il les détient de lui seul et l’angoisse qui étreint son âme et ses parties génitales transforme tous en bruits, en fascisme ou en communisme, en murs de prison et en clapier à pauvres, en territoires et en frontières, en danses lascives et en femmes nues, en philosophies ou en monodéismes, en langues bureaucratiques, juridiques et militaires, en drames seuls propres, à ce stade, à remuer ses entrailles. Il se dote, en images (dans le mot « image » comme dans le mot « imagination », il y a le mot « mage ») de pouvoirs qu’il n’a pas et peut en aucun cas avoir autrement qu’en vision dans d’autres têtes aussi pleines des mêmes images ou de leur correspondance complémentaire, pouvoir de sang qui coule à celle horrible du sang œstral, et cache derrière ces images la réalité du « pouvoir » qu’il a sur autrui, comme si ce qu’il détient de par sa nature ne lui suffisait du fait qu’il n’a jamais appris à s’en servir, à se servir de la poésie pour lien vital, lien social : il ne le peut guère, vu la puissance, le pouvoir de son angoisse, ce couvercle dont le tout petit trou laisse passer de temps à autre un ou deux vers, une chanson et un peintre à l’oreille coupée qui s’est retranché dans la folie pour n’avoir pas à vivre comme ses semblables. Le peu de poésie qu’il lui reste, il s’en sert pour vénérer quelque autre qui lui a évoqué ce qu’il ne peut atteindre et qui s’en veut le représentant temporelle ou éternel, pour octroyer une décoration ou une statue ou un hymne à quelque limite matérialisée avec « bonheur » ici toujours synonyme de malheur pour d’autres qui n’ont rien demandé et que l’on forcera par les coups au travail obligatoire. Ces derniers, loin de se révolter, chanteront alors des poésies passionnelles évoquant un temps passé et un autre, futur, sans doute assez semblable, détenteurs d’un bonheur qui n’a pourtant jamais existé. L’intelligence, sa pensée structurée, qui est un entendement du monde dans un temps donné, lui permet de réaliser certains de ses rêves qu’il a choisis à prix d’immenses erreurs conceptuelles et tragiques parmi d’autres, mais loin de s’en contenter, il lui faut en faire des montagnes, justement, des montagnes qui bouffent tout sur leur passage, emportant leur poésie initiale dans les poubelles puantes des pots d’échappement ou des gueules de ses usines, des culs de ses « réacteurs » chimiques d’enfer, poubelles où se trouvent la manipulation d’images, les discours politiques et la justice de classe.

jeudi, 24 juin 2010

Négatif de l'éloge

Chapitre 1 (**)

·         1 : Au commencement était le Négatif qui nomme les choses et le Négatif qui nomme les choses était en concordance avec Ce qui les a précédemment créées.

·         2 : Le Négatif qui nomme les choses correspondait avec Ce qui les avait précédemment créées.

·         3 : Toutes les choses ont été nommées par le Négatif et sans Lui rien de ce qui a un nom n'aurait de consistance : Il a donné consistance à Son monde.

·         4 : En donnant son Nom à la Vie, il a fait de la Vie sa propre lumière,

·         5 : lumière qui a écarté l'obscur, qui ne peut la recevoir qu'en s'écartant.

·         6 : Il y eut un Négatif se sentant particulièrement proche de la vie : lui aussi avait son nom

·         7 : et il imprégnait d'autres Négatifs de l'eau de la vie comme assertion de son intense contact d'avec la vie afin que ces Négatifs le soient tout autant.

·         8 : Il n'était pas la lumière mais il voulait à travers Lui la montrer

·         9 : car celui qui nomme les choses est la lumière vraie pour lui-même qui illumine son monde de la clarté qu'il lui donne.

·         10 : La lumière était, dans les anciens temps, et le monde pareil, et le monde ne l'a plus reconnue.

·         11 : Le Négatif qui nomme les choses encore était encore dans son monde mais le monde n'y correspondait pas pour la réfléchir.

·         12 : Mais aux Négatifs qui l'ont reconnue et qui y ont correspondu, le nom des choses répond au pouvoir de la vie qui les a précédemment créées.

·         13 : Car le Négatif de nom répond au nom du Négatif qui n'est pas de sang, ni de chair ou du mélange des corps, mais de la concordance d'avec la Vie qui l'a précédemment créé.

·         14 : Et le Négatif s'est reconnu de chair, il s'est installé chez Lui et a constaté Son vital rayonnement, le rayonnement de sa vie, enfant de lui-même plein de grâce et de la plénière correspondance à la vie, dans lequel Il se reconnaît unicité au monde.

·         15 : Il y eut un Négatif qui affirma et proclama : "Voici le Négatif dont je disais : Lui qui vient après moi est plus rayonnant que moi parce qu'auparavant de moi Il correspondait au Négatif".

·         16 : De sa plénitude, en effet, nous avons reçu grâce pour tendresse et tendresse pour grâce.

·         17 : Si la Loi de ce qui nomme en rigidité fut de l'accord d'un prédécesseur, la grâce et la concordance totale à ce qui a Nom prirent le nom d'Humain.

·         18 : Personne n'a la vue de la précédence, mais Humain, concordance totale du nom et de l'acte, le sein du Négatif, l'a fait reconnaître.

(**) Retournement des 18 premiers versets de l'Evangile selon Jean

jeudi, 03 juin 2010

Et en parlant de liberté…

« Aux Français, j’explique le logiciel libre en trois mots qui devraient leur être familiers : liberté, égalité, fraternité.
- Liberté, parce que chaque utilisateur est libre de l’usage qu’il veut faire du programme.
- Égalité, parce que le logiciel libre ne confère à personne de pouvoir sur personne.
- Fraternité, parce que les utilisateurs peuvent s’entraider, en partageant des copies et en développant en collaboration leurs versions.

« Il va sans dire qu’aujourd’hui, vue l’omniprésence de l’informatique dans la vie, la fraternité en informatique ne se limite plus aux seuls logiciels. Partager des copies des œuvres publiées est une pratique commune, fort utile. Cette pratique ne doit souffrir aucune entrave.

« Or, dans le monde, les États qui sont dominés par l’empire des entreprises mènent une guerre contre la pratique du partage, au point d’en faire paraître la simple notion comme aberrante, antinaturelle, voire barbare. Ils l’appellent « piraterie » comme si partager équivalait moralement à attaquer et piller un navire. Cette guerre est orchestrée par l’industrie du divertissement.

« Avec la loi HADOPI, la France en est la victime emblématique.

« Avec cette loi, je crois que l’actuel gouvernement français porte atteinte du même coup aux trois valeurs de liberté, d’égalité, et de fraternité.
- Liberté, parce que cette loi institutionnalise la chasse à ceux qui osent partager.
- Égalité, parce que cette loi n’octroie qu’à quelques organisations privées le pouvoir exclusif de la dénonciation.
- Fraternité, parce que son but est d’écraser l’entraide qui lie les citoyens.

« L’aspect qui révèle le plus clairement la nature tyrannique de la loi HADOPI est qu’elle cherche à imposer à chaque Français le rôle de soldat d’une guerre contre les autres : celui qui ne « sécurise » pas son réseau, c’est-à-dire, qui n’aide pas les maîtres à maintenir leur joug sur les autres, risque d’être puni pour être resté neutre.

« Cette pratique de « responsabilisation collective » est le recours classique des gouvernements injustes dont le but est d’exploiter leurs sujets.

« Défier la responsabilisation collective pour protéger les concitoyens contre l’empire est le premier pas naturel de la résistance. J’ai l’ardent espoir que les citoyens français sortent vainqueurs de la bataille qui les oppose aux entreprises impérialistes qui ont exigé l’HADOPI, et qu’ils résistent aux politiciens serviles qui, sous leurs ordres, l’ont imposée.

« Il faut en finir avec cette loi et son premier essai, DADVSI, mais aussi avec toute loi qui interdit aux gens de partager entre eux les copies d’une œuvre publiée. »

Richard Stallman dans Richard Stallman et la révolution du logiciel libre, page 274-275, de R. Stallman, S. Williams et C. Masutti, janvier 2010, éditions Eyrolles, Paris.

dimanche, 23 mai 2010

De l'affectivité comme universelle poésie

L'être humain est un être affectif : s'il veut gagner tant d'argent, même en écrasant et en réduisant à la misère d'autres, c'est pour gagner l'affection de ceux qu'ils considèrent comme essentiels à son existence : sa « famille affective » où l'argent détient une forte charge affective. Les mouvements sociaux actuels qui tournent autour de l'admission de l'étranger remettent en cause cette forme de l'affectivité du xénophobe, qu'ils veulent voir plus universelle ; mais ce n'est seulement qu'en tournant ainsi sa propre affectivité dans cette direction que ce mouvement se veut plus universel.

L'être humain est un être essentiellement affectif : c'est pour gagner l'affection de son maître (qui est alors la société et son organisation des relations affectives derrières lesquelles une stabilité de ces relations affectives rassure) que le sbire (esclave, militaire, policier, tortionnaire, etc.) s'emploie à faire respecter les relations affectives implicites de cette société, que cette organisation sociale induit. La reconnaissance mutuelle de l'être humain lui est indispensable... affectivement. De même, on sait pourquoi nos politiques sont si friants des gens - qu'ils rétribuent à l'aune de la monnaie de singe de leur discours et de leur sourire - et se sentent retrouver une importance à leurs yeux lorsqu'ils reçoivent, à travers les moyens de la "démocratie" qu'ils réglent-et-mentent, le choix de leurs électeurs.

L'affectivité est une nourriture que l'on boit avec le lait de sa mère en la regardant dans ses yeux ou en ressentant ses caresses.

En ne se penchant que sur la « psyché », l'esprit de l'être humain, on a peur de redevoir à son affectivité les lauriers qu'on lui doit... on a peur de cette affectivité parce qu'elle est malade et que, si on ne le sait pas, on le sent et ressent. Et c'est parce qu'elle est malade, qu'elle ne sait pas se définir (la maladie est effectivement une tautologie !). Mais en reconnaissant une relation entre la « psyché » et le comportement affectif d'une personne, on a fait un grand pas vis-à-vis duquel celui sur la lune équivaut à celui d'une fourmi qui est pourtant pourvue de six pattes.

La trahison affective est un mal absolu. Pour comprendre ce que je viens de dire, on est obligé de rentrer en soi et d'admettre comme équivalent le ressenti qu'évoque mes mots avec son ressenti passé peut-être impensé de cette manière. Mais nous n'avons pas là à seulement se souvenir de ce fait en tant que simple intellectualité (comme des mots écrits sur un papier) mais à procéder à une résonance (une compréhension de ces mots comme ressenti, une « poésie » de ces mots), une rencontre entre vous et moi à travers des mots, un vécu quelque part commun et un ressenti énoncé de ce commun comme vécu. Tout cela c'est de l'affectif, c'est ce qui nous unit dans le vaste univers du vivant.

Le mode d'emploi de toutes les psy-quelque-chose, revient à faire comprendre les diverses « trahisons affectives » que la personne a eu à subir, qu'elle n'a pu comprendre et qu'elle a intronisée sous forme de « cuirasse caractérielle » (Wilhelm Reich), son mode d'adaptation à de telles blessures affectives, qui devient comportemental.

Si j'écris, c'est certes pour tenter de comprendre la violence et l'origine de la violence présente aujourd'hui et hier dans nos sociétés et sa naissance, mais aussi bien parce que j'ambitionne la reconnaissance de mes contemporains, ou d'une petite partie, et cette reconnaissance est affective, bien évidemment : je la ressentirais intérieurement comme une eau de mer au cours d'un bain estival, ou comme une onde de plaisir donné. Enfin... j'aimerais bien ambitionner la reconnaissance de mes contemporains : hélas, je ne cherche la correspondance qu'à travers la forme de mes formulations, pfeu !

De fait, il s'agit d'un partage différé et indirect (le propre de l’humain : se raconter des histoires) dont je serais l'initiateur, pour cette partie, dans la solution d'un problème universel, solution qui ne trouvera pas obligatoirement d'universalité dans ma formulation, bien évidemment, mais dont le schéma énoncé mène à une piste sure, adéquate et opportune, et dont me revaudraient certains de mes contemporains par leur acquiescement, leur jugement positif sans être pour autant absolu, qu'ils feraient de l'à-propos de mes assertions, jugement auquel un plus grand nombre sera d'autant plus gratifiant, et qui soulagerait une tension comme un bonheur conduisant à une certaine complicité : je me sentirais alors intégré à une « société » à laquelle je serais fier d'appartenir et de collaborer, de nourrir et de combler, de nombrer et de donner vie. Voilà l'affectif, ou tout au moins, encore un autre de ses aspects.

Et je préfère être seul plutôt que d'employer, dans une relation, des schémas affectifs malades. C'est un choix douloureux, très douloureux, mais je ne sais pas faire autrement, hélas ! Mais, c'est quoi des « schémas affectifs malade » ? Si je suis rebelle à employer ces schémas affectifs malades, est-ce parce qu'ils sont malades ou est-ce parce qu'ils ne me plaisent pas ? Et ne dis-je pas qu'ils sont malades parce qu'ils ne me plaisent pas ? Ou peut-être est-ce que je ne veux plus employer de relations du type « famille patriarcale » que je regimbe à de cette forme de relations. Peut-être n'est-ce qu'une mystérieuse prédisposition qui m'a rendu si sensible à certains aspects pourrissant de ces relations sur ma propre personne, dans les compromis demandés, les chantages « affectifs » (que tout un chacun connait), dans les rétributions affectives qu'on m'a demandées et l'implication affective à des contributions auxquelles je ne voyais que des désagrément du point de vue de mon intégration dans une universalité (ce qui a raté, de toutes façons !), l'incohérence de la sagesse (que d'autres nomment « punitions ») ne tenant qu'à de l'autorité sans cohérence (sinon le monde ne serait pas ce qu'il est aujourd'hui), les récompenses méta-sociales (les honneurs, l'argent, le « sexe » de Freud et l'expression de celui des femmes) et ce qu'elles demandent d'investissement, d'espoir de gain, poussant aux retranchements des méthodes de gambistes, n'étant pas à mon goût ?

Ainsi, je pourrais préciser que les relations affectives malades sont celles qui, sur la base innée de l'affectivité comme relation universelle ou comme poésie entre l'ensemble des mammifères, des oiseaux et d'autres encore, utilisent un outil, un moyen de l'intelligence pour passer outre cette affectivité ; ou bien utilisent cette affectivité à d'autres fins que la relation affective immédiate, telles que le pouvoir sur l'autre, la chéfitude, etc. C'est encore une fois une définition tautologique, me direz-vous, mais, je le répète, la maladie est un système tautologique : qui se mord la queue, qui tourne en rond, ne reconnait plus rien de l'aspect centripète de la vie, juste son aspect centrifuge.

Pour saisir ce qu'est une « cuirasse caractérielle » ou « cuirasse affective » il faut comprendre les travaux de Wilhelm Reich et de Rike Geerd Hamer. L'un et l'autre selon le contexte technique de son époque (Reich n'avait pas le scanner, par exemple, pour observer cette concrétion de la cuirasse sous la forme de « foyer de Hamer » dans le cerveau - et non pas seulement sous sa forme neuro-musculaire, mais aussi cérébrale ; et Hamer est né dans un contexte qui lui fait égarer l'aspect éthérique de la vie). Ce sera l'objet d'un autre post !

11:48 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : poésie, politique