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jeudi, 04 mars 2010

Poésie, one more time again

Je suis de pure spéculation : je n'apporterai aucune preuve à mes dires. J'ai remarqué que quoi qu'on dise qui soit vrai, rien ne passera s'il n'est perçu comme tel ; et pour qu'il le soit, il faut l'admettre. Comme je vais le montrer, pour l'admettre, il faut être libre d'une forme de ce monde. Car quand ce qui est dit est faux et passe, il passe du fait qu'il correspond à la satisfaction d'une angoisse.

Aussi, si je me trompe, je ne tromperai personne qui soit sain, mais lui apporterai au contraire bien du matériel pour poursuivre sa propre réflexion sur le monde, le comprendre et tenter d'y apporter son lot de solutions. Et pour celui qui se satisfera de la satisfaction de son angoisse par moi énoncée comme fausse, je lui en aurai montré, pour le moins, sans qu'il en admette la perception immédiate, mais différée à un moment ultérieur, une teneur : c'est que j'ai aussi pensé que l'énoncé du faux qui se reconnaît tel, le cauchemar, est la solution adoptée par l'enfant pour se rendre le monde tangible, faute de s'y adapter sans heurt.

J'ai mis longtemps à comprendre et surtout à admettre que quoi qu'on dise, on ne tombera juste que chez le juste ; ailleurs, l'évitement saura inévitablement éviter le juste, car il en a peur. Aussi, des preuves ? Rien n'y fera : il faut d'abord apprendre à penser juste, à confronter sans crainte son jugement au monde réel, pour me concéder que je n'ai pas été loin de la justesse, aujourd'hui, et que ces spéculations sont des moyens de preuves qui ne veulent prouver qu'elles-mêmes.

Des preuves ? Elles ne servent à rien à qui ne veut rien entendre qui ne lui correspondent pas, qui ne correspondent pas à ce qu'il attend entendre pour le rassurer et se rassurer, rassurer qu'il n' a rien à craindre de ce qui excite son angoisse du monde, apprentissage dont il a oublié les modalités.

De plus, n'importe qui sachant aussi peu écrire que moi, peut affirmer la même chose, sinon en des termes différents, sans que cela apportât quoi qui soit de valable à celui qui ne saura pas les lire, de quelque camp soit-il.

J'écris donc en toute connaissance de cause que je ne rassurerai personne puisque celui qui n'a pas besoin de me lire pourra peut-être jouir d'un autre point de vue que le sien ; que celui qui ne pourra pas le lire pour le comprendre n'y trouvera au pire qu'une autre ressource à son angoisse ; et que celui ou celle qui, sur le fil de cette lame qui ne détient que deux bords, placée en équilibre voudra se vouloir choir sur un flanc pour se reposer, le dos sur l'herbe et les fleurs à contempler les nuages qui passent, la tête sur le giron d'un ami, à ouïr les chants des oiseaux du ciel et des arbres, les narines frémissantes à l'odeur des fruits qui mûrissent.

Des preuves ? Des références scientifiques ? Que nenni ! Il faut, cependant, que je me méfie de mes propres dires, car ils pourront être interprétés pour renforcer la chasse au juste, le maquiller du sang des souffrances et des tortures, des jour sans pain dans un monde d'abondance. Non pas que je craigne d'être personnellement banni du monde du socialement correct, des verres de champagnes bus sous le catimini des polices privées, et des lumières criardes ; ou des costumes-cravate, des tailleurs trois pièces (et les sous-accessoires réhaussés de la séduction sexiste qui font que les hommes ont un sexe et que les femmes en sont un) ; de me retrouver démuni d'un véhicule « automobile » représentation de la puissance d'une présence unidividuelle, face aux autres ; de la perte de l'amour d'un de mes enfants qui aurait égaré sa reconnaissance en mes bienfaits pour lui, l'amour que j'ai éprouvé de le soigner, à prendre soin de ses besoins et de lui attacher héréditairement mes angoisses culturelles ; de perdre la révérence que j'ai pour les chefs que je n'ai jamais eu (là se pose un problème grammatical : « eus » ou « eue » ?) ; de me voir spolié de la bénédiction d'un dieu ; de craindre qu'une femme ne m'aimât pas en sachant que si elle ne m'aime pas, je ne l'aurai pas rendue moins sèche ; de me forfaire que je ne dusse qu'à moi seul d'être heureux ? Je suis assez bien conscient de la grandeur de mes imperfections que je ne voudrais pas éviter de les partager avec mon lecteur, ma lectrice, et ne vouloir pas l'enduire outre mesure de la teinte de mes erreurs : pourtant un léger effort lui sera demandé de sorte que, de mes éclaboussures de couleur, il ne s'en imbibera point davantage, « comme l'eau le sucre » !

Finalement, le testament ne sera que de poésie : partout où elle vit, elle inonde son monde de ses bienveillances ; ailleurs, c'est dans les chaînes qu'elle devient nocive, comme l'animal sauvage de Wilhelm Reich qu'on a enfermé dans une prison. La poésie transperce les preuves ; pour elle, il n'y a pas d'épreuve : elle vit. S'il me fallait user de mots modernes, je dirais qu'elle est l'information après laquelle tous ces tordus par l'angoisse de ne pouvoir simplement l'atteindre courent pour démontrer qu'elle est la vie cosmique, l'incommensurable de l'existence. Et, effectivement, elle est de mots, car nul autre que l'humain ne peut lui donner la consistance de cette « information », de cette communication au-delà du discible qui vous remplit l'âme (le cœur et le corps accomplis comme un ensemble), la comble sans le pouvoir du pouvoir de la combler sans fin en la rassasiant du moment vécu disciblement, vous rend humble comme le pouvoir de la joie partageable partagée, la division de soi dans l'éparpillement heureux du plaisir d'autrui, la poésie est de mots qui vous rend l'amour palpable en vous donnant la joie de le palper quand vous en êtes un canal.

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